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Jean-Henry Fabre 1
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Le 11 octobre 1915 meurt Jean-Henri Casimir Fabre

à Sérignan-du-Comtat Vaucluse, à 91 ans, né le 21 décembre 1823 à Saint-Léons du Lévézou en Aveyron, humaniste, un naturaliste, un entomologiste éminent, un écrivain passionné par la nature et un poète français et de langue d'oc et à ce titre félibre, lauréat de l'Académie française et d'un nombre élevé de prix.
Il peut être considéré comme l'un des précurseurs de l'éthologie, science du comportement animal, et de l'écophysiologie.
Ses découvertes sont tenues en haute estime en Russie, aux États-Unis et surtout au Japon où Jean-Henri Fabre est considéré comme le modèle accompli de l'homme de sciences et de l'homme de lettres réunis et, à ce titre, est au programme des enseignements de l'école primaire. Il est aussi mondialement connu pour ses Souvenirs entomologiques, qui ont été traduits en quinze langues.
Un grand savant qui pense en philosophe, voit en artiste, sent et s'exprime en poète , c'est ainsi que Jean Rostand5 qualifie Jean-Henri Fabre.

En bref

Entomologiste, poète, peintre, musicien, le Français Jean-Henri Fabre s’est acquis une renommée internationale avec les Souvenirs entomologiques 1879-1907, son œuvre maîtresse, traduite en de nombreuses langues.
Né le 21 décembre 1823, à Saint-Léons Aveyron, dans une famille modeste, Jean-Henri Fabre parvient à force de ténacité au statut d’enseignant : instituteur à Carpentras en 1842, il devient professeur de lycée, d’abord à Ajaccio en 1849, puis à Avignon en 1852. Marié, père de famille, il tente d’augmenter ses revenus grâce à l’industrie des colorants garance ; mais il ne réussit pas et se tourne vers la rédaction d’ouvrages d’enseignement destinés non seulement aux élèves, mais également aux adultes n’ayant pu poursuivre d’études. C’est la grande époque de la « vulgarisation », et Fabre rêve de partager la gloire des auteurs en vogue, comme Louis Figuier, dont les beaux volumes dorés sur tranche connaissent de gros tirages. Un premier petit livre de Chimie agricole (1862), qu’il édite lui-même, est épuisé en quelques semaines et suscite un véritable enthousiasme, dont la rumeur atteint le ministre de l’Éducation, Victor Duruy, qui pense à nommer Fabre précepteur du fils de Napoléon III ce qui ne se fera pas. En attendant, Duruy présente Fabre à l’éditeur Charles Delagrave ; c’est le début d’une collaboration qui durera plus de cinquante ans. Bientôt sort des presses une série de petits livres, La Science élémentaire, qui connaît aussitôt le succès, avec La Physique 1864, La Terre 1865, Le Ciel 1867, Le Livre d’histoires 1869, Les Ravageurs 1870… En tout, jusque vers 1900, Fabre fera paraître une centaine d’ouvrages didactiques, pour un tirage total dépassant le million d’exemplaires.
Cette activité se révèle rentable : Fabre quitte la fonction publique en 1870 et vit de ses droits d’auteur. En 1879, il acquiert un domaine à Sérignan-du-Comtat dans le Vaucluse : l’Harmas qui sera racheté par l’État en 1921, rattaché au Muséum national d’histoire naturelle et ouvert au public. C’est là qu’il va se livrer, jusqu’à sa mort le 11 octobre 1915, à sa passion : les insectes. Il ne les collectionne pas dans des boîtes vitrées, mais il les étudie vivants, les observant avec une extrême attention, notant et décrivant les détails de leur biologie et de leur écologie, ce qui fait de lui un précurseur, un des inventeurs d’une science nouvelle, l’éthologie. Par ailleurs, il désire vulgariser les résultats de ses recherches. Dès 1864, il propose à son éditeur un ouvrage sur les insectes. Mais ce n’est qu’en 1879 que celui-ci acceptera de publier la première série des Souvenirs entomologiques. Cet ouvrage est très remarqué : le public est conquis par ces récits étranges et barbares, dont les minuscules héros s’aiment, se combattent et s’entretuent dans nos jardins, voire nos maisons. La plupart des gens ne leur prêtent aucune attention, alors que les insectes ont beaucoup à nous apprendre, comme Fabre s’attache à le montrer. Un des chapitres les plus connus de la première série, Les trois coups de poignard, outre son intrigue dramatique, pose une question de fond : les comportements des insectes sont-ils le produit de l’évolution ? L’ouvrage de Darwin, On the Origin of Species by Means of Natural Selection L’Origine des espèces, paru en 1859, suscite d’âpres débats encore de nos jours. Fabre n’était pas convaincu : il n’a jamais cru à la théorie de l’évolution et ne cessera de la pourfendre – non sans porter ombrage à sa réputation de savant – dans les dix volumes des Souvenirs entomologiques, qu’il va publier jusqu’en 1907 et qui seront traduits et diffusés dans le monde entier.
Aujourd’hui, l’œuvre de Fabre nous paraît appartenir moins au domaine scientifique qu’à la littérature, à la poésie. La forme et le style parviennent à intéresser le lecteur à ces minuscules créatures, de prime abord rebutantes, voire inquiétantes. Mais Fabre est aussi un philosophe : il parle de la vie et de la mort, grandes questions qui concernent et passionnent les hommes depuis qu’ils ont la faculté de penser. Et c’est ce paradoxe qui a fait son succès : par le biais des insectes, Fabre est un des écrivains qui ont le mieux su nous parler de nous-mêmes.Y. Cambefort

Sa vie

L'éveil à la nature : un autodidacte précoce
Son père, Antoine Fabre, est originaire du Puech de la Font, au lieu-dit Malaval, au nord de Saint-Léons, sur la paroisse de Vaysse. Marié à Victoire Salgues, fille de l’huissier de Saint-Léons, il s’y établit dans l’espoir de succéder à son beau-père. Jean-Henri est élevé par ses grands-parents paternels, Pierre-Jean Fabre et Élizabeth Poujade, dans la ferme du Malaval. C'est dans ce Rouergue que le petit garçon découvre très tôt les réalités d'une nature contrastée et sauvage, qui va aiguiser son esprit d'observation et sa pugnacité.
L'œil toujours en éveil sur la bête et sur la plante, ainsi s'exerçait tout seul, sans y prendre garde, le futur observateur, marmouset de six ans. Il allait à la fleur, il allait à l'insecte comme la Piéride va au chou et la Vanesse au char.
De retour au village de Saint-Léons à l'âge de sept ans, en compagnie de son frère Frédéric, de deux ans son cadet, le jeune garçon s'instruit dans de nombreux domaines avec les moyens mis à sa disposition. Son instituteur est son parrain, Pierre Ricard. Pendant trois ans, il lui apprend à lire et à écrire dans une grange transformée en classe, entouré d'animaux de basse-cour. Son plus précieux outil scolaire est alors un abécédaire illustré par des animaux que son père Antoine lui a rapporté de la ville. Dans le chapitre IV de la 6e série des Souvenirs entomologiques, sous le titre Mon école, il le décrit de la sorte : C'était une grande image de six liards, coloriée et subdivisée en compartiments où des animaux de toute sorte enseignaient la série des lettres par les initiales de leur nom .... Puis, progressant sur l'utilisation de son abécédaire et ses capacités de lecture : Comme récompense de mes progrès, on me donne les fables de La Fontaine, livre de vingt sous, très riche en images, petites il est vrai, très incorrectes, délicieuses toutefois. Il y a là le corbeau, le renard, le loup, la pie, la grenouille, le lapin, l'âne, le chien, le chat, tous personnages de ma connaissance.
Les difficultés professionnelles de son père, paysan devenu cafetier, vont interrompre sans cesse sa scolarité, obligeant Jean-Henri à être autodidacte dès l'âge de 10 ans. Dès 1833 et pendant les six années suivantes, l'exode rural va pousser la famille à Rodez, Aurillac, Toulouse, Montpellier, Pierrelatte et enfin Avignon.
À dix ans, élève au Collège royal de Rodez, il est clergeon dans la chapelle de l'établissement universitaire ce qui lui vaut la gratuité de l'externat. Quatre ans après, son père s’installe à Toulouse où Jean Henri peut suivre gratuitement les cours du séminaire de l’Esquille. Puis la famille déménage à nouveau. À Montpellier, âgé de quatorze ans, il est tenté par la médecine mais doit y renoncer pour aider ses parents. Il abandonne ses études pour gagner sa vie et se retrouve à vendre des citrons à la foire de Beaucaire puis se fait embaucher comme manœuvre pour la construction du chemin de fer Nîmes-Beaucaire.
Il y a pourtant appris assez de latin et de grec pour se passionner pour les auteurs de l'Antiquité. Il affectionne surtout Virgile, en qui il découvre un poète épris de nature. Décidé à se présenter à un examen pour obtenir une bourse, en 1840, ayant appris qu'un concours d'entrée recrutait des élèves instituteurs, il part à Avignon, sort premier de sa promotion et rentre à l'École normale d'instituteurs. Reçu en qualité de pensionnaire boursier, il est, à dix-sept ans, enfin assuré du gîte et du couvert.
Les résultats de sa première année sont passables. Au milieu de la seconde, il est déclaré élève insuffisant et médiocre. Piqué au vif, il demande et obtient de suivre son dernier semestre en 3e et obtient le Brevet supérieur en 1842, avec une année d'avance sur le cycle habituel.

Carpentras : l'instituteur érudit

Le mont Ventoux fut pour Fabre un important terrain d'étude. Âgé de dix-neuf ans, il devient instituteur à l’école primaire annexe du collège de Carpentras. Il va y rester sept ans. En cette année 1842, ses émoluments ne dépassent pas 700 F. Il reprend pourtant ses études latines en relisant Virgile et en traduisant Homère. C'est aussi en 1842 qu'il publie son premier recueil de poèmes Invocations et qu'il escalade pour la première fois le mont Ventoux.
L’installation de l’aîné attire sa famille. Son père et sa mère rejoignent Pierrelatte pour tenir un nouveau café sur la Place d’Armes, tandis que son frère est nommé instituteur à Lapalud16. Le 3 octobre 1844, il épouse Marie-Césarine Villard, institutrice originaire de Carpentras, avec qui il a eu sept enfants dont plusieurs sont morts avant d'atteindre l'âge adulte.
Étouffé par l'enseignement de l'époque, qu'il qualifie de prison, il met à profit la clémence du climat de la région pour encourager l'enseignement en plein air. Poussé par son envie d'apprendre, il consacre son temps libre à la préparation de nouveaux diplômes, tout en menant diverses recherches, notamment en entomologie. Il obtient en 1844, à Montpellier, le baccalauréat ès-lettres, en 1846 le baccalauréat en mathématiques, en 1847 la licence de sciences mathématiques enfin en 1848 la licence de sciences physiques.
C’est cette même année que son jeune fils est atteint de fièvre, son état empirant et devant l’impuissance avouée des médecins traitants, il tente de la sauver avec les méthodes prescrites par François-Vincent Raspail. L’enfant meurt et il annonce son deuil à son frère le 8 septembre 1848. Pour faire face et ne pouvant plus se contenter de son maigre salaire, il postule à un poste de professeur de mathématiques au lycée de Tournon, qui lui échappe tout comme celui d’Avignon.
Durant toute cette période, Fabre avait fait sien le précepte de Platon : Que nul n'entre ici s'il n'est géomètre. Entre vingt et trente ans, il se perfectionne en mathématiques et en particulier l'ellipse, l'hyperbole, les tangentes, la mécanique analytique, le calcul infinitésimal. Lui pour qui le nombre est empreint de poésie, va jusqu'à lui consacrer une ode, Arithmos.
Séduit par la richesse botanique et entomologique de la Provence, il s'adonne à nouveau à sa passion des insectes et commence une carrière d'historien des bêtes. Mais c'est la lecture des travaux de Léon Dufour qui va le pousser vers sa nouvelle carrière.

Ajaccio 1849-1852 : éclosion du naturaliste

Nommé professeur de physique au collège impérial d’Ajaccio11, le 22 janvier 1849, il s'installe dans l'île avec son épouse. Fabre, qui enseigne à présent la physique et la chimie dans les classes secondaires, bénéficie d'une nette amélioration de ses conditions de travail puisque ses appointements se montent à 1 800 francs. La Corse ouvre au jeune professeur un champ de recherches et d’observations qui va compléter ce qu’il a déjà entrepris sur les pentes du Ventoux.
La découverte de la nature corse et de la civilisation méditerranéenne lui offre un important champ d'investigation. Jean-Henri et Marie-Césarine multiplient les excursions, découvrent la richesse de la faune des mollusques, et récoltent de nombreuses espèces de coquillages marins, terrestres ou d'eau douce. Fabre réunit les éléments pour une Conchyliologie de la Corse. Ce travail d’inventaires et de descriptions des mollusques et coquillages, réunissant les connaissances de Linné, Lamarck et bien d'autres savants, est enrichi d'une foule de notes et d'observations personnelles. Il ne sera cependant jamais publié, la brièveté de son séjour ne lui permettant pas de l'achever.
Alfred Moquin-Tandon, joua un rôle dans le choix de Fabre pour la botanique.
Avec Esprit Requien, qui habitait Bonifacio, il amasse les plantes rares et, profitant des vacances scolaires pour herboriser, constitue un herbier imposant. Il décrit cela dans Mon école : En mes heures de liberté, je l'accompagnais dans ses courses botaniques, et jamais le maître n'eut disciple plus attentif. Leur projet commun de réaliser une flore de la Corse sera anéanti par la mort subite et prématurée du naturaliste avignonnais, emporté par une congestion cérébrale en mai 1851.
La Corse, c'est aussi pour Fabre la rencontre avec le zoologiste montpelliérain Moquin-Tandon venu y étudier la riche faune d'araignées, insectes, crustacés et reptiles. Grâce à Requien, Fabre avait déjà échangé quelques lettres botaniques et un jour où celui-ci ne trouvait aucune chambre dans les hôtels, Fabre lui offre le gîte et le couvert. Membre de plusieurs Académies, Moquin-Tandon, qui était de plus très cultivé en littérature et poète, a une influence déterminante dans le choix de la carrière naturaliste de Fabre. Il lui donna, dit-il, la seule et mémorable leçon d'histoire naturelle que j'aie jamais reçue dans ma vie en disséquant un escargot avec seulement deux aiguilles à coudre, avant de prononcer la fameuse phrase qui eut raison de ses hésitations : Laissez là vos mathématiques .... Venez à la bête, à la plante; et si vous avez, comme il me semble, quelque ardeur dans les veines, vous trouverez qui vous écoutera.
Malgré les conditions idéales que lui offrait la Corse, plusieurs raisons incitent Fabre à demander son retour sur le continent : des accès de paludisme qu'il avait contracté en herborisant exigeaient un climat plus sain ; les traitements des professeurs du collège avaient été réduits de moitié et la chaire de physique risquait d'être supprimée ; il voulait préparer un doctorat ou l'agrégation. Diminué fortement, il demande et obtient son retour sur le continent pour se soigner. Ainsi, il se rapproche de ses parents et de son frère Frédéric, durablement installés dans la banlieue d'Avignon, à la ferme de Roberty.
Dans un courrier adressé à son cadet le 3 décembre 1851, il narre les péripéties de son éprouvante traversée. Au lieu des 18 heures normales du trajet, son bateau pris dans la tempête met trois jours et deux nuits pour rejoindre Marseille dans des conditions épouvantables.

Avignon 1853-1871 : l'enseignant chercheur

Ayant choisi de s'orienter vers la recherche en éthologie des insectes, science des mœurs des insectes, Fabre rentre définitivement de Corse en janvier 1853.Il loge 4rue Saint-Thomas-d'Aquin, puis 22 rue de la Masse.Il est nommé professeur, répétiteur de physique et chimie au lycée impérial d'Avignon où il enseigne pendant dix-huit ans.
L'année suivante, en juillet 1854, il est reçu à la licence ès-sciences naturelles20 avec les félicitations du jury ; réussite déterminante qui lui ouvre la voie du doctorat ou de l'agrégation. Renonçant à contrecœur à l'agrégation, qui l'aurait empêché de s'engager dans une recherche personnelle, Fabre prépare un doctorat. Son sujet de thèse principal s'intitule Recherche sur l'anatomie des organes reproducteurs et sur le développement des myriapodes, et son sujet secondaire, portant sur la botanique, Recherche sur les tubercules de l'Himantoglossum hircinum. Au cours de l’hiver de la même année, il prend connaissance des travaux de l’entomologiste Léon Dufour, qui venait d’étudier dans les Landes une grosse guêpe, le Cerceris. C’est un déclic. Fabre connaît cet insecte qui a colonisé les pentes du Ventoux. Il se remet à l’étudier, et publie le résultat de ses recherches en 1855 dans les Annales de sciences naturelles sous le titre Observations sur les mœurs des Cerceris et sur la cause de la longue conservation des Coléoptères dont ils approvisionnent leurs larve. La même année, les Fabre emménagent au 14 rue des Teinturiers.
Toujours en 1855, il soutient sa thèse à Paris devant un jury composé de deux professeurs au Muséum national d'histoire naturelle, Henri Milne Edwards et Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, et du botaniste Jean-Baptiste Payer. Sur place, il rend visite à son ami Moquin-Tandon, qu’il avait hébergé à Ajaccio. Mais les retrouvailles entre le petit professeur de province et celui qui est devenu maître de la chaire d’histoire naturelle de la Faculté de médecine de Paris manquent de cordialité.
Enfin, son Étude sur l'instinct et les métamorphoses des sphégiens obtient la mention honorable au concours pour le prix Montyon de physiologie, décerné par l'Académie des sciences. À partir de 1856, Fabre multiplie les observations et rompt son isolement en échangeant fructueusement ses notes et échantillons avec Léon Dufour. Il réfute son hypothèse d'une liqueur conservatrice à l'origine de la paralysie des proies vivantes des cerceris en démontrant la destruction sélective des centres nerveux non vitaux des buprestes, par les savants coups de stylet des hyménoptères.
En 1857, il décrit les comportements les plus intimes des hyménoptères, bembex, scolies et coléoptères avec une rigueur méthodologique et dans une langue de qualité. Il étudie la reproduction de la truffe, sujet sensible pour la prospérité économique du département et, dans une note présentée en avril à la Société d'agriculture et d'horticulture de Vaucluse, réfute la théorie de la galle du chêne.
Fabre s'étant lié d'amitié avec le botaniste avignonnais Théodore Delacour qui dirigeait à Paris les Établissements Vilmorin, celui-ci lui présente Bernard Verlot, chef des cultures au Muséum national d'histoire naturelle à Paris. Ensemble, ils explorent la flore du Mont Ventoux et instruisent Fabre des dernières techniques en horticulture.
Pensant tirer profit de ses connaissances en chimie, Fabre effectue des recherches sur la garancine, poudre de racine de garance qui permettait de teindre les tissus en rouge, fournissant notamment les fameux pantalons rouges de l'infanterie française. De 1859 à 1861, il dépose quatre brevets d'invention touchant à l'analyse des fraudes, mais surtout à l'alizarine pure, qu'il a réussi à extraire par une méthode d’une simplicité étonnante. Mais la découverte de l'alizarine artificielle, réalisée par Carl Graebe et Liebermann en 1868, sonne le glas de l'industrie tinctoriale de la garance et des ressources agricoles qu'elle représentait dans le Vaucluse, ruinant du même coup les dix années d’efforts que Fabre avait consacrées à ces procédés.
En 1862, il publie son premier livre scolaire sous le titre de Chimie Agricole;
En 1865, sur la recommandation du chimiste Jean-Baptiste Dumas, Louis Pasteur vient en personne le consulter pour tenter de sauver l'industrie séricicole française30. Les vers à soie étaient décimés par une désastreuse épidémie de pébrine, caractérisée par l'éruption de points noirs, évoquant des grains de poivre. Fabre lui explique la biologie du bombyx du mûrier et les moyens de sélectionner les œufs indemnes. Il le reçoit à son domicile, 14 rue des Teinturiers, et son hôte est étonné, qu’au milieu de leur entretien, le savant lui demande de voir sa cave. Fabre ne peut que lui montrer une dame-jeanne posée sur un tabouret de paille dans un coin de sa cuisine. Mais la leçon porte ses fruits et Pasteur réussit à enrayer la redoutable épidémie.
En 1866, la municipalité nomme Fabre au poste de conservateur du musée d'Histoire naturelle d'Avignon rebaptisé musée Requien depuis 1851, alors abrité dans l'église Saint-Martial désaffectée. C'est là que Fabre travaille aux colorants et donne des cours publics de chimie. C'est là également qu'il reçoit en 1867 la visite surprise de Victor Duruy 1811-1894. Ce fils d'ouvrier devenu normalien et inspecteur de l'enseignement avait pris en amitié le naturaliste avec qui il partageait le rêve d'une instruction accessible aux plus démunis. Devenu Ministre de l'Instruction publique, Duruy convoque Fabre à Paris deux ans plus tard pour lui remettre la Légion d'honneur et le présenter à l'empereur Napoléon III.
Duruy le charge de donner des cours du soir pour adultes qui, ouverts à tous les publics, vont connaître un franc succès. Ses leçons de botanique attirent un public attentif composé de jeunes villageoises qui lui apportent tant de fleurs que son bureau disparaissait sous les richesses des serres voisines, d'agriculteurs curieux de science, mais aussi de personnalités fort cultivées, telles que l'éditeur Joseph Roumanille et le philosophe anglais John Stuart Mill 1806-1873, directeur de la Compagnie des Indes, qui devient l'un de ses plus fidèles amis.
Mais la loi Duruy 10 juillet 1867 pour la démocratisation de l'enseignement laïque, notamment l'accès des jeunes filles à l'instruction secondaire, déclenche une cabale des cléricaux et des conservateurs, obligeant le ministre à démissionner. Accusé d'avoir osé expliquer la fécondation des fleurs devant des jeunes filles jugées innocentes par certains moralisateurs, les cours du soir sont supprimés après deux années d'existence et Fabre est dénoncé comme subversif et dangereux. Incapable de gérer une telle atteinte à son honneur, il démissionne de son poste au lycée fin 1870. Malgré ses vingt-huit ans de service, il quitte l’enseignement sans obtenir de pension.
De plus, ses bailleuses, deux vieilles demoiselles bigotes, convaincues de son immoralité, le mettent en demeure de quitter la rue des Teinturiers. À leur demande, il reçoit la visite d'un huissier pour être expulsé dans le mois avec sa femme et ses enfants. C'est grâce à l'aide de Stuart Mill, qui lui avance la somme de trois mille francs, que Fabre et sa famille vont pouvoir s'installer, en novembre, à Orange. Bien que riche sur le plan scientifique, cette période n'a pas été favorable à Fabre d'un point de vue financier puisqu'il n'a bénéficié d'aucun avancement ni augmentation de salaire en dix-huit ans.
Si la lecture était le réconfort de sa misère, c’est sa plume qui va lui permettre d'en sortir. Le succès remporté par deux de ses livres destinés à la jeunesse, Le Ciel, et Histoire de la bûche ; récits sur la vie des plantes, édités par la librairie Garnier en 1867 et largement diffusés par Hachette, l’encourage à poursuivre son œuvre de pédagogue en composant des livres scolaires. Grâce à la confiance et à l'amitié de l'éditeur Charles Delagrave, Fabre participe activement à la naissance de l'école républicaine et aux prémices d'une pédagogie universelle.

Orange 1871-1879 : écrivain pédagogue

Désormais libéré des charges et des contraintes de l’enseignement, Fabre se retrouve, à 47 ans, sans situation, sans ressources et sans toit, alors que la guerre de 1870 bat son plein. Tandis que Marie-Césarine et les enfants séjournent chez ses parents à Carpentras, Fabre loge provisoirement chez un ami, le docteur Ripert, au Castel des Arènes à Orange. Puis il trouve un logement au centre ville, place des Cordeliers, qui lui permet de réunir la famille, mais trop bruyant et trop loin de la nature pour y poursuivre des études entomologiques.
En 1872, les Fabre s'installent en location pour huit ans dans la maison dite la Vinarde, située à la sortie de la ville. La garrigue aux portes du logis lui permet de recréer, avec l'aide de son fils Jules né en 1861, un petit jardin botanique et de reprendre ses observations du Chalicodome, d'étudier le Pompile apical, les Halictes, les Chrysomèles, de récolter les champignons et d'en peindre les premières aquarelles.
Mais surtout, Fabre entreprend de très importants travaux de vulgarisation qui le préparent à sa mission d'écrivain scientifique. En plus du premier volume des Souvenirs et une étude sur les Halictes, il rédige pendant les neuf ans de son séjour à Orange plus de quatre-vingt ouvrages destinés à l'enseignement, dont des manuels scolaires et livres de lecture pour enfants qui, publiés par Charles Delagrave, vont connaître un grand succès : Arithmétique, Algèbre et Trigonométrie, Botanique et Zoologie, Géographie, Géologie, Physique, Chimie organique, Astronomie élémentaire, Cours de cosmographie, Le ménage ou causerie sur l'économie domestique, L'industrie…

John Stuart Mill.

Plusieurs générations d'élèves ont étudié leurs matières scolaires avec ces textes à la fois scientifiques et littéraires. Fabre se voulait pédagogue et s'en explique dans les Souvenirs affirmant que s'il écrit pour les savants et pour les philosophes, il écrit surtout pour les jeunes à qui il désire faire aimer l'histoire naturelle.
Le 7 mai 1873, il est invité à la villa Mon Loisir par Stuart Mill pour déjeuner. Arrivé à Avignon, il s’arrête d’abord chez le libraire Clément Saint-Just à l’angle de la rue des Marchands et de la place du Change, et apprend qu'il vient de décéder. Le lendemain, son ami et protecteur, mort des suites d'une pneumonie, rejoint sa femme qui l'attendait au Cimetière Saint-Véran à Avignon. Fabre lui-même est frappé par une pneumonie mais finit par guérir.
Le 14 septembre 1877, à midi, son fils Jules, gravement malade, décède à l'âge de 16 ans. Fabre est très affecté par cette disparition. Non seulement son fils l'assistait dans ses travaux entomologiques mais il voyait en lui son successeur et il lui dédicaça sa deuxième série des Souvenirs entomologiques.
Loin d'être perdues, ces dix années à Orange lui permettent de préparer les neuf volumes suivants de son œuvre capitale, les Souvenirs entomologiques. Un incident va précipiter son départ. Son propriétaire ayant fait élaguer l’allée de platanes qui conduit à sa maison, sans l’avoir prévenu, il l’accuse d’acte de barbarie et décide de quitter Orange et la Vinarde.

Le maître de Sérignan 1879-1915

En mars 1879, grâce à l'argent que lui rapporte la vente de ses livres, Fabre achète une superbe propriété à huit kilomètres d'Orange sur une terre non cultivée, qu'il nomme L'Harmas41, à la sortie du village de Sérignan-du-Comtat. Il va pouvoir enfin, dans cette nouvelle demeure, se consacrer à son rêve de toujours, l'observation des insectes et faire de l’Harmas de Sérignan le premier laboratoire vivant de la nature et de l’entomologie.
Son installation marque à la fois la dislocation de sa famille, certains de ses enfants sont mariés, d’autres vont le quitter, mais aussi sa recomposition puisqu'il accueille son père. Le vieux cafetier de Pierrelatte devient même une figure familière du village où il va s’éteindre à l’âge de 96 ans.
En revanche, Fabre se retrouve veuf. Son épouse décède le 25 juillet 1885, âgée de 62 ans. Pour aider aux tâches ménagères, il décide de prendre à son service une jeune domestique, fille de la dame Daudel, l’épicière du village. Par la suite, le 23 juillet 1887, il épouse en secondes noces la jeune Marie Josèphe Daudel de 41 ans sa cadette qui va lui donner trois enfants. Le couple voit naître successivement Paul, le 14 septembre 1888, Pauline, le 30 mars 1890, et Anna, le 31 octobre 1893.
L'entomologiste se heurte à un nouveau problème, la chute de la vente de ses ouvrages à partir de 1884. L'instruction obligatoire — depuis les lois de Jules Ferry — dans le cadre de la laïcité, fait contester par bon nombre d'inspecteurs primaires ses livres considérés de support de l'autorité de l'Église pour les trop fréquentes allusions spirituelles qui s'y trouvent. Le 27 janvier 1889, dans une lettre à son éditeur, il avoue son anxiété et confie que le désespoir commence à le gagner. Il est plus ou moins sauvé de la misère par la reconnaissance de ses pairs. Membre correspondant de l'Institut depuis 1887, il reçoit deux ans plus tard le prix Le Petit Dormoy, doté de 10 000 francs. C'est un encouragement qui stimule Fabre.
L'Harmas devient rapidement son lieu privilégié d'observation des mœurs des insectes. Pour ce faire, Fabre est amené à concevoir des appareils aussi curieux que rudimentaires mais dont l'utilité est prouvée par les résultats de ses observations. Ce qui lui permet d'écrire la deuxième série des Souvenirs entomologiques. Huit autres séries vont suivre, à un rythme irrégulier jusqu'en 1907.
Pour ce faire, il s'adjoint deux jardiniers auxquels il va rendre hommage dans son œuvre. Le premier est Favier, un ancien militaire. Dans son tome II, Fabre cite une anecdote mettant en exergue ses répliques assassines, son esprit vif et son bon sens :
« Je venais de récolter une poignée de crottes de lapin où la loupe m'avait révélé une végétation cryptogamique digne d'examen ultérieur. Survient un indiscret qui m'a vu recueillir dans un cornet de papier la précieuse trouvaille. Il soupçonne une affaire d'argent, un commerce insensé.
Tout, pour l'homme de la campagne, doit se traduire par le gros sou. À ses yeux, je me fais de grosses rentes avec ses crottes de lapin.
« Que fait ton maître de ces pétourles c'est le mot de l'endroit? demande-t-il insidieusement à Favier. Il les distille pour en retirer de l'essence répond mon homme avec un aplomb superbe.
Abasourdi par la révélation, le questionneur tourne le dos et s'en va.
À la mort de Favier, l'entomologiste engage Marius Guigues, un rempailleur de chaises aveugle depuis l'âge de 20 ans. En dépit de son handicap, celui-ci va se révéler particulièrement doué pour réaliser sur les indications de son employeur tout l'appareillage cages, pièges, boîtes d'étude pour les expériences et les observations menées par celui-ci.
Ses travaux et les conditions précaires qui conditionnent ses recherches sont maintenant connus au plus haut niveau. En 1907, le préfet du Vaucluse, Belleudy, déclare publiquement être affligé de voir « un aussi grand esprit, un tel savant, un pareil maître de la littérature française aussi peu aidé. Il intervient auprès du ministre Gaston Doumergue qui accorde à Fabre une allocation de 1 000 francs sur le crédit des encouragements aux gens de lettres. Peu satisfait, le préfet revient à la charge lors de la session du Conseil Général de Vaucluse, en août 1908. L'assemblée décide de lui verser une rente annuelle de 500 francs en hommage public rendu à sa haute science et à son excessive modestie. De plus est mis à sa disposition l'appareillage du laboratoire départemental de chimie agricole qui était inemployé et qui devait être vendu.
L'académicien Edmond Rostand, qui écrivit le 7 avril 1910 à propos des ouvrages de Jean-Henri Fabre :
Ses livres ont été mon enchantement pendant une bien longue convalescence.
C'est en 1907 que des liens se créent puis qu'une amitié s'installe entre Fabre et son disciple le docteur Legros, député du Loir-et-Cher. Celui-ci décide de le faire connaître du monde entier et rédige en 1910 une première biographie illustrée de 112 pages, Jean-Henri Fabre, naturaliste, puis une seconde en 1912, richement documentée par la correspondance de Fabre : La vie de J.-H. Fabre, naturaliste, ouvrage qui va être traduit dans de nombreuses langues, la version anglaise paraissant dès 1913.
Le docteur est aussi à l'origine de l'idée de célébrer son jubilé. Pour ce faire, il réussit à réunir autour de lui des personnalités comme Henri Poincaré, Edmond Rostand, Romain Rolland et Maurice Maeterlinck, tous admirateurs de Fabre. Le jour de la cérémonie, le 3 avril 1910, Edmond Perrier, de l'Institut, lui remet une plaquette d'or sur laquelle avait été gravés au recto le portrait du maître et au verso une composition représentant son œuvre, son village de Sérignan et le Ventoux. Edmond Rostand, qui n'a pu être sur place, envoie un message :
« Empêché de venir au milieu de vous, je suis du meilleur de mon cœur avec ceux qui fêtent aujourd'hui un homme admirable, une des plus pures gloires de France, le grand savant dont j'admire l'œuvre, le poète savoureux et profond, le Virgile des insectes, qui nous a fait agenouiller dans l'herbe, le solitaire dont la vie est le plus merveilleux des exemples de sagesse, la noble figure qui, coiffée de son feutre noir, fait de Sérignan, le pendant de Maillane.
C'est justement au cours de l'année 1913 que, se rendant à Maillane pour saluer Frédéric Mistral, le président de la République Raymond Poincaré apporte l'hommage de la nation à Fabre. Devant une foule immense, il s'adresse à lui en ces termes :
« Ce n'est pas seulement par la patience de vos recherches et la consciencieuse exactitude de vos observations que vous avez donné à l'entomologie et à la science en général une gloire nouvelle. Vous avez mis dans les êtres les plus humbles une attention si passionnée, une pénétration si ardente, un enthousiasme si bienveillant et si compréhensible, que dans les plus petites choses, vous avez fait voir de très grandes et qu'à chaque pas de votre œuvre nous éprouvons la sensation de nous pencher sur l'infini.
La déclaration de la guerre en 1914, bouleverse à nouveau sa vie. Devenu une nouvelle fois veuf55, il est à la charge de sa seule fille Aglaé qui s'adjoint pour le soigner la sœur Adrienne, une religieuse de la congrégation de Viviers. Son fils Paul est sur le front, et un an plus tard, Jean-Henri Fabre apprend avec joie qu'il est sain et sauf après la victoire de la Marne.
Contraint depuis des mois de garder le lit à cause de ses crises d'urémie, Jean-Henri Fabre entre en agonie le 7 octobre et s'éteint le 11 octobre 1915, à six heures du soir, âgé de 91 ans. Il est enterré dans la tombe familiale du vieux cimetière de Sérignan. Fabre y avait fait graver deux phrases en latin : Quos periisse putamus praemissi sunt ceux que nous croyons perdus ont été envoyés en avant de Sénèque et Minime finis sed limen vitae excelsioris la mort n'est pas une fin mais le seuil d'une vie plus haute, de lui-même.

Poète félibre et compositeur

Les sept membres fondateurs du Félibrige, dont Joseph Roumanille et Frédéric Mistral, que Fabre rejoignit en tant que Felibre di Tavan.
Épris de poésie depuis son enfance, on sait qu'à l'âge de dix sept ans, Fabre n'hésita pas à sacrifier ses trois francs durement gagnés pour l'achat des Poésies de Jean Reboul. L'année suivante, il publie un premier poème dans L'indicateur d'Avignon du 26 juin 1842, suivi du commentaire : Ces vers, qui annoncent d'heureuses dispositions pour la poésie, sont d'un jeune homme de dix-sept à dix-huit ans, élève de l'École normale d'Avignon. Il a vingt et un ans quand L'Écho du Ventoux du 20 janvier 1844 publie son poème Les Fleurs, puis Ce que donne l'or, bientôt suivi d'une série de poèmes sur la nature, dont Les Mondes paru dans le Mercure Aptésien le 26 février 1845, remarqué par Camille Flammarion.
En 1854, le Docteur Barjavel de Carpentras, érudit bibliophile, cherche à faire publier le poème Arytmos de Fabre, mais n'y parvient pas. Il en avait pourtant déjà rédigé un commentaire, qui devait figurer en tête du poème, dans lequel il loue les qualités littéraires du naturaliste : M. Jean-Henri Fabre, auteur de l'ode remarquable qu'on va lire, n'en est pas, comme poète, à son coup d'essai. Déjà, il y a plusieurs années, son talent littéraire, que corroborent aujourd'hui ses nombreuses acquisitions scientifiques, s'était dévoilé par diverses productions qui étincellent comme des diamants de la plus belle eau.
Dès 1868, Fabre se lie avec Joseph Roumanille, fervent admirateur de ses cours du soir, lequel lui présente ensuite son élève Frédéric Mistral. Ce dernier l'invite à rejoindre le Félibrige et à publier ses poèmes sous le nom de Felibre di Tavan le Félibre des Hannetons. En 1909, Roumanille édite un recueil de 21 poésies de Fabre en provençal, avec traduction française en regard : Oubreto Prouvençalo dóu Felibre di Tavan et dont le titre complet était : Oubreto Prouvençalo dóu Felibre di Tavan, rambaiado pèr J.H. Fabre, Œuvrettes Provençales du Félibre des Hannetons recueillies par J.-H. Fabre, Avignon, Roumanille, 1909. Il est élu Majoral du Félibrige Cigalo de Carcassouno, o de l'Amourié en 1909
Un recueil de soixante-six poésies, écrites à ses brèves heures de loisir entre 1842 et 1908, dont une série de vingt-six avec pièces musicales composées par Fabre lui-même sur le petit harmonium de l'Harmas, a été publiée pour le centenaire du félibrige chez Delagrave en 1925, puis rééditée en 1980 chez Marcel Petit, Raphèle-lès-Arles : Poésies françaises et provençales de Jean-Henri Fabre, recueillies en édition définitive du Centenaire par Pierre Julian.
Pour Revel, qui consacre une biographie à celui qu'il appelle, selon le mot de Victor Hugo, l’Homère des insectes, toute l'œuvre de Fabre, et non plus seulement ses poèmes, est imprégnée de cette humanité virgilienne qui fait frémir les Géorgiques et l’Énéide.

Homme de sciences fin de sa vie.

Jean-Henri Fabre entretient une correspondance avec Stuart Mill, Joseph Roumanille et Frédéric Mistral, mais surtout avec Charles Darwin, dont il n'admet pas la théorie de l'évolution. En effet, ce concept trop nouveau va à l'encontre des idées véhiculées par la religion encore très présente à cette époque. Fabre lui-même sera influencé dans ses analyses et ses écrits par la religion.
En 1859, soit vingt ans avant la parution des Souvenirs, Darwin, qui avait déjà pressenti son génie, le cite dans l’Origine des espèces et le sacre inimitable observer » observateur incomparable.
On trouve au chapitre VII de la série II des Souvenirs, intitulé Nouvelles recherches sur les chalicodomes, un témoignage de l'estime que Fabre avait pour Darwin :
Ce chapitre et le suivant devaient être dédiés, sous forme de lettre, à l'illustre naturaliste anglais qui repose maintenant à Westminster, en face de Newton, à Charles Darwin. Mon devoir était de lui rendre compte du résultat de quelques expériences qu'il m'avait suggérées dans notre correspondance, devoir bien doux pour moi, car si les faits, tels que je les observe, m'éloignent de ses théories, je n'ai pas moins en profonde vénération sa noblesse de caractère et sa candeur de savant. Je rédigeais ma lettre quand m'arriva la poignante nouvelle : l'excellent homme n'était plus ; après avoir sondé la grandiose question des origines, il était aux prises avec l'ultime et ténébreux problème de l'au-delà. Je renonce donc à la forme épistolaire, contresens devant la tombe de Westminster. Une rédaction impersonnelle, libre d'allures, exposera ce que j'avais à raconter sur un ton plus académique.

Fabre, une référence

Au début des années 1920, Étienne Rabaud, professeur à la Faculté des sciences de Paris, dans un livre intitulé Fabre et la science, l'accusa d'avoir refusé le transformisme, manqué d'originalité et eu une trop grande tendance à généraliser. Lui reprochant par la même occasion des observations assez approximatives, il alla jusqu’à affirmer que des dix volumes des Souvenirs entomologiques, il ne restait que quelques dizaines de pages utiles.
De nos jours, Fabre a été à nouveau mis en cause par Patrick Tort dans son ouvrage : Fabre le miroir aux insectes, un livre qui se veut démystificateur de la légende de celui que Victor Hugo avait surnommé l'Homère des insectes. L’auteur, spécialiste du darwinisme, est aussi le fondateur en 1998 de l'Institut Charles-Darwin international. L’accueil de cet ouvrage a été très mitigé. Pour un critique, cet auteur donne l'impression de fouiller partout pour systématiquement tout dénigrer. Il constate que ce livre commence avec peu d'élégance — personne ne pouvant défendre Fabre dans ses attaques contre la théorie de l'évolution — car en définitive Patrick Tort ne relève pas tant que cela d'incorrections et d'erreurs volontaires ou involontaires de l’entomologiste. Quant à Alain Prevot, auteur d'un suivi éditorial du livre de Tort, il dénonce, avec l'auteur de Fabre, le miroir aux insectes, la sainteté supposée de Fabre, et s’étonne de constater que l’homme des insectes conserve pourtant ses adeptes enthousiastes, ses cultes régionaux et ses célébrations jubilaires — en Aveyron, en Provence, à Paris, au Japon et ailleurs. Il salue dans cet ouvrage le premier livre consacré à une analyse scientifique et critique de l’œuvre et de la doctrine naturalistes de celui qu’il appelle le savant occitan.
L’étude d’Eileen Crist, professeur assistant au Centre des Études interdisciplinaires de l’Institut polytechnique de Virginie, mérite également d'être mentionnée, tout d’abord parce qu’elle est écrite dans un pays, les États-Unis d'Amérique, où le néo-créationnisme connaît un très fort succès sous le camouflage de l’Intelligent Design le dessein intelligent. Elle met l'accent sur la vision des naturalistes de la fin du XIXe siècle Jean Henri Fabre et George et Elizabeth Peckham face au monde animal.

La garance des teinturiers

Appliquant une méthode que les spécialistes des sciences sociales appellent Verstehen, ils n’ont, d'après elle, vu à travers l'action de l'animal qu’un moyen de justifier et prouver leurs opinions subjectives. Leurs présuppositions naturalistes sont analysées sans complaisance et leurs effets sur la description comportementale des animaux dénoncés clairement. On peut reprocher beaucoup de choses à Fabre, mais pas sa solitude, sa pauvreté, son labeur quotidien et ses épreuves. Vivant dans un département qui subit simultanément trois graves crises agricoles, la disparition de la culture du ver à soie et de la garance, ainsi que la destruction de son vignoble par le phylloxéra, sa vie de chercheur reflète ce marasme économique. De plus, comme l’explique Jean-Marc Drouin, professeur au Muséum national d’histoire naturelle, il est à l’articulation de deux époques : par son refus du darwinisme, il clôt une époque révolue, celle où le dogme de la fixité des espèces pouvait encore se glisser dans les interstices de l’histoire naturelle ; par ses observations de terrain, il participe à la construction d’une approche scientifique des comportements animaux, et contribue à ouvrir une époque nouvelle.
Une période où tout le monde se cherche. Charles Darwin est persuadé que la démonstration de la génération spontanée sera favorable à sa théorie de l’évolution. Quant à Louis Pasteur, il ne se réfère jamais à Lamarck et ne cite qu’une seule fois les travaux de Darwin en 1879. Par ailleurs, tous les grands pastoriens d’alors — Flourens et Milne Edwards en particulier — sont anti-darwiniens.
Déjà, en 1973, un entomologiste comme Lucien Chopard considérait que l’œuvre de Fabre avait été très injustement attaquée : Ce que l’on peut reprocher à Fabre, c’est d’avoir, sous le mauvais prétexte de l’isolement, voulu ignorer systématiquement ce qui avait été fait avant lui. Mais son œuvre reste pleine d’observations exactes, et il semble bien que ce soit lui qui, le premier, a signalé les hypermétamorphoses. Quant à son style, qui lui a bien souvent été reproché, il oblige le naturaliste, qui ne cherche que le fait brutal, à lire quelques pages qui lui paraissent inutiles, mais il a aussi permis à des milliers de lecteurs d’entrer agréablement dans le monde des insectes.
Aujourd’hui plus que jamais, certains ne peuvent pas comprendre l’opposition de Fabre à la théorie de l’évolution, du fait de sa popularité d’auteur naturaliste et de pédagogue des sciences. Tout en regrettant ou pas, le climat religieux qui a entouré la glorification de son œuvre depuis le début du XXe siècle, d’autres lisent encore ses ouvrages avec toujours autant de plaisir en découvrant un merveilleux conteur de la vie des insectes et en lui pardonnant sa mauvaise foi et son parti-pris évidents. C’est à ces interrogations que répond Jean-Marc Drouin : Les Souvenirs entomologiques occupent une place centrale dans les textes de langue française sur les insectes. Tout d’abord parce que, dans ces dix volumes, se croisent une tradition littéraire informée sur la science et une tradition scientifique soucieuse du bien dire. Rétrospectivement, il est significatif que ceci se fasse à propos des insectes, qui, par leur nombre et leur rôle dans les écosystèmes, constituent une pièce maîtresse de la biodiversité. Enfin la popularité des Souvenirs entomologiques oblige à nous interroger sur la fascination — mêlée de répulsion — qu’exerce sur beaucoup de lecteurs le monde des insectes. Peut-être parce que les insectes, à la fois proches et étranges, constituent les plus petits acteurs dans lesquels nous pouvons être tentés de projeter nos rapports sociaux et affectifs, nos tâches et nos peines.
Fabre demeure donc encore, près d'un siècle après sa mort, une référence en matière d'observation du monde des insectes, tant pour le spécialiste que pour l'amateur. On comprend pourquoi en 1911, Edmond Rostand lui consacra une série de huit sonnets : Fabre des insectes. Pourquoi aussi, toujours en France, Henri Diamant-Berger en 1951 a réalisé Monsieur Fabre, qu'un timbre-poste de France à son effigie à la valeur faciale de 12 f. gravé par Robert Cami a été mis en vente le 7 avril 1956 ou encore que le dessinateur Gotlib l'a représenté dans son œuvre, mais c'est au Japon, où de nombreuses publications81 et des expositions lui ont été consacrées qu'il connaît une grande popularité. La visite de l'Harmas de Sérignan semble faire partie de l'itinéraire culturel de certains touristes nippons. En URSS, l'entomologiste Nikolaï Plavilchtchikov a popularisé son œuvre pour des générations de lecteurs.
Le docteur Legros, dans sa première biographie, écrit que sa devise aurait pu être De fimo ad excelsa, du bas vers la perfection. C'est peut-être cette attitude de Fabre, alliant la rigueur de la morale confucianiste, à la souplesse quasi-shintoïste de la conscience des lois de la nature, qui explique l'admiration dont il est l'objet en Extrême-Orient et particulièrement au Japon.
2007 a été l'année du centenaire des Souvenirs entomologiques. Pour célébrer cet anniversaire particulier, la maison d'édition sud-coréenne Hyeonamsa a entrepris la traduction de l'œuvre intégrale de Jean-Henri Fabre ainsi que de la biographie d'Yves Delange.

Thèses et publications scientifiques

Docteur ès-Sciences, ses recherches touchent à l'entomologie, la botanique, la chimie organique, la mycologie et la biologie :
Thèse de Doctorat présentée à la Faculté des Sciences de Paris en 1855 Imprimerie de L. Martinet, Paris, 1855:
Sujet principal en zoologie: Recherche sur l'anatomie des organes reproducteurs et sur le développement des myriapodes ;
Sujet secondaire en botanique : Recherche sur les tubercules de l'Himantoglossum Hircinum.

Botanique

La botanique occupe une place non négligeable dans l'œuvre de Fabre. Son fameux carnet de notes, qui ne le quitte pas, est émaillé de diagrammes de fleurs et d'observations originales, notamment sur les aspects dynamiques des végétaux et leur écologie : il étudie les mouvements des étamines des Opuntia, ceux des vrilles des Cucurbitacées, la germination des Ophrys (orchidées et les parties hypogées souterraines des Vesces.
Observations sur les fleurs et les fruits hypogés de Vicia amphicarpa, Paris 1855, Bulletin de la Société Botanique de France 1;
Sur la nature des vrilles des Cucurbitacées, Paris 1855, Bull. Soc. Bot. France 2;
Recherches sur les tubercules de l'Himantoglossum Hircinum, Paris, L. Martinet,‎
De la germination des Ophrydées et de la nature de leurs tubercules, Paris 1857, Annales des sciences naturelles et de zoologie, 4e série, tome V

Mycologie

Fabre s'intéressa aux champignons dès son plus jeune âge, comme le montrent de nombreuses anecdotes rapportées dans les Souvenirs.

Publications

Les truffes noires du Ventoux dont Fabre étudia la reproduction.
En tant que naturaliste, il publia les travaux suivants :
Sur la phosphorescence de l'agaric de l'olivier; Note de M. Fabre présentée par M. Ad. Brongniart, Comptes rendus des séances de l'Académie des Sciences, juillet-décembre 1855, Tome XLI p. 1245 ;
Recherche sur les causes de la phosphorescence de l'agaric de l'olivier, Annales des sciences naturelles et de zoologie, 4e série, tome IV, Cahier no 3, Paris 1856 ; réédition Imprimerie de L. Martinet ;
Notes sur le mode de reproduction des truffes, Bulletin de la Société d'Agriculture et d'Horticulture de Vaucluse, Avignon séance du 6 avril 1857 ;
Essai sur les Sphériacées du département de Vaucluse, Annales des sciences naturelles, Botanique, 6e série, 9: 66-118 1878 ;
Insectes et champignons, Souvenirs entomologiques, Xe série, chapitre XX 1907;

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Posté le : 09/10/2015 22:38

Edité par Loriane sur 10-10-2015 21:47:20
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Re: Défi de la semaine du 3 au 10 Octobre
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Chère Loréennes et chers Loérens,
Chère Arielleffe,

En rentrant de Paris, dans le tgv, je me suis fait une petit délire et en voici la production.

Je l'ai appelé la "fête vineuse" :

A la très belle fête que je veux donner,
Venez- y nombreux pour vous y abandonner
Laissez vos ennuis dehors, en êtres oublieux.
Ils vous rattraperont bien, étant facétieux.

Je ne sais pas bien ce que l’on y mangera,
Ni même, mon ami(e), ce que tu oublieras.
Mais quoique tu y manges, dis-toi bien au fond
Que rien n’est mieux que l’amitié sous un plafond.

Bon, je vous l’accorde, quelques belles volailles,
Arrosés de vins de Touraine qui vous aillent,
Et tout autant de Bourgogne de grande estime
Sauront faire de vous des êtres magnanimes
Devant votre amitié mise un peu en pagaille.

De ton délire vineux tu feras le deuil
Tu t’installeras prudemment dans un fauteuil,
Pour y cuver les effets de la féérie,
Te détourner des ires de la barbarie
Et retrouver le chemin de la belle entente,
Après t’être livré à beaucoup de descentes.

Et si d’aventure à nouveau le vin te tente
Ne persévère pas à suivre cette pente,
Retourne à la modération, avec piété,
Et dis toi bien sans aucune contrariété :
Boire un très grand vin, c’est boire de l’amitié.

Je demande les circonstances atténuantes. C'est vendredi soir.

Bises et amitiés à toutes et à tous.

Jacques

Posté le : 09/10/2015 22:37
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Aquarelles de champignons

Fabre a consacré sept années de sa vie à l’étude des champignons du mont Ventoux et aux spécimens envoyés par son fils, Émile Fabre. Il réalisa près de 700 planches de format 35×25, qui, de l'avis d'éminents mycologues, montrent une précision scientifique de haut niveau et, sur le plan esthétique, constituent des œuvres d'art non moins remarquables. Ces aquarelles ont été retrouvées dans les greniers de l'Harmas en 1955 par son petit-fils. Elles figurent des espèces communes, mais aussi de nombreuses espèces méditerranéennes rares ou peu connues. Ces planches n'ont pas été publiées du vivant de Fabre, privant la mycologie méditerranéenne d'une contribution qui aurait sans aucun doute fait sensation à l'époque (récemment encore, elles ont suscité l'intérêt d'un grand mycologue comme Roger Heim.
Le grand souci de Fabre avait été de préserver ce trésor pour les générations futures car il craignait de le voir disparaître après sa mort.
Il n'en a heureusement rien été. Un tiers d'entre elles sont exposées au musée de l'Harmas, tandis qu'elles connaissaient une publication progressive : quelques planches en 1957, quarante-neuf en 1978, puis 221 en 1991 dans Champignons de Jean-Henri Fabre, suivie d'une adaptation japonaise en 1992.
C'est d'ailleurs pour sauver cette collection qu'a eu lieu la seule et unique visite de Frédéric Mistral à l'Harmas. Le Prix Nobel de littérature — le poète de Maillane l'avait obtenu en 1904 — se rend à Sérignan au cours du printemps 1908, alerté par le désir qu'a le savant de vendre ses aquarelles sur les champignons. Fabre lui propose de s'en rendre acquéreur pour le Museon Arlaten que le fondateur du Félibrige fonde à Arles grâce à l'argent du prix. Une lettre de Fabre datée du 8 septembre 1908 confirme à Mistral cette proposition mais la réponse lui enlève ses illusions. Le poète, ému par sa détresse financière, lui propose alors une solution. Un riche mécène du nom de Mariani est prêt à lui offrir 10 000 francs or pour ses aquarelles. La transaction ne se fait pas et Mistral écrit alors, dans les colonnes du journal Le Matin, un grand article dans lequel il dénonce la misère qui accable le savant. La mobilisation de tous ses amis et admirateurs qui suivit a permis, grâce à la pugnacité du docteur Legros, la vente, au cours de la seule année 1910, de plus de ses livres qu'en 20 ans. Cela lui accorda assez de revenus afin que, aidé également par les allocations que reçoit le naturaliste, dont les successifs Prix Gegner qui lui sont décernés par l'Académie des Sciences de 1903 à 1909 et de 1911 à 1914, il puisse conserver ses aquarelles.
Malgré la vigilance des conservateurs successifs, plusieurs de ces aquarelles ont disparu de l'Harmas. Certaines réapparaissent, parfois dans des lieux inattendus, comme les 19 qui ont été vendues aux enchères par Christie's, à Londres, le 29 mai 1986.
De nos jours, ces aquarelles de champignons sont reconnues comme des œuvres d'art, et Fabre comme un peintre à part entière. C'est à ce titre qu'il figure dans la dernière édition du plus important dictionnaire consacré aux artistes.

Chimie

La compétence de Fabre en chimie fut confirmée en remportant le premier prix au concours ouvert sur la recherche des altérations frauduleuses de la garance.
Mémoire sur la recherche des corps étrangers introduits frauduleusement dans la garance en poudre et dans ses dérivés, Avignon 1859, Impr. Bonnet fils;
Brevets sur la garancine, colorant extrait de la racine de garance :
Description du perfectionnement apporté par le soussigné au procédé de fabrication de la Garancine ;
Description du procédé par lequel on transforme la fane de Garance en une matière tinctoriale identique à celle de la racine de la même plante ;
Description du procédé propre à réduire la quantité d'acide dans le traitement des Rubiacées tinctoriales;
Nouvel engrais appelé noir de garance, Avignon 1861, Bulletin de la Société d'Agriculture et d'Horticulture de Vaucluse ;
Rapport sur l’alizarine artificielle de M. Roussin, Bulletin de la Société d'Agriculture et d'Horticulture de Vaucluse, août 1861;

Entomologie

Outre les Souvenirs entomologiques, Fabre a publié les études suivantes :
Observation sur les mœurs des Cerceris et sur la cause de la longue conservation des Coléoptères dont ils approvisionnent leurs larves, Annales Sc. Nat. Zoologie, 4e série 1855 ;
Étude sur l'instinct et les métamorphoses des Sphégiens, Annales de Sciences naturelles et de Zoologie, 4e série, tome V 1855 ;
Recherches sur l'anatomie des organes reproducteurs, et sur le développement des myriapodes, Paris, L. Martinet,‎ 1855
Recherches sur les tubercules de l'Himantoglossum hircinum, Impr. L. Martinet Paris, 1855.
Mémoire sur l’hypermétamorphose et les mœurs des Méloïdes, Annales Sc. Nat. Zoologie, 4e série, tome VII 1857 ;
Nouvelles observations sur l’hypermétamorphose et les mœurs des Méloïdes, Annales Sc. Nat. Zoologie, 4e série, tome IX 1858 ;
Étude sur le rôle du tissu adipeux dans la sécrétion urinaire chez les Insectes, Annales Sc. Nat. Zoologie, 4e série, tome XIX 1863 ;
Insectes coléoptères observés aux environs d'Avignon, impr. F. Seguin aîné, Avignon 1870 ;
Étude sur les mœurs et la parthénogenèse des Halictes, Annales Sc. Nat. Zoologie, 6e série, tome IX 1879
Étude sur les mœurs du Phylloxera pendant la période d'août à novembre 1880, Paris 1880 Académie des Sciences, séance du 15 novembre

Souvenirs entomologiques

Œuvre majeure et imposante, avec ses quatre mille pages, publiées en dix séries entre 1879 et 1907, les Souvenirs entomologiques rapportent plus d'un demi-siècle d'études et de descriptions de la vie et des mœurs des insectes, notamment coléoptères et hyménoptères. La rigueur de la méthode scientifique, la recherche sur le terrain et les expérimentations, les réflexions philosophiques, y sont intégrées dans une foule de souvenirs d'enfance, de récits émouvants sur les personnages étranges du monde des insectes, mais aussi les joies de la découverte et les drames de la vie. À la fois, scientifique, poétique et lyrique, l'ensemble constitue un hymne à la nature et à la connaissance .
Souvenirs entomologiques - Ire série 1891 - 1879
Nouveaux souvenirs entomologiques - IIe série 1882
Souvenirs entomologiques - IIIe série 1886
Souvenirs entomologiques - IVe série 1891
Souvenirs entomologiques - Ve série 1897
Souvenirs entomologiques - VIe série 1899
Souvenirs entomologiques - VIIe série 1900
Souvenirs entomologiques - VIIIe série 1903
Souvenirs entomologiques - IXe série 1905
Souvenirs entomologiques - Xe série 1907

Extraits des Souvenirs

La mouche bleue 1907
La vie des insectes 1910
MÅ“urs des insectes 1911
Les merveilles de l'instinct chez les insectes 1913
Le monde merveilleux des insectes 1921
La vie des araignées 1928
La vie des guêpes 1936
Scène de la vie des insectes
Les Nécrophores et le Minotaure Typhée

Les insectes dans les Souvenirs

Liste alphabétique des chapitres des Souvenirs entomologiques consacrés aux insectes : acridiens, ammophiles, araignées, bruches, bembexs, cerceris, chalicodomes, charançons, chenille processionnaire du pin, cigales, cossus, dorthésie characias, épeires, ergates, fourmis rousses, grillons, guêpes, halictes, hannetons, kermès de l’yeuse, ver luisant, lycose de Narbonne, mante religieuse, méloés, minotaure typhée, mouches, onthophages, papillons, pucerons de térébinthe, punaises, sauterelle verte , scarabée sacré, scarabées, scorpions et sphex.

Écrivain pédagogue

Jean-Henri Fabre a fait œuvre de pédagogue en rédigeant de nombreux ouvrages scolaires dans plus de dix matières. Mais c'est surtout en publiant ses Souvenirs entomologiques, totalisant quatre mille pages publiées en dix séries de 1879 à 1907, qu'il a sensibilisé le grand public au monde et à la vie des insectes. Traduits dans quatorze langues et cités dans les manuels scolaires de nombreux pays, notamment au Japon, les Souvenirs entomologiques ont été réédités en 1989 en deux volumes dans la collection Bouquins chez Robert Laffont. Pour l'éditeur, ces souvenirs constituent une œuvre exceptionnelle, à la fois sur les plans littéraire et scientifique.
Parmi les livres scolaires et lectures destinées à la jeunesse, l'on trouve :
Chimie agricole 862
La Terre 1865
Le Ciel, lectures et leçons pour tous 1867, 8e édition, Delagrave, Paris, 1893 126
Histoire de la bûche ; récits sur la vie des plantes 1867, Garnier Frères, Paris
Le livre d’histoires, récits scientifiques de l’oncle Paul à ses neveux. Lectures courantes pour toutes les écoles 1869, Delagrave, Paris
Nouvelle arithmétique, à l’usage de tous les établissements de l’instruction publique, avec 1 800 exercices et problèmes variés et gradués 1870, Delagrave, Paris
Les Ravageurs. Récits sur les insectes nuisibles à l’agriculture 1870, Paris, Delagrave 1939
Algèbre et trigonométrie, à l’usage de tous les établissements d’instruction publique, avec 400 problèmes gradués et variés 1872, Delagrave, Paris
Lectures scientifiques. Zoologie 1872
Lectures scientifiques. Botanique 1873
Les Auxiliaires, récits de l’oncle Paul sur les animaux utiles à l’agriculture 1873, Delagrave, Paris, 1890
Aurore, cents récits sur des sujets variés, lectures courantes à l’usage des écoles, Delagrave, Paris, 1874
Botanique 1874, Delagrave, Paris
L'Industrie, simples récits de l’oncle Paul sur l’origine, l’histoire et la fabrication des principales choses d’un emploi général dans les usages de la vie. Lectures courantes à l’usage de toutes les écoles 1875, Delagrave, Paris. Texte en ligne disponible sur IRIS
Les Serviteurs 1875
La plante leçons à mon fils sur la botanique 1876, Librairie Charles Delagrave, Paris
Notions d'histoire naturelle: physiologie, zoologie, botanique, géologie 1880, Delagrave Paris
Le Ménage, causeries d’Aurore avec ses nièces sur l’économie domestique. Lectures courantes à l’usage des écoles de filles 1889, 2e édition, Delagrave, Paris.
Le Livre des Champs, entretiens de l’oncle Paul avec ses neveux, sur les choses de l’agriculture 1879, Delagrave, Paris
Les Petites filles, premier livre de lecture à l’usage des écoles primaires 1880, Delagrave, Paris
Cours de mécanique 1880, Delagrave, Paris
La Chimie de l’oncle Paul 1881
Notions élémentaires de physique à l’usage de l’enseignement primaire et des classes élémentaires 1881, Delagrave, Paris
Les Inventeurs et leurs inventions, histoire élémentaire des principales découvertes dans l’ordre des sciences physiques 1881, Delagrave, Paris
Lectures sur la Botanique 1881, Delagrave, Paris
Lectures sur la Zoologie 1882, Delagrave, Paris
Éléments usuels des sciences physiques et naturelles à l'usage des écoles primaires, conformément au programme du 27 juillet 1882, Delagrave, Paris, 1883-1884
Zoologie 1884
Histoire naturelle, ouvrage conforme aux programmes officiels pour l’enseignement secondaire classique et spécial, les écoles normales primaires, les baccalauréats ès lettres et ès sciences 1889, Delagrave, Paris
Maître Paul, simples récits sur la science. Lectures courantes pour les écoles normales primaires 1889, Delagrave, Paris
La plante : leçons à mon fils sur la botanique 1892 4e édition -
Petite encyclopédie des sciences 6 volumes, Delagrave 1891-1892
Animaux, végétaux et terrains. 30 tableaux muraux imprimés en couleurs. Notices explicatives et descriptives, Delagrave, Paris 1901
Arithmétique agricole théorique et pratiques à l’usage des écoles primaires, avec 600 exercices ou problèmes relatifs à l’agriculture, Delagrave, Paris, 1901
La Science de l'oncle Paul. Entretiens familiers sur les animaux, les plantes, les minéraux, le ciel, la terre, l'industrie 1926, Delagrave ; Paris
Réédition 2002. Fabre, Jean-Henri-Casimir. Récits sur les insectes Les animaux et les choses de l'agriculture, les Ravageurs, les Auxiliaires, les Serviteurs, le Livre des champs, la Chimie agricole, Éditions Actes Sud Thésaurus 1024

Honneurs et distinctions

Membre d'honneur de la Société d'Entomologie Belge 1892
Membre de la « Société Entomologique » de Russie, France, Londres et Stockholm 1902
Membre de l'Académie royale des sciences de Suède, récipiendaire de la médaille d'or Linné en 1910
Membre de l'Institut de Genève en 1910, qui lui décerne un diplôme.
Chevalier de l'Ordre de la Légion d'honneur en 1867
Officier de l'Ordre de la Légion d'honneur en 1910
Majoral du Félibrige Cigalo de Carcassouno, o de l'Amourié en 1909
Médaille d'argent de la Société protectrice des animaux en 1873
Médaille d'argent de l'Exposition universelle de 1878
Médaille Mariani en 1911 et hommage de la Société nationale d'Agriculture et de la Société d'acclimatation
Prix Montyon en 1856, de l'Académie française
Prix Thore en 1866, de l'Académie française
Prix Dolfus décerné en 1887 par la Société entomologique de France
Prix Petit-Dormoy en 1889, attribué par l'Académie des sciences
Chaque année, de 1903 à 1914, il obtient le prix Gegner de l'Académie des sciences140
Prix Alfred-Née de l'Académie française en 1910
Proposé, en 1904, pour le prix Nobel de littérature
Plusieurs odonymes rappellent son nom, notamment :
à Paris : Rue Jean-Henri-Fabre, dans le XVIIIe arrondissement.
à Carpentras Vaucluse : une cité scolaire porte son nom.


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Posté le : 09/10/2015 22:35
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Re: Défi de la semaine du 3 au 10 Octobre
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Chère Arielleffe,

Je répondrai bien volontiers à ton invitation lors de ma prochaine venue à l'hôpital privé de l'Estuaire.
Je te promets. Je te ferai signe avant que d'y aller.

Je serai vraiment très heureux de te connaître. Et j'aimerais tant rencontrer quelques autres parmi les Loérennes et les Loréens. Une très belle famille!

Amitiés de Dijon.

Jacques

Posté le : 09/10/2015 22:33
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François Mauriac
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Le 11 octobre 1885 à Bordeaux naît François Mauriac

écrivain français, mort le 1er septembre 1970 à Paris, à 84 ans. Lauréat du Grand prix du roman de l'Académie française en 1926, il est élu membre de l'Académie française au fauteuil no 22 en 1933. Il reçoit le prix Nobel de littérature. Romancier, dramaturge, critique, journaliste, poète. Il reçoit pour distinctions le grand prix du roman de l'Académie française 1926, le prix Nobel de littérature 1952. Ses Œuvres principales sont : Le Baiser au lépreux 1922, Le Désert de l'amour 1925, Thérèse Desqueyroux 1927, Le Nœud de vipères 1932, Mémoires intérieurs 1959. En 1952, le prix Nobel de littérature est non seulement une consécration, mais le point de départ d'une nouvelle carrière : Mauriac se voue désormais presque entièrement à une œuvre journalistique, souvent polémique et politique. Déjà, avant guerre, il avait écrit dans l'Écho de Paris, Sept et Temps présent. En 1953, la crise marocaine puis l'engagement aux côtés du général de Gaulle marquent le Bloc-notes 1958 et le Nouveau Bloc-Notes 1961 – qui reprennent des articles écrits entre 1950 et 1960 dans le Figaro et dans l'Express. Mauriac y soutient Mendès France, puis de Gaulle et la politique de décolonisation. Redoutable polémiste, il pourfend les médiocres de la vie politique.
Vers un catholicisme social

En bref

Mauriac est sans conteste l'un des plus importants romanciers français du XXe siècle. Son domaine est limité. Le décor, les personnages, les thèmes, les procédés rétrospection, monologue intérieur varient peu d'un livre à l'autre. Il est essentiellement le peintre de la province française, des combats entre la chair et l'esprit, entre la sensualité de tout jeunes hommes, ou de femmes mûres et insatisfaites, et l'attrait de la religion pour les cœurs inquiets et blessés. Il s'est posé dans divers ouvrages de critique et dans son Journal bien des problèmes qui tourmentent le romancier catholique, soucieux de ne rien dissimuler de la vérité et des séductions du péché. Ses livres sont remarquables par la création d'une atmosphère fiévreuse, par leur tension tragique et surtout par leur poésie.
Poète, il le demeura dans l'écrit politique qui, après 1945, devint progressivement sa préoccupation majeure et l'expression d'un engagement que la mort seule arrêta. Il possédait le don de capter l'événement pour le transposer de l'éphémère évanescent, qui est son milieu propre, dans l'éternel et situer le relatif dans le sillage de l'absolu. Il restitue l'actualité intégrée dans la durée du poème sous la double optique de la tendresse de l'homme et de l'espérance de Dieu, et l''adieu à l'adolescence
Né à Bordeaux, François Mauriac est resté attaché à cette ville, dont il a dépeint la bourgeoisie sans indulgence. La plupart de ses romans sont placés dans ce décor de province, étroit, oppressant, parmi des gens soupçonneux et férocement attachés à leurs possessions et à leurs traditions. Pour Mauriac comme pour Balzac, il n'y a qu'en province que l'on sache bien haïr, et peut-être aussi aimer. Il a d'ailleurs grossi, par l'imagination ou le souvenir, et les passions de ses personnages, et les angoisses de malheureuses femmes de la province négligées par leurs maris, et la sensualité qui se dégage des étés brûlants, des pins des Landes assoiffées, des tilleuls et des lilas odoriférants des jardins solitaires. Mais ses meilleurs romans doivent une partie de leur force de suggestion à ces vignettes poétiques par lesquelles la nature sans cesse influe sur les personnages.
Sa sensibilité très vive fut accrue par la perte de son père, mort comme celui de Gide avant qu'il eût atteint sa dixième année. La mère, laissée veuve avec cinq enfants le futur romancier était le dernier, dut les élever avec quelque sévérité ; elle était fort pieuse, et le tableau que le romancier a souvent tracé de son enfance est austère. Il a parlé de son éducation janséniste, sans qu'il ait aimé beaucoup le jansénisme plus tard. Il en connut surtout les Pensées de Pascal, mais y regretta un abus de rationalisme dans les choses de la foi. Il fut élevé d'abord par les Frères maristes, puis au lycée. Se sentant, en raison de sa sensibilité, qui le rendait très vulnérable, mal armé pour la vie active, il songeait surtout à étudier le passé il prépara à Paris l'École des chartes et à s'exprimer par la plume.
À Paris, il découvrit avec exaltation la liberté de la vie de l'esprit, mais aussi combien était grande, comme elle le sera chez ses personnages, la nostalgie de la petite patrie familiale et provinciale abandonnée. Chaque écrivain venu de sa province à Paris est une Emma Bovary évadée, s'écria-t-il. Il a, après sa cinquantième année, prodigué les confidences sur sa jeunesse, dans Commencements d'une vie 1932, Mémoires intérieurs 1959 et 1965, Le Jeune Homme 1926, La Province 1926, Bordeaux 1926. Mais c'est dans ses romans qu'avec la liberté procurée par la fiction, plus vraie que le vrai, il s'est le mieux révélé. Longtemps, l'adolescent gauche, rêveur, tourmenté à la fois par le besoin d'idéaliser l'amour et de le souiller, rebelle aux contraintes familiales et se croyant incompris, va réapparaître dans les romans de Mauriac.
Il écrivit d'abord des vers, tendres mais fiévreux, que quelques aînés, dont Barrès, remarquèrent : il est revenu à la poésie en vers, influencée par Maurice de Guérin, dans Le Sang d'Atys 1940. Mais pas plus que Chateaubriand ou Gide, il n'est devenu un maître de la forme poétique. Ses premiers romans, deux écrits juste avant la guerre de 1914, à laquelle il prit part, le troisième et le meilleur, au titre significatif, La Chair et le sang, en 1920, sont encore gauches, tendus, trop inclinés vers le lyrisme.

Sa vie

François Mauriac naît le 11 octobre 1885 dans la maison familiale du 86, rue du Pas-Saint-Georges à Bordeaux1, fils de Jean-Paul Mauriac 1850-1887, marchand de bois merrains et propriétaire terrien dans les Landes de Gascogne, et Claire Mauriac née Coiffard, héritière d'une famille du négoce bordelais.
Dernier d'une fratrie composée d'une sœur aînée Germaine 1878-1974 et de trois frères Raymond 1880-1960, Jean 1881-1945 et Pierre 1882-1963, François Mauriac est orphelin de père à vingt mois, après la mort subite de celui-ci à la suite d'un abcès au cerveau le 11 juin 1887. Il vit toute son enfance très entourée par une mère très pratiquante, dont il est le fils préféré et celui qui gère toutes les affaires familiales, par sa grand-mère Irma Coiffard née Abribat et sous le tutorat de son oncle Louis Mauriac, magistrat seul frère cadet de son père.
François Mauriac fait à partir de 1892, ses études primaires puis secondaires chez les Marianistes de l'institution Sainte-Marie Grand-Lebrun à Caudéran, où il fera la rencontre d'un ami d'une vie, André Lacaze.
Outre les divers logements que la famille occupera à Bordeaux, son adolescence est marquée par plusieurs lieux girondins qui tous, marqueront profondément son œuvre : Gradignan où sa grand-mère Irma possède le Château-Lange, les Landes de Gascogne autour de Langon, Verdelais et surtout l'été à Saint-Symphorien, tous ces bourgs dominés par la bourgeoisie viticole ou ayant fait fortune dans l'exploitation forestière, aux climats lourds de secrets étouffés qu'il peindra dans la plupart de ses romans.
Après avoir écrit, dans son enfance, de petits textes et poèmes, il compose à treize ans sa première réelle œuvre, un mélodrame de jeunesse intitulé Va-t'en, dédié à sa sœur Germaine.
En 1902, la mort de sa grand-mère Irma est un profond choc pour l'adolescent qu'il est, constatant la profonde hypocrisie de sa famille religieuse et bourgeoise qui se partage déjà l'héritage à côté de l'agonisante.
François Mauriac rate la seconde partie du baccalauréat de philosophie et doit redoubler, préférant refaire une année au lycée public de Bordeaux9. Dans cet établissement il a notamment pour professeur, Marcel Drouin, beau-frère d'André Gide, qui lui fait découvrir les textes de Paul Claudel, Francis Jammes, Henri de Régnier, Arthur Rimbaud, Charles Baudelaire, Colette et Gide (notamment L'Immoraliste et Les Nourritures terrestres qui le marqueront, tous proscrits dans sa famille et chez les pères, finissant ainsi de constituer son corpus littéraire personnel. Il découvre également à cette époque les textes et idées de Maurice Barrès qui marqueront sa jeunesse.
Après son baccalauréat obtenu en juillet 1904, il étudie la littérature à la faculté de Bordeaux, sous la direction de Fortunat Strowski. Il a alors pour condisciple Jean de la Ville de Mirmont et se lie d'amitié avec André Lafon.
À cette époque, il habite toujours avec l'ensemble de sa famille, dans divers appartements et immeubles de Bordeaux, dont le 15 rue Rolland de 1903 à 1907 et fréquente à partir de 1905 les cercles bordelais du Sillon de Marc Sangnier, mouvement catholique ouvriériste, dont il se sent proche mais qui le laisse insatisfait; et dont il s'écarte définitivement en juin 1907.
Ces milieux catholiques étaient proches du modernisme, tendance d'exégètes et de philosophes qui mettaient en cause l'identité historique du Christ, voire la foi chrétienne. Dans la préface à sa Vie de Jésus, Mauriac avoue qu'il fut durablement troublé par le modernisme, avant de se rendre compte de l'a priori contre le surnaturel de ce courant de pensée.
Si, dans le cas du Sillon, la rupture n'empêcha point que Mauriac ne prenne des attitudes politiques ce qui, pour lui, en prolongeaient l'esprit avec le modernisme; en revanche, la rupture fut complète et sans compromis, au point que la préface à la deuxième édition de la Vie de Jésus prenne violemment à partie la principale figure du modernisme Alfred Loisy.
Sa famille l'envoie avec une rente annuelle de 10 000 francs13 à Paris, où il s'installe le 16 septembre 1907 — tout d'abord dans une pension étudiante de frères maristes au no 104 de la rue de Vaugirard où il réside un an avant d'être exclu, puis quelques mois dans l'hôtel l'Espérance voisin, et enfin seul en 1909 au cinquième étage du no 45 de la rue Vaneau — pour préparer l'École des chartes qu'il intègre mais finit très rapidement par abandonner pour se consacrer entièrement à l'écriture en publiant des poèmes, à son compte, dans la Revue du temps présent.

Une vocation tardive d'écrivain

Son premier volume de poèmes, Les Mains jointes, est publié en 1909. Bien que retenant l'attention des milieux littéraires et notamment, depuis 1910, de Maurice Barrès, auquel il voue un véritable culte, Mauriac ne sera connu du grand public qu'une dizaine d'années plus tard. En 1913, il épouse Jeanne Lafon (893-1983, rencontrée chez leur amie commune Jeanne Alleman, auteur qui publie sous le pseudonyme masculin de Jean Balde, et elle lui donne un premier fils, Claude, en 1914, année de la publication de La Robe prétexte. Ses autres enfants, Claire, Luce, et Jean naîtront respectivement en 1917, 1919 et 1924
Sa carrière littéraire est interrompue par la Première Guerre mondiale, durant laquelle il s'engage un temps, bien que réformé et de santé précaire, dans un hôpital de la Croix-Rouge à Salonique. Après la victoire de 1918, il reprend ses activités et publie, en 1921, Préséances, qui le brouille pour longtemps avec la bonne société bordelaise, puis, en 1922, Le Baiser au lépreux.

Succès littéraire

Dans une vie d'abord marquée par les mondanités littéraires jeune, il fréquente les salons, notamment celui de Natalie Clifford Barney et surtout celui de la comtesse Anna de Noailles, puis par des engagements politiques guidés notamment par un idéal chrétien socialisant il suit un temps le Sillon de Marc Sangnier et s'oppose à l'Action française, Mauriac est avant tout occupé par la composition d'une œuvre romanesque, où il se révèle un remarquable analyste des passions de l'âme et un virulent pourfendeur de la bourgeoisie provinciale Genitrix, Le Désert de l'amour, Thérèse Desqueyroux, Le Nœud de vipères, Le Mystère Frontenac. La plupart de ses romans évoquent, avec une certaine intensité tragique, le conflit entre la foi et la chair et développent plusieurs images récurrentes comme le fameux désert spirituel que les personnages doivent traverser.
La qualité de ses romans et de sa poésie lui vaut d'être triomphalement élu à l'Académie française le 1er juin 1933 au premier tour contre Edmond Sée par 28 voix et 3 bulletins blancs sur 31 votants. Le 16 novembre 1933, lors de sa réception, il doit néanmoins endurer le discours peu flatteur d'André Chaumeix.

Le désert de l'amour

En 1922 et 1923, coup sur coup, parurent deux courts romans, condensés, linéaires, creusant l'analyse vivante de quelques âmes tourmentées et implacables dans leur peinture de la laideur morale et de l'égoïsme des familles : Le Baiser au lépreux (1922) et Génitrix (1923). Dans le premier, Jean Péloueyre, provincial riche, mais laid, affreusement timide, épouse, sur les conseils du curé et parce que sa richesse fait de lui « un bon parti », une fille robuste et simple, Noémi. Il sait vite qu'elle ne donne, à ce « lépreux » qu'il croit être, ses baisers que par devoir ou par pitié. En vain médite-t-il les écrits de Nietzsche pour apprendre à devenir un fort avec volonté de puissance. Il analyse incessamment sa faiblesse et meurt, se disant presque que sa jeune épouse sera enfin soulagée et libre. Génitrix trace l'image d'une mère, veuve, dominatrice, qui veut maintenir son fils unique en dehors du mariage, pour le conserver tout à elle, entouré de soins qui l'emprisonnent. Il se marie cependant. Et sa femme, malade, est en train de mourir, abandonnée, dans une chambre isolée de la maison, détestée par la belle-mère, car elle est l'intruse. Une fois disparue cependant, elle sera regrettée du fils bourrelé de remords, intérieurement révolté contre cet égoïsme paysan de sa mère qu'il sait porter aussi en lui.
D'autres œuvres bien connues allaient suivre : Le Désert de l'amour en 1925, peut-être la meilleure réussite technique de Mauriac. Il y use, comme il l'a souvent fait, de la technique de la rétrospection. Un incident rappelle soudain à Raymond Courrèges, habitué des boîtes de nuit à Paris, son passé d'adolescent bordelais, sa solitude au sein de sa famille où il se croyait incompris et, par timidité, ne savait se faire comprendre. Maladroitement et brutalement, il avait alors essayé de violer une femme de réputation douteuse, Maria Cross, que son père, médecin naïf et bon, idéalisait. Elle l'avait repoussé et vexé dans sa jeune fierté. Tout ce passé et la figure pathétique de son père revivent dans ce long récit. Mauriac, grand admirateur de Proust bien qu'il reproche à son œuvre d'avoir laissé béant le trou immense que devrait remplir Dieu, était passé maître dans l'art de remémorer le passé et de l'enchâsser dans le présent.
Deux autres romans de sa quarantaine sont de grandes œuvres : Thérèse Desqueyroux (1927) et Le Nœud de vipères (1932). Le premier, utilisant avec plus de virtuosité encore la technique de la rétrospection, est le dramatique monologue d'une épouse plus fine et plus intelligente que son mari, propriétaire campagnard plein de suffisance ; elle se laisse entraîner à tenter de l'empoisonner, est jugée et, par égard aux convenances familiales, acquittée. Mise au ban de la famille, contrainte d'abandonner sa petite fille, elle ne se repent point, mais va habiter seule à Paris. Elle y vit en névrosée malheureuse ; dans une nouvelle, « Thérèse chez le docteur », et un autre roman, La Fin de la nuit (1935), Mauriac est revenu à ce personnage maladif et attachant, l'un des rares protagonistes de ses romans qu'il s'est résigné à ne pas convertir in extremis. Le Nœud de vipères est celui d'une famille avare et haineuse, et plus encore le réseau de méchanceté, de dépit, d'endurcissement dans l'égoïsme et la poursuite des biens matériels d'un riche avocat, Louis. Il se meurt d'angine de poitrine, note dans un journal atroce de vérité le progrès de sa haine envers sa femme, ses enfants, la religion hypocrite et lui-même. Mais son « effrayante lucidité » ainsi que la quête d'un amour vrai ouvrent une voie à la grâce qui le mène à la conversion.

Controverses

Sept ou huit autres romans de Mauriac, tous reprenant un décor, une intrigue, un leitmotiv analogues, n'atteignent que par moments à la beauté de ces réussites. La Pharisienne 1941, atroce peinture d'une dévote rigide et privée de charité, que l'on prendrait pour une attaque contre la religion si Mauriac n'avait tant proclamé sa foi catholique, a quelques parties saisissantes. Sartre a, dans un célèbre article, pris à partie, non sans injustice, La Fin de la nuit, pour reprocher à l'auteur de priver ses personnages de toute liberté. Il est vrai que Mauriac a toujours été confronté au dilemme du romancier catholique : éviter le doucereux et la prédication des romanciers dits bien-pensants, peindre le mal et le vice dans leur noire vérité, ne pas fausser la vie, mais par là même risquer de rendre la chair, la passion et le mal pleins d'attraits pour le lecteur peu averti. Aussi l'orthodoxie de Mauriac a-t-elle été mise en doute par bien des catholiques, qu'il a effarouchés, même après qu'il eut été élu à l'Académie française 1933, décoré par les gouvernements successifs du pays, consacré par le prix Nobel 1952 et qu'il eut prodigué depuis 1945 ses éloges éperdus au général de Gaulle. Néanmoins, avec Bernanos et, par moments seulement, Julien Green, Mauriac représente, dans le roman de ce siècle, le sommet de la littérature catholique, hardie et jeune.
Un autre reproche a été adressé à Mauriac, dont il n'a eu nulle peine à se justifier : celui de monotonie. Car non seulement le décor, mais les thèmes, les personnages, la technique ne varient guère d'un roman à l'autre, pas plus qu'ils ne le font chez l'auteur qu'il met au-dessus de tout autre, Racine. Mauriac s'est expliqué sur son art dans divers écrits sur le roman, dans son Journal, dans ses Mémoires et dans de nombreux articles de journal et de revue : depuis 1951, sa veine de romancier s'étant tarie, le théâtre ne lui ayant qu'à demi réussi, il est devenu un journaliste et un moraliste, parfois bavard. Il a du moins réfléchi assidûment sur son art : il n'a pas caché que son premier souci avait été de rester fidèle à son monde intérieur, de dépeindre le monde qu'il connaissait le mieux et les obsessions ou souvenirs qui l'habitaient, et, acceptant ses limites, de renouveler son mode d'expression, mais non ses sujets.
Il est le plus grand en effet dans sa peinture des Mal-Aimés (c'est le titre d'une de ses pièces, 1945) et de l'amour où la chair lutte contre l'esprit, mais aussi où l'esprit, selon une formule de saint Paul, convoite contre la chair. L'amour, même quand il devrait être ennobli par le sacrement du mariage et par la progéniture, est présenté par le romancier sous un jour lugubrement féroce : femmes solitaires en vain amoureuses de jeunes hommes égoïstes, adolescents traînant dans la boue l'objet de leurs désirs, hommes mûrs endurant les tortures de la jalousie, démons de midi et du soir et démons plus avides encore de l'adolescence, « cherchant qui dévorer ». Cette insuffisance de l'amour humain préserve les personnages de Mauriac de la satisfaction dite bourgeoise : le sentiment de l'incomplet de leur existence leur fait enfin désirer le seul vrai amour, celui de Dieu.

La vertu d'engagement

« De sorte que bien loin qu'ils aient le droit de fuir les hommes en Dieu, il leur est enjoint de retrouver Dieu dans les hommes. Qu'ils le cherchent d'abord et qu'ils le trouvent dans ceux qui souffrent persécution pour la justice, chrétiens ou païens, communistes ou juifs, car de ceux-ci, la ressemblance avec le Christ est en raison directe des outrages qu'ils endurent : le crachat sur la face authentifie cette ressemblance. » Ce texte du Cahier noir – manifeste clandestin paru sous l'occupation allemande – détient la clé d'une bonne part de l'aventure mauriacienne : l'inflexion progressive du grand bourgeois vers la gauche comme celle de l'écrivain d'imagination vers le journalisme politique, jusqu'au pamphlet. La révolution espagnole de 1936 en fut le point de départ ; la guerre de 1940 détermina Mauriac à l'engagement qui prit de plus en plus le meilleur de son talent. D'abord dans son Journal, ensuite au fil du « Bloc-Notes » qui passa de l'Express au Figaro littéraire, il assuma les soucis majeurs de la France et du monde et y prit résolument parti avec autant de courage que de générosité.
Polémiste redouté, il ne s'est pas montré indulgent pour les jeunes romanciers dont les tentatives allaient à l'encontre de sa technique, paraissaient renoncer à toute action nouée, à toute exploration d'un caractère, à toute poésie dans l'art romanesque. Il n'était pas tendre non plus pour les politiciens de gauche, et moins encore pour ceux de droite, qui lui semblaient incapables de reconnaître, ou de proclamer, que la France recherchait une grandeur morale et l'avait trouvée en de Gaulle. Mais, si ses mots à l'emporte-pièce et ses jugements critiques ne manquaient pas de venin, ils savaient aussi faire place à la bonté et à la compassion.
Si Mauriac a ainsi dépeint un enfer plutôt qu'une antichambre du Paradis, il exerce, moins par la noirceur de ses sujets que par la nostalgie de pureté et de poésie qui est partout en son œuvre, une fascination sur ses lecteurs. Il a souvent répété que le roman de son époque – et il pensait sans doute au sien – ne se sauvait de la médiocrité que par la poésie qu'il exprimait. Cette poésie éclate dans le cadre d'une technique sobre et classique, et donne à la prose de Mauriac une vibration et une richesse qui le mettent, avec Malraux et Bernanos, aussitôt après Proust parmi les romanciers modernes de la France.
Au cours de sa vieillesse combative, courageusement acceptée, il sut retrouver également son inspiration romanesque d'antan. Son ultime roman, Un adolescent d'autrefois, publié en 1969, ne renouvelle ni le cadre ni les thèmes de son œuvre antérieure. Mais il est frémissant encore de vie et il constitue comme le testament d'un romancier qui, à plus de quatre-vingts ans, comprenait encore la passion, les remords et les conflits entre la chair et les aspirations de l'âme. Henri Peyre

Un écrivain engagé

Tout en poursuivant son œuvre littéraire La Fin de la nuit, première suite de Thérèse Desqueyroux, Les Anges noirs, il prend part à de nouveaux combats politiques, notamment au moment de la guerre d'Espagne, d'abord en faveur des Nationalistes avant de se ranger, dès le drame de Guernica connu, avec les chrétiens de gauche qui s'expriment dans les revues Esprit ou Sept, aux côtés des Républicains espagnols cf. ses articles dans Le Figaro et Temps présent. Cet engagement provoquera une première rupture avec sa famille politique. Robert Brasillach lui dédicacera son ouvrage sur la guerre d'Espagne : à F.M. égaré.
Sous l'Occupation, après quelques hésitations devant la Révolution nationale lancée par le maréchal Pétain, il publie en 1941 La Pharisienne, qui peut se lire en creux comme une critique du régime de Vichy et qui lui vaut d'être désigné comme agent de désagrégation de la conscience française par les thuriféraires de l'Ordre nouveau. Au sein de l'académie française, il fait partie avec Georges Duhamel qui devient secrétaire perpétuel provisoire en 1942, Louis Gillet et Paul Valéry du petit groupe tenant tête à la fraction pétainiste de l'institution17,18. Il adhère au Front national des écrivains et participe à l'œuvre de Résistance à travers la presse clandestine, Les Lettres françaises notamment. Il fait paraître en 1943, aux Éditions de Minuit, sous le pseudonyme de Forez, Le Cahier noir, qui est diffusé sous le manteau.
Au moment de l'épuration, il intervient en faveur de l'écrivain Henri Béraud, accusé de collaboration. Il signe la pétition des écrivains en faveur de la grâce de Robert Brasillach, qui est condamné à mort et qui sera malgré cela exécuté. Cet engagement lui vaut le surnom de « Saint-François-des-Assises »19. Il rompt peu après avec le Comité national des écrivains en raison de l'orientation communiste du comité et participe à la revue des Cahiers de La Table ronde, où de jeunes écrivains de droite, qu'on appellera plus tard les Hussards, feront leurs débuts. Entre 1946 et 1953, éditorialiste au Figaro, F. Mauriac s'illustre par la virulence de son anticommunisme dans le contexte de la Guerre froide. À la Libération, il fait l'objet de violentes attaques dans la revue d'extrême droite Écrits de Paris de la part de Jean Maze sous le pseudonyme Orion qui a cité F. Mauriac dans son Nouveau Dictionnaire des Girouettes, Écrits de Paris no 68, juin 1950, page 100.
Ferhat Abbas déclare, dans ses révélations sur la guerre d'Algérie, s'être réjoui de la visite dans le pays d'hommes politiques ou d'intellectuels, tels que Mauriac, qui ont défendu la vérité selon laquelle avant l'indépendance il y avait en Algérie 10 millions de musulmans qui n'étaient pas français.

Le prix Nobel

En 1952, l'année où paraît son roman Galigaï, François Mauriac reçoit le Prix Nobel de littérature pour la profonde imprégnation spirituelle et l'intensité artistique avec laquelle ses romans ont pénétré le drame de la vie humaine. Polémiste vigoureux, d'abord absent du débat sur la guerre d'Indochine Vercors lui reprochera son silence), il prend ensuite position en faveur de l'indépendance du Maroc et de la Tunisie, puis de l'Algérie, et condamne l'usage de la torture par l'armée française L'Imitation des bourreaux de Jésus-Christ. Il préside aussi le Comité de soutien aux chrétiens d'URSS.
Il s'exprime notamment dans son fameux Bloc-notes, qui paraît d'abord dans la revue de La Table ronde, ensuite dans Le Figaro, puis dès 1955 dans L'Express, que viennent de créer Françoise Giroud et Jean-Jacques Servan-Schreiber, avant de reparaître à partir de 1961 et jusqu'à la fin dans Le Figaro.
Il soutient un temps Pierre Mendès France sous la IVe République, mais le putsch des généraux à Alger précipite son ralliement sans faille au général de Gaulle sous la Ve République. Au cours des années 1960, il donne une suite à ses Mémoires intérieurs 1959, avec les Nouveaux mémoires intérieurs 1965, et publie ses Mémoires politiques 1967, ainsi qu'une hagiographie du général, De Gaulle 1964, auquel il demeurera fidèle jusqu'au bout.
Son dernier roman, Un adolescent d'autrefois reçoit un accueil enthousiaste de la critique en 1969. Une suite, Maltaverne, demeure inachevée et sera publiée de manière posthume en 1972.
François Mauriac meurt à Paris le 1er septembre 1970 et est enterré au cimetière de Vémars Val-d'Oise. Ses œuvres complètes ont été publiées en douze volumes entre 1950 et 1956. Une édition complète de ses œuvres romanesques et théâtrales a été éditée dans la collection de la Bibliothèque de la Pléiade, en quatre volumes, parus entre 1978 et 1985 ; elle est suivie en 1990 d'une édition de ses œuvres autobiographiques.
Claude Mauriac et Jean Mauriac, ses fils, et Anne Wiazemsky, sa petite-fille, sont aussi écrivains. Luce Mauriac, sa fille, a publié un roman en 2008.
Le domaine de Malagar, à Saint-Maixant, qui fut le lieu de la fin de l'adolescence et que l'écrivain reçut en 1927 à la suite d'un partage familial, est aujourd'hui propriété du Conseil régional d'Aquitaine. Cette maison d'écrivain, transformée en centre culturel, est désormais ouverte à la visite.

Révélations sur l'homosexualité de Mauriac:

Lettre ouverte à Monsieur François Mauriac, membre de l'Académie française, prix Nobel.
S'appuyant sur des sources écrites, l'ouvrage biographique de Jean-Luc Barré s'attache au fait que François Mauriac aurait notamment brûlé de passion — dont la nature exacte n'est pas précisée — pour un jeune écrivain, diplomate suisse, Bernard Barbey. L'information selon laquelle Mauriac aurait vécu des passions
probablement platoniques pour des jeunes gens avait été donnée dans une interview de Daniel Guérin publiée dans le livre de Gilles Barbedette et Michel Carassou, Paris gay 1925 publié aux Presses de la Renaissance. Daniel Guérin est venu confirmer cette information, vérifiable dans la correspondance qu'il a reçue de Mauriac, conservée à la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine, en contradiction avec la volonté de l'écrivain de la récupérer et de la détruire.

Å’uvre

Romans, nouvelles, récits


1913 : L'Enfant chargé de chaînes
1914 : La Robe prétexte
1920 : La Chair et le Sang
1921 : Préséances
1921 : Dialogue d'un soir d'hiver nouvelle
1922 : Le Baiser au lépreux
1923 : Le Fleuve de feu
1923 : Genitrix
1924 : Le Mal
1925 : Le Désert de l'amour Grand prix du roman de l'Académie française, 1926
1927 : Thérèse Desqueyroux
1928 : Destins
1929 : Trois récits : Coups de couteau, 1926 ; Un homme de lettres, 1926 ; Le Démon de la connaissance, 1928
1930 : Ce qui était perdu
1932 : Le Nœud de vipères
1933 : Le Drôle conte pour enfant
1933 : Le Mystère Frontenac
1935 : La Fin de la nuit
1936 : Les Anges noirs
1938 : Plongées comprenant Thérèse chez le docteur, 1933 ; Thérèse à l'hôtel, 1933 ; Le Rang ; Insomnie ; Conte de Noël
1939 : Les Chemins de la mer
1941 : La Pharisienne
1951 : Le Sagouin
1952 : Galigaï
1954 : L'Agneau
1969 : Un adolescent d'autrefois
1972 : Maltaverne posthume

Théâtre

1938 : Asmodée
1945 : Les Mal-aimés
1947 : Passage du malin
1950 : Le Feu sur la terre

Poèsie.

1909 : Les Mains jointes
1911 : L'Adieu à l'adolescence
1918 : Le Disparu
1925 : Orages
1940 : Le Sang d'Atys

Essais, recueils d'articles

1919 : De quelques cœurs inquiets Société littéraire de France
1926 : La Province Hachette ; réédition Arléa, 1988
1928 : Le Roman L'artisan du livre
1928 : La Vie de Jean Racine rééd. Paris, Perrin, 1999
1929 : Dieu et Mammon
1930 : Trois Grand Hommes devant Dieu, éd. du Capitole
1931 : Le Jeudi-Saint
1931 : Blaise Pascal et sa sœur Jacqueline
1931 : Souffrances et bonheur du chrétien
1933 : Le Romancier et ses personnages
1936 : La Vie de Jésus rééd. Seuil, 1999
1945 : La Rencontre avec Barrès rééd. La Table ronde, 1994
1947 : Du côté de chez Proust, La Table ronde, 1947
1958 - 1971 : Bloc-notes, Seuil, 5 vol.
1958 : Le Fils de l'homme
1981 : Souvenirs retrouvés - Entretiens avec Jean Amrouche, éd. Fayard/INA
1996 : Mozart et autres écrits sur la musique, éd. Encre marine
2000 : La Paix des cimes : chroniques, 1948-1955, éd. Bartillat
2004 : D'un Bloc-notes à l'autre : 1952-1969, éd. Bartillat
2008 : Téléchroniques, 1959-1964, éd. Bartillat

Mémoires

1943 : Le Cahier noir
Publié sous le nom de Forez, qui était son pseudonyme, en clandestinité, par les éditions de Minuit
1948 : Journal d'un homme de trente ans extraits Editions Egloff
1959 : Mémoires intérieurs
1962 : Ce que je crois
1964 : Nouveaux mémoires intérieurs
1967 : Mémoires politiques

Autobiographie et correspondance

1925 : Bordeaux, version première des Commencements d'une vie L'Esprit du Temps, 2009
1932 : Commencements d'une vie
1953 : Écrits intimes
1981 : Lettres d'une vie, 1904-1969
1989 : Nouvelles lettres d'une vie, 1906-1970

Scénario

1955 : Le Pain vivant scénario et dialogue du film Le Pain vivant sorti en 1955

Œuvres complètes

Œuvres romanesques et théâtrales complètes, dirigées par Jacques Petit, éd. Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1978-1985, 4 vol.
Œuvres autobiographiques complètes, dirigées par François Durand, éd. Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1990.

Préfaces

1948 : La Puissance et la gloire de Graham Greene
1958 : La Nuit d'Elie Wiesel
1966 : D’autres et moi recueil de préfaces à des œuvres diverses, ainsi qu’aux œuvres complètes de l’auteur

Prix et distinctions

Grand prix du roman de l'Académie française 1926
Membre de l'Académie française 1933
Prix Nobel de littérature 1952
Grand-croix de la Légion d'honneur 1958

Hommages

En 1994, l'État et la ville de Paris rendent hommage à l'écrivain en baptisant de son nom le quai François-Mauriac, aux pieds de la Bibliothèque nationale de France, dont c'est l'adresse officielle, dans le 13e arrondissement.

Par ailleurs, deux prix littéraires portent son nom :

Le prix François-Mauriac de l'Académie française
Le prix François-Mauriac de la Région Aquitaine


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Posté le : 09/10/2015 22:08
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Conrad de Marbourg
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Le 11 Octobre 1231 Conrad de Marbourg

règne sur l'inquisition.
Conrad de Marbourg, prêtre séculier qui se voit conférer le titre d'inquisiteur par Grégoire IX qui met en application sa constitution Excommunicamus instituant l'Inquisition médiévale.
Conrad de Marbourg est un Prêtre séculier de l'ordre des Prémontrés. Ses contemporains l'appellent magister, montrant qu'il eut une formation universitaire, probablement à Paris ou Bologne. Il est décrit comme un homme d'une grande éloquence, très bon théologien, défenseur zélé de la pureté de la Foi Catholique et menant une vie ascétique.
Il se signale d'abord en prêchant la Cinquième croisade, proclamée en 1213 par Innocent III.

En bref

Célèbre inquisiteur du XIIIe siècle. Conrad de Marburg appartenait à l'ordre de Prémontré, qui s'était considérablement développé en Allemagne à la fin du siècle précédent et était très attentif à la christianisation des populations. Homme rigide, Conrad fut d'abord le confesseur de sainte Élisabeth de Hongrie, épouse du landgrave Louis de Thuringe. En 1231, le pape Grégoire IX, qui mettait en place l'Inquisition, le munit de pouvoirs très étendus pour poursuivre les hérétiques, et particulièrement la secte cathare extrémiste des lucifériens, qui s'adonnait à des pratiques proches de la sorcellerie. Avec ses auxiliaires Dorso et Jean, il agit avec un tel fanatisme et d'une manière tellement illégale qu'il souleva le mécontentement d'un grand nombre d'habitants et fut massacré par des chevaliers dans le voisinage de Marburg.
On n'a pas toujours précisé le caractère original de l'Inquisition, forme de répression de l'hérésie établie par le pape Grégoire IX à partir de 1231. À cette date, la punition des hérétiques et l'anathème contre les ennemis de la foi étaient des faits déjà anciens, selon ce qui avait été en particulier prescrit par le deuxième concile du Latran (1139). Il appartenait aux évêques de rechercher les hérétiques, aux juges séculiers de les punir, aux rois et aux princes de prêter, sous peine de déchéance, leur concours à cette répression.
Très différente est l'Inquisition ; elle se présente comme un tribunal d'exception, permanent, qui intervient dans toutes les affaires intéressant la défense de la foi. Elle doit son nom à la procédure inquisitoire qui permet la recherche d'office des suspects par le juge. Créée pour lutter contre les cathares et les vaudois, l'Inquisition a ensuite étendu son activité aux béguins, aux fraticelles, aux spirituels, ainsi qu'aux devins, sorciers et blasphémateurs. Dans ce vaste domaine, elle dessaisit, en fait sinon en droit, la juridiction ordinaire, celle de l'évêque. L'Inquisition n'aurait pu remplir son rôle sans le concours du pouvoir civil qui lui fournissait ses moyens d'existence et assurait l'exécution de ses sentences. D'ailleurs, à une époque où la vie de toute principauté reposait sur l'unité de religion, les intérêts de l' État et de l'Église se trouvaient, sauf exception, confondus au sein de cette juridiction.
Apparue au moment où l'Espagne réalisait son unité politique, l'Inquisition espagnole a constitué une institution originale, sans rapport avec l'Inquisition pontificale créée au XIIIe siècle pour lutter contre l'hérésie. Par ses origines, comme par l'action considérable qu'elle exerça dans les domaines religieux et intellectuel, elle constitua un élément caractéristique de la personnalité historique de l'Espagne. Marcelin Defournaux.

Sa vie

En 1225, il devient le directeur spirituel de la jeune veuve du landgrave de Thuringe, la future sainte Élisabeth de Hongrie. Il la traite avec la même sévérité que lui-même, conformément à ses souhaits. Il lui arrive cependant de restreindre son zèle et de lui interdire des mortifications excessives. Après la mort d'Élisabeth en 1231, Conrad sera chargé d'examiner les témoignages relatifs à sa vie et les miracles attribués à son intercession.
En 1227, alors qu'il est écolâtre à Mayence, il est nommé commissaire pontifical en Rhénanie.
En 1231, Grégoire IX met en application sa constitution Excommunicamus instituant l'Inquisition médiévale : le 11 octobre, il confère à Conrad le titre d'inquisiteur, le premier à porter ce titre en Allemagne. Le pape le dispense de suivre les obligations de la procédure canonique, te a cognitionibus causarum habere volumus excusatum et l'autorise à procéder au mieux contre les hérétiques, mais en respectant les décrets papaux. À sa demande, le pape édicte en 1233 la première bulle de l’histoire contre les sorcières, la Vox in Rama en y décrivant le sabbat des sorciers et leur culte du diable.
Conrad est laissé libre de choisir ses collaborateurs : il s'adresse aux dominicains par l'intermédiaire des prieurs de Regensburg, Friesach et Strasbourg. Appuyé par le dominicain Conrad Dorso et Jean le Borgne un laïc, il aide les évêques à réprimer l'hérésie en reprenant le rôle des témoins synodaux, ces clercs chargés de dénoncer l'hérésie pour permettre à la procédure de s'ouvrir. Conrad de Marbourg lutte contre les Vaudois et Cathares, comme on les appelle alors, sans distinction réelle entre les hérésies, ainsi que contre le groupe cathare des Lucifériens.
De l'avis même de ses contemporains, Conrad se montre trop sévère et brutal dans sa fonction. Ses deux assistants sont des ignorants fanatiques, inaptes à cette tâche. Conrad prend pour argent comptant les déclarations des suspects, et sur la foi de ces accusations, enchaîne les arrestations pour hérésie, sans chercher à vérifier l'exactitude des accusations portées. Les accusés peuvent soit confesser leur faute et se retrouver avec la tête rasée en guise de pénitence, soit protester de leur innocence, au risque d'être jugé hérétique non repenti, et livrés au bras séculier pour finir sur le bûcher. Le nombre de ses victimes n'est pas connu avec précision. En Allemagne occidentale, son activité d'inquisiteur provoqua une panique générale. Il agit avec un tel fanatisme et de manière tellement illégale qu'il soulève la population contre lui.
Il se tourne même contre la haute noblesse, en particulier le comte Henri II de Sayn, qu'il accuse d'hérésie luciférienne. Sayn fait appel à l'achevêque de Mayence, Siegfried III von Eppstein, qui convoque pour le 25 juillet 1233 un synode pour vérifier les charges pesant contre l'aristocrate. Les évêques et les nobles présents au synode voient l'activité de Conrad d'un œil hostile, et Conrad est incapable de prouver ses accusations contre le comte Henri. Sur ce, désavoué, Conrad ne renonce pas à sa mission qu'il jugeait juste. Fort du mandat qu'il tient du pape, il entreprend de prêcher une croisade contre les nobles hérétiques. Cinq jours plus tard, le 30 juillet 1233, il meurt avec son compagnon Gerhard Lutzelkolb dans une embuscade, massacré par des chevaliers alors qu'il revient à Marbourg.

Littérature

Conrad von Marburg est représenté dans la tragédie des Saints du romancier anglais Charles Kingsley. Il est aussi représenté dans les bandes dessinées Le Troisième Testament de Xavier Dorison et Alex Alice, et Urielle de Clarke et Denis Lapière

Mise en place et fonctionnement de l'inquisition


De nouveaux moyens de répression


Les moyens traditionnels de répression, la procédure par accusation ou par dénonciation convenaient peu à la lutte contre l'hérésie. Ignorée du droit romain, la procédure inquisitoire permit de poursuivre d'office toute personne vaguement soupçonnée, ce qui rendait possible une répression rapide et efficace. Celui qui était interrogé devait jurer de dire la vérité sur son propre compte et sur celui des autres. Innocent III définit la nouvelle procédure dans la décrétale Licet Heli de 1213, complétée par la décrétale Per tuas litteras.
Les nombreuses mesures qui frappaient les hérétiques avaient trouvé leur couronnement dans la décrétale Vergentes in senium publiée par Innocent III en 1199. En 1215, le Concile du Latran reprit toutes les dispositions antérieures. Les autorités civiles ne restèrent pas inactives : l'empereur Frédéric II en 1220 et 1224, le roi de France Louis VIII en 1226, la régente Blanche de Castille en 1229, le comte de Toulouse lui-même 1229 publièrent des ordonnances contre les hérétiques. Il restait à régulariser la répression. Grégoire IX lui donna une forme précise par la constitution Excommunicamus févr. 1231. La prison perpétuelle devenait la pénitence salutaire infligée à l'hérétique repentant ; l'hérétique obstiné devait recevoir le châtiment qu'il méritait animadversio debita avec l'abandon au juge séculier et la peine de mort par le feu. Ceux qui étaient en rapport avec les différentes sectes étaient frappés d'excommunication.
Pour appliquer sa constitution dans l'Empire, Grégoire IX, dès le 11 octobre 1231, désigna Conrad de Marbourg, prêtre séculier, qui, choisissant librement ses collaborateurs, pouvait user de l'excommunication et de l'interdit, faire appel au bras séculier ; il jouissait de pouvoirs à peu près illimités. Mais le pape eut aussi recours aux dominicains. Par ses bulles Ille humani generis, il confia nov.-déc-1231 aux prieurs de Ratisbonne, de Friesach près de Klagenfurth, de Strasbourg, la mission de poursuivre, suivant les statuts qu'il avait promulgués, les coupables et leurs aides. Semblable mission fut confiée au prieur de Besançon et à Robert le Petit, plus connu sous le surnom de Bougre. Pour la première fois, on se trouve en présence d'un ensemble de mesures qui attribuent à un tribunal d'exception le châtiment des ennemis de la foi, par application d'une législation précise : c'est la naissance de l'Inquisition. Mais le choix de Conrad de Marbourg fut très malencontreux. Fanatique, agissant sans discernement, il érigea çà et là de nombreux bûchers, et ses violences soulevèrent une inquiétude générale. Il se heurta aux prélats et tint tête au Concile de Mayence juill. 1233. Ses ennemis se débarrassèrent de lui par l'assassinat 30 juill.. L'Office ne se releva jamais de cet échec à l'intérieur de l'Empire. Mais l'Inquisition se développa néanmoins très rapidement.

Les tribunaux et les juges

En avril 1233, la juridiction nouvelle, bientôt connue sous le nom d'Inquisitio hereticae pravitatis, fut étendue au royaume de France et aux régions voisines. Le 20 avril 1233, le pape informa les archevêques et les autres prélats qu'il les soulageait d'une partie de leur fardeau en choisissant, pour combattre l'hérésie, les Frères prêcheurs. Le 22, il confia au provincial de Provence le soin de désigner plusieurs de ses religieux pour remplir cette mission dans les conditions prévues. Cette mesure s'appliquait aussi aux provinces de Vienne, Arles, Aix et Embrun. Avec l'aide d'un légat, Jean de Bernin, archevêque de Vienne, le provincial mit en place, à la fin de 1233 ou au début de 1234, des tribunaux à Avignon, Montpellier, Toulouse. En 1237, des juges furent installés à Carcassonne. Pour le nord de la France, le pape disposait déjà de juges. Il lui suffit de donner mandat 19 avr. 1233 à Robert le Bougre et aux inquisiteurs de Besançon pour extirper l'hérésie de La Charité-sur-Loire et des régions voisines ; ces pouvoirs furent en fait étendus aux provinces de Sens, Reims et Bourges. Des difficultés retardèrent l'établissement de l'Inquisition en Italie, jusqu'en 1235 en Italie centrale, jusqu'en 1237 en Lombardie ; elle fut confiée, dans le premier cas, au prieur du couvent des prêcheurs de Sainte-Marie de Viterbe, dans le second, au provincial de Lombardie.
L'Inquisition a été parfois itinérante, mais en général le tribunal possédait un siège fixe, la maison de l'Inquisition, ou vivaient les inquisiteurs, leurs notaires et leurs familiers. Les archives s'y trouvaient en lieu sûr. Les inquisiteurs touchaient une pension annuelle, ou, selon un système plus aléatoire, une partie du produit des confiscations, en Italie le tiers. Chaque tribunal était présidé par deux juges, avec des pouvoir égaux, qui étaient presque toujours, mais non obligatoirement, des Prêcheurs ou des Mineurs. Ils étaient désignés par les supérieurs de leur ordre, en général les provinciaux, qui recevaient une délégation du pape. Après le début du XIVe siècle, il n'y eut plus qu'un inquisiteur, qui se faisait assister par des lieutenants ou des commissaires. Dans l'exercice de leurs fonctions, les inquisiteurs n'étaient pas tenus d'obéir à leurs supérieurs, ils vivaient en marge de la vie conventuelle et échappaient à l'emprise de la règle. On s'efforça de faire coïncider les circonscriptions inquisitoriales et les limites politiques. Ainsi, en 1248, le diocèse d'Elne province de Narbonne cessa de dépendre de Carcassonne et fut rattaché à l'Inquisition aragonaise.
Pour bien s'acquitter de leur charge, les inquisiteurs disposaient de nombreux textes pontificaux ; ils pouvaient consulter des juristes par exemple, à Avignon, le 21 juin 1235, sur les vaudois ou une personnalité particulièrement compétente, tel, vers 1256, puis vers 1260, Gui Foucois, le futur pape Clément IV. Très vite, ils eurent à leur disposition des manuels, d'abord simples recueils de formules le plus ancien, en 1242, est dû au dominicain Raimond de Pennafort, pour l'Aragon, puis de véritables traités raisonnés, comme la célèbre Pratica Inquisitionis de l'inquisiteur toulousain Bernard Gui 1324.

Procédure et pénalités

Pour rechercher les suspects, les inquisiteurs pouvaient recourir à l'enquête générale ou à la citation individuelle. Dans le premier cas, ils partaient en tournée ou, le plus souvent, convoquaient au siège de leur tribunal la population entière d'une région, hommes et femmes. Tous étaient tenus de comparaître. Ceux qui faisaient des dépositions sincères dans les délais accordés étaient sûrs d'échapper aux peines les plus graves. Ils bénéficiaient du temps de grâce, usage remontant aux origines de l'Inquisition. Pour une comparution individuelle, la citation se faisait par l'intermédiaire du curé. Le refus de comparaître entraînait l'excommunication qui devenait définitive au bout d'un an. L'arrestation de certains suspects pouvait être jugée nécessaire. Pour toutes ces poursuites, le sergent de l'Inquisition demandait l'aide des autorités civiles.
Le suspect, interrogé par l'inquisiteur ou un de ses collaborateurs, devait s'engager par serment à révéler tout ce qu'il savait sur l'hérésie. Un notaire, en présence de témoins, recueillait les éléments de l'interrogatoire, mais en retenant seulement la substance des réponses, ce qui paraissait exprimer le mieux la vérité. Toujours rédigé en latin, le texte, traduit en langue vulgaire, était ensuite lu à l'accusé qui devait s'en remettre à la volonté des inquisiteurs. Pour faire avouer les récalcitrants, de nombreux moyens de contrainte pouvaient être employés, en dehors même de la torture, considérée comme licite après le milieu du XIIIe siècle : convocations nombreuses, incarcération plus ou moins confortable, recours à des délateurs. À défaut d'aveux, la preuve de l'hérésie était administrée par des témoins.
L'Inquisition n'infligeait pas de vraies peines, mais des pénitences salutaires pour le bien des adeptes de l'hérésie revenus à la foi. Les moins graves, qui étaient qualifiées de pénitences arbitraires, pouvaient être imposées ou commuées par les inquisiteurs eux-mêmes : elles étaient les seules infligées à ceux qui avaient comparu pendant le temps de grâce. On comptait parmi elles la fustigation au cours de la messe, les visites aux églises, les pèlerinages, l'entretien d'un pauvre, le port de croix d'infamie sur les vêtements, ces pénitences pouvant être combinées. La peine normale de l'hérétique converti lorsque son cas n'appelait pas une indulgence particulière, était la peine de la prison, en principe perpétuelle. Mais les réductions n'étaient pas rares : l'inquisiteur Bernard Gui commua environ deux peines sur cinq. Le régime du mur large laissait aux incarcérés une vie tolérable, surtout du fait de l'incurie des geôliers. Le « mur étroit » était beaucoup plus rigoureux. Avant de prononcer la sentence, les inquisiteurs consultaient des assesseurs ou boni viri, dont le rôle, peu important au début, n'a cessé de croître par la suite.
Devant l'hérétique opiniâtre ou le relaps, l'Inquisition, se trouvant désarmée, n'avait d'autre ressource que de les abandonner à l'autorité séculière, à laquelle il appartenait de les conduire au bûcher. Cette mesure gardait quelque chose d'exceptionnel : au cours de sa longue carrière, Bernard Gui abandonna quarante hérétiques au bras séculier.
Les sentences étaient prononcées au cours d'une cérémonie officielle qui se déroulait en présence des autorités religieuses et civiles, et qu'on appelait le sermon général parce qu'elle débutait par une allocution de l'inquisiteur.
Les peines les plus graves entraînaient obligatoirement la confiscation des biens du coupable au profit de l'autorité qui avait la charge des dépenses de l'Inquisition. Il en était de même dans le cas de condamnations posthumes, car la mort ne mettait pas un terme à l'action de la justice.

L'évolution de l'Inquisition

Le XIIIe siècle et l'apogée de l'institution
Des tribunaux ont fonctionné régulièrement dans le midi de la France. À Avignon et à l'est du Rhône où il avait à faire surtout à des vaudois, l'inquisiteur Guillaume de Valence eut, en 1246, des difficultés avec les Avignonnais qui en vinrent même à libérer des prisonniers. À Montpellier, le dominicain Pierre de Marseillan poursuivit les cathares et les vaudois jusqu'à la suppression du tribunal, vers 1244. À Carcassonne, où la tâche des inquisiteurs fut dure, le Catalan Ferrier a laissé une réputation particulière d'énergie 1237-1244 : il y gagna le surnom de Marteau des hérétiques. Les juges de Toulouse eurent le sort le plus difficile ; en 1235, ils furent expulsés de la ville. Pour tenter d'améliorer la situation, le légat associa au dominicain Guillaume Arnaud le franciscain Étienne de Saint-Thibéry et un séculier Raimond Escriban, archidiacre de Villelongue. Mais ceux-ci furent massacrés, la veille de l'Ascension 1242 28 mai, à Avignonet, victimes d'un guet-apens tendu par les hérétiques réfugiés à Montségur. La conjoncture ne redevint favorable à l'Inquisition qu'avec la nomination de Bernard de Caux et Jean de Saint-Pierre qui s'établirent à Toulouse en 1245.
Dans le reste du royaume, l'Inquisition prit un caractère désordonné, en raison de la personnalité de Robert le Bougre, ancien hérétique, considéré par ses contemporains comme faux et hypocrite. Après avoir vécu pendant de longues années dans la loi de mescréandise à Milan, il avait pris l'habit de frère prêcheur. L'action de Robert à La Charité-sur-Loire fut si brutale, en 1233, que Grégroire IX suspendit les pouvoirs de l'inquisiteur dès février 1234. Rentré en grâce en août 1235, celui-ci reprit son activité frénétique et, au cours d'une brève tournée 1236 par Châlons-sur-Marne, Péronne, Cambrai, Douai, Lille et sa région, il fit au moins une cinquantaine de victimes. Puis il sévit en Champagne. Des accusés, amenés de toutes parts dans la forteresse comtale du Mont-Aimé, furent brûlés, au nombre de cent quatre-vingt-trois, le 13 mai 1239, en présence de Thibaut IV, au milieu d'une affluence imposante. De tels excès entraînèrent la disgrâce de Robert, mais on ignore la date exacte et la nature de celle-ci.
En Italie, les inquisiteurs dominicains firent preuve d'une grande activité, de Rome à la Lombardie et jusqu'aux bords de l'Adriatique. Mais leur tâche fut rendue malaisée par la guerre entre les factions et par l'hostilité des gibelins. La mort de Frédéric II n'arrangea rien. Le 9 avril 1252, sur la route de Côme à Milan, Pierre de Vérone fut assassiné. Bien qu'il n'eût exercé sa charge que pendant quelques mois, ce prédicateur réputé, honoré ensuite sous le nom de saint Pierre Martyr, fut considéré comme le modèle de l'inquisiteur. Rainier Sacconi, ancien hérétique lui-même, et auteur d'un traité très documenté sur le catharisme, continua la lutte. En 1254, le prieur et un moine du couvent de Ferrare besognaient encore comme inquisiteurs dans la Marche d'Ancône et en Lombardie. Il est à croire que la tâche était trop lourde, car, le 30 mai 1254, Innocent IV confia aux Frères mineurs la répression de l'hérésie dans toute l'Italie centrale et dans la partie orientale de la plaine du Pô. Les dominicains gardaient juridiction sur la Lombardie et la Marche de Gênes. L'Inquisition fut même étendue par Grégoire IX à la Dalmatie. D'abord confiée aux dominicains, elle fut attribuée à partir de la fin du XIIIe siècle aux franciscains.
En France, l'Inquisition connut une crise longue et beaucoup plus grave. Innocent IV entendit suivre de près le fonctionnement des tribunaux, contrôle que les juges apprécièrent peu. Les inquisiteurs réussirent à lui tenir tête dans une affaire de commutation de peines au profit d'habitants de Limoux 1246 et la mesure fut annulée. Le pape mit alors l'Inquisition sous la tutelle de l'évêque d'Agen 1248 qui se révéla effective : l'évêque, le 14 février 1250, céda à l'abbé de Saint-Sernin de Toulouse une maison qui appartenait à l'Inquisition, afin d'assurer un meilleur logement des étudiants pauvres collège Saint-Raimond. L'inquisiteur Bernard de Caux fut simplement informé de la décision. Peu après, les dominicains renoncèrent à leur charge. Le tribunal continua cependant à fonctionner sous la direction des évêques, avec des juges séculiers, en gardant tous ses caractères de juridiction d'exception. Mais Innocent IV s'efforça d'obtenir le retour des religieux ; les négociations aboutirent seulement après l'avènement d'Alexandre IV. C'est en mars 1255, sous la direction du prieur conventuel de Paris, que les prêcheurs Renaud de Chartres et Jean de Saint-Pierre s'établirent à Toulouse. À la fin de 1258 ou au début de 1259, Guillaume-Raimond de Bordeaux et Baudouin de Montfort vinrent siéger à Carcassonne. Mais, en Provence, sur les terres de Charles d'Anjou, les franciscains succédèrent aux dominicains. Il en résulta une rivalité violente entre les deux ordres mendiants. Les dominicains accusèrent frère Maurin d'avoir pris parti, à Marseille, contre Charles d'Anjou 1264, et n'hésitèrent pas à produire de faux témoins.
Dans l'ensemble, l'Inquisition sortit renforcée de la crise. La papauté abdiqua presque tous ses droits, et les inquisiteurs échappèrent à l'autorité des légats pontificaux eux-mêmes. Dès 1256, Alexandre IV accorda aux inquisiteurs le droit de se relever mutuellement de l'excommunication encourue ou de l'irrégularité commise. Le recours à la torture se trouvait légalisé. L'Inquisition est à son apogée. En Vénétie, Philippe de Mantoue traque les hérétiques de 1276 à 1289. Environ deux cents cathares sont arrêtés à Sirmione et terminent leurs jours sur le bûcher à Vérone, le 13 février 1278. Pour Toulouse, le texte d'une partie des dépositions reçues par Renous de Plessac et Ponce de Parnac 1273-1279 a été conservé. À Carcassonne, Étienne de Gâtine et Hugues de Bouniols prononcèrent des condamnations en 1276. L'inquisiteur de France, Simon Duval, cita par-devant lui, à Saint-Quentin, pour le 18 janvier 1277, Siger de Brabant et ses adeptes qui se gardèrent de comparaître. Mais il était impossible de surveiller la marche de l'Office qui connut des abus. Après 1290, les franciscains se déconsidérèrent en Vénétie par leurs exactions et leurs malversations ; on incrimina particulièrement Boninsegna de Trente et Antoine de Padoue, qui n'a qu'un simple rapport d'homonymie avec l'autre disciple de saint François. À Carcassonne, l'action brutale des inquisiteurs et l'usage abusif de la torture entraînèrent une irritation générale. Des protestations s'élevèrent contre Jean Galand 1278-1293 et Nicolas d'Abbeville 1293-1302, attisées par le franciscain Bernard Délicieux. Des désordres éclatèrent. Les plaintes arrivèrent jusqu'au pape Clément V qui décida d'intervenir.
Celui-ci confia une enquête aux cardinaux Taillefer de La Chapelle et Bérenger Frézouls mars 1306 qui visitèrent les prisons de Carcassonne et d'Albi et prirent des mesures pour améliorer les conditions de détention. Après avoir mis un terme à cette mission 1308, Clément V promulgua toutefois, au cours du Concile de Vienne 1312, les constitutions Multorum querela et Nolentes qui exigeaient la collaboration des inquisiteurs et des évêques pour tous les actes importants de la procédure ainsi que pour la mise à la torture, la promulgation des sentences et la gestion des prisons. La puissance de l'Inquisition en fut irrémédiablement atteinte. Passant outre aux oppositions, Jean XXII, par la décrétale Cum Matthaeus 1321, restreignit un peu plus les pouvoirs des inquisiteurs.

Le déclin

Le tribunal de Toulouse conserva encore toute son activité avec Bernard Gui (1306-1323) ; il combattit les cathares et les vaudois, lutta contre les fraticelles, bizoches, béguins. Mais cela ne dura pas. À Carcassonne, en 1330, Henri de Chamay fut obligé de renoncer à des procès posthumes. Accusé de corruption et d'abus de pouvoir, un commissaire de l'Inquisition fut, en 1340, révoqué de sa charge. L'inquisiteur de France réprima la magie dans l'affaire de Jean l'Archevêque, sire de Parthenay, évoquée par Jean XXII. Contre les vaudois du Dauphiné, des poursuites, parfois entravées par le manque d'argent, furent engagées par le mineur François Borrel, à partir de 1375. Dans l'Empire, la nomination de Jean Scadelent resta sans effet (1349-1357). Au XVe siècle, le déclin s'accentue. À Carcassonne, les décisions prises par l'inquisiteur Pierre de Marvejols furent remises en cause par la papauté (1411). À Lyon, des habitants mécontents firent arrêter le franciscain Bernard Tremosii en 1458. On continua à nommer régulièrement des inquisiteurs, mais ce ne fut plus qu'une fonction accessoire ; tel fut le cas de Thomas de Ferrare en Lombardie de 1462 à 1474.
L'Inquisition a assuré, avec des fortunes variables, pendant les derniers siècles du Moyen Âge, la police de la foi, au profit de l'Église aussi bien que de l'État. Mais les progrès de la centralisation et le développement des institutions administratives et judiciaires mirent en cause l'indépendance et l'utilité du tribunal. Déjà, en plein milieu du XIIIe siècle, la république de Venise entendait faire de la poursuite des hérétiques son domaine propre. À Toulouse, en 1331, un commissaire du roi prétendit que l'Inquisition était une cour royale et non une cour ecclésiastique. Plus tard, sur ordre du roi, Étienne de Lacombe, inquisiteur à Toulouse, fut arrêté dans son hôtel et incarcéré dans sa propre prison 1412. C'était, il est vrai, au plus fort de la crise du Grand Schisme. En Dauphiné, le tribunal finit par être subordonné au Parlement de Grenoble et, en 1509, le Grand Conseil cassa les sentences de l'Inquisition, comme s'il s'agissait d'actes abusifs d'officiers royaux. Aux temps de la Réforme, les Parlements s'attribuèrent sans difficultés la connaissance des nouveaux cas d'hérésie. Mais, en Espagne, les Rois Catholiques organisèrent, sous leur étroite dépendance, un tribunal de caractère ecclésiastique, et déterminèrent ainsi l'essor inattendu de l'Inquisition espagnole. Yves DOSSAT

L'Inquisition espagnole


Les origines

La création de l'Inquisition espagnole se rattache à la réaction contre les minorités ethnico-religieuses, musulmanes et juives, incorporées par la Reconquista à l'Espagne chrétienne où elles jouirent d'abord d'une large tolérance. Cette réaction, accentuée par le malaise économique qui marque les derniers siècles du Moyen Âge, se traduit par la montée des rancunes populaires contre les Maures et surtout contre les Juifs, manieurs d'argent. La pression des autorités religieuses et les massacres de Juifs amènent de nombreuses conversions dont la sincérité apparaît douteuse. C'est pour surveiller ces nouveaux chrétiens ou conversos d'origine juive, et pour punir les relaps, que les Rois Catholiques obtiennent du pape Sixte IV, en 1478, l'autorisation de désigner des inquisiteurs dont la juridiction, d'abord limitée au royaume de Castille, fut étendue ensuite aux territoires de la couronne d'Aragon.

L'Inquisition et l'unification religieuse de l'Espagne

La juridiction inquisitoriale ne touchant que les convertis, Juifs et Maures conservaient, après 1478, la possibilité de pratiquer leur religion. Cette situation fut modifiée dans le quart de siècle suivant par la politique d'unification religieuse pratiquée par les Rois Catholiques. Dès 1492, les Juifs doivent choisir entre le baptême et l'exil ; en 1501, la même mesure est appliquée aux Maures du royaume de Grenade, reconquis vingt années auparavant ; en 1502, elle est étendue aux mudejars de Castille, puis à ceux d'Aragon et de Catalogne. Désormais, la population de l'Espagne ne comprend plus – du moins en principe – que des chrétiens, mais la foi des nouveaux chrétiens reste suspecte, et l'Inquisition est amenée à exercer une surveillance rigoureuse sur les Morisques Maures convertis et davantage encore sur les Marranes suspects de judaïser en secret. Parmi eux se recrute la majeure partie de ceux qui comparaissent dans les autos de fe organisés à partir de 1481. Tomás de Torquemada, premier inquisiteur général 1485-1494, se signala par sa rigueur impitoyable qui suscita de vives protestations, surtout en Aragon et en Catalogne, et souleva la réprobation du pape Sixte IV lui-même.
Cependant sont apparus, au début du XVIe siècle, d'autres courants de pensées hétérodoxes : en réaction contre les excès de la dévotion extérieure, des illuminés alumbrados se réclament d'un christianisme plus intériorisé visant à une union directe avec Dieu. La même aspiration à une vie religieuse plus profonde explique l'accueil très favorable que reçoit, dans les milieux humanistes et dans une partie du clergé, la pensée d'Érasme. Mais illuminisme et éramisme apparaissent d'autant plus redoutables à l'Inquisition qu'ils évoquent la justification par la foi » qui a abouti à la révolte de Luther. Contre les illuminés et les érasmiens, l'Inquisition engage, après 1525, des poursuites qui aboutissent généralement à des condamnations modérées. Il en est tout autrement lorsque, au début du règne de Philippe II, sont découverts, à Séville et Valladolid, des noyaux luthériens influencés en fait par la pensée calvinienne, peu nombreux, mais inquiétants par la qualité sociale et intellectuelle de leurs adeptes. La réaction est, cette fois, brutale : les autos de fe organisés dans les deux villes en 1559 et 1560 font périr plusieurs dizaines de personnes, tandis que l'archevêque de Tolède est lui-même emprisonné comme suspect d'hérésie. Ces rigueurs extirpent totalement le protestantisme d' Espagne. Cependant, la crainte de toute déviation religieuse dans le sens de l'illuminisme entretient la défiance de l'Inquisition à l'égard de la pensée mystique dont les plus illustres représentants, sainte Thérèse et saint Jean de la Croix, sont inquiétés ou poursuivis par le tribunal.

Organisation et procédure

De ses origines, l'Inquisition garde un caractère mixte : tribunal spirituel, elle relève de l'autorité romaine, mais elle constitue en même temps un organisme du gouvernement espagnol. À sa tête se trouve un Conseil suprême placé sur le même plan que les autres, tels le Conseil de Castille, celui des Finances qui assistent le monarque. Son président, l'Inquisiteur général, et ses membres sont nommés par le souverain ; son autorité s'exerce par l'intermédiaire d'une quinzaine de tribunaux ou inquisitions locales auxquels s'ajoutent, aux Indes de Castille, ceux de Mexico, Lima et Carthagène. Chaque tribunal comprend des juges ou inquisiteurs, des qualificateurs chargés de donner une qualification théologique erroné, sentant l'hérésie, hérétique, etc aux propositions ou crimes contre la foi qui leur sont déférés, enfin un procureur fiscal chargé de soutenir l'accusation. L'Inquisition dispose en outre de la collaboration de ses familiers qui constituent pour elle une sorte de police bénévole à laquelle des gens du plus haut rang se font gloire d'appartenir.
La compétence du saint tribunal s'est étendue, au cours du XVIe siècle, à tout ce qui apparaît comme déviation de la foi : non seulement l'hérésie, mais aussi la sorcellerie, la magie, le blasphème et la sollicitation séduction d'une pénitente par son confesseur. Sa procédure est rigoureusement secrète : l'accusé, maintenu dans un isolement total, n'a connaissance ni du nom des dénonciateurs ou des témoins à charge, ni même des accusations exactes portées contre lui : son défenseur, choisi par les inquisiteurs, a essentiellement pour tâche de l'amener à reconnaître ses erreurs ou ses crimes. La torture est couramment employée pour arracher des aveux, mais, contrairement à la légende, elle n'est ni plus ni moins cruelle ou raffinée dans ses procédés que celle qu'emploient les autres tribunaux criminels, en Espagne et ailleurs.
Les sentences rendues par les juges sont gardées secrètes jusqu'au jour de leur procla mation publique, lors d'un auto de fe, cérémonie solennelle, souvent associée à une festivité publique, et au début de laquelle les assistants et le roi lui-même, s'il est présent prêtent serment de fidélité au Saint-Office. Les condamnés impénitents et les relaps sont relaxés au bras séculier, l'exécution par le feu ayant lieu ensuite en un autre endroit ; ceux qui adjurent leurs erreurs sont réconciliés et condamnés à des peines pouvant aller de la simple pénitence ecclésiastique et du port du san benito casaque jaune croisée de rouge à la prison perpétuelle.
Si l'on excepte les premières années du fonctionnement de la justice inquisitoriale et la crise des années 1559-1560, les autos furent des cérémonies relativement peu fréquentes. Quant au nombre des victimes livrées aux flammes, il reste très difficile à établir : peut-être plusieurs milliers. Il ne représente en tout cas qu'une faible proportion de ceux qui eurent affaire au tribunal. Mais le rôle de l'Inquisition dans la vie espagnole ne peut être mesuré au nombre des condamnés : le seul fait d'avoir comparu devant elle constitue pour l'accusé – et pour toute sa famille – une tache indélébile. D'autre part, l'Inquisition exerce, par les condamnations de livres qu'elle inscrit à ses Index dont une dizaine furent publiés entre 1569 et 1790 et par les poursuites engagées contre leurs lecteurs, une police intellectuelle qui a pesé sur la culture espagnole, en limitant la pénétration des influences étrangères.

L'Inquisition aux XVIIe et XVIIIe siècles

Un demi-siècle après l'extirpation du protestantisme, l'expulsion des Morisques d' Espagne 1609-1610 élimina un élément ethnique quelque 300 000 individus qui, malgré tous les efforts de l'Inquisition, s'était révélé inassimilable. Mais, à la même époque, et comme conséquence de l'annexion du Portugal 1580, se produit en Espagne un afflux de Marranes qui, profitant des difficultés financières de la monarchie, se font concéder une tolérance de fait qui leur permet de prendre une place importante dans la vie économique et financière du pays. Les jalousies qu'ils suscitent amènent cependant, à partir de 1640, une reprise de la persécution inquisitoriale qui aboutira, au début du XVIIIe siècle, à leur élimination à peu près complète.
L'avènement de la dynastie des Bourbons conduit à un changement progressif dans les rapports entre l'Inquisition et le pouvoir royal, soucieux de défendre les droits « régaliens contre les empiètements de la juridiction ecclésiastique. Face aux courants de pensée éclairée qui pénètrent en Espagne et inspirent, sous Charles III 1759-1788, l'action de certains ministres réformateurs, l'Inquisition apparaît de plus en plus comme le rempart de la tradition et de l'ordre établi, non seulement dans le domaine religieux, mais aussi dans le domaine politique et social. Par ses condamnations d'ouvrages étrangers surtout français, elle cherche à éviter la contagion des idées philosophiques, ce qui suscite contre elle une vive réaction de l'opinion éclairée et conduit à des projets de réforme et même de suppression du tribunal. Mais l'Inquisition reste encore assez forte pour frapper d'une condamnation exemplaire l'un des représentants les plus audacieux de l'esprit nouveau, l'intendant de Séville, Olavide 1776.
Les dernières années de l'Inquisition espagnole. Après une brève période 1789-1793 où la crainte de la contagion révolutionnaire amena une collaboration entre l'autorité civile et l'Inquisition, les attaques des milieux éclairés reprirent contre le Saint-Office. Sa suppression fut l'une des conséquences de l'intervention napoléonienne en Espagne : supprimée en 1809 par un décret impérial, elle fut abolie d'autre part en 1811 par les Cortès constituantes de Cadix qui défendaient la cause de l'indépendance nationale. Restaurée en 1814 par Ferdinand VII, elle participa activement à la politique de réaction des années 1814-1820, avant d'être à nouveau supprimée par le gouvernement constitutionnel issu du pronunciamiento de Riego (1820). Lorsque Ferdinand VII fut, en 1823, rétabli dans son pouvoir absolu, il n'osa pas remettre en vigueur la juridiction inquisitoriale ; ce ne fut qu'en 1834 que l'Inquisition fut officiellement abolie par le gouvernement de la régente Marie-Christine. Marcelin Defournaux


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Posté le : 09/10/2015 21:43
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Pierre-Jean Jouve 1
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Le 11 octobre 1887 naît Pierre Charles Jean Jouve

à Arras, écrivain, poète, romancier, essayiste, traducteur et critique français et mort à Paris le 8 janvier 1976, à 88 ans. D'abord influencé par le symbolisme et l'esthétique du groupe de l'Abbaye Présence, 1912, il connaît une longue crise morale Voyage sentimental, 1922 qui aboutit, en 1924, à un reniement de l'œuvre passée et à une nouvelle conception poétique qui, à la lumière de la psychanalyse, approfondit dans ses romans. Paulina 1880, 1925 ; Aventure de Catherine Crachat, 1947 et ses recueils lyriques, Paradis perdu, 1929 ; les Noces, 1931 ; Sueur de sang, 1933 ; Diadème, 1949 ; Moires, 1962 ; Ténèbre, 1965 la double nature de l'homme prisonnier de ses instincts, mais attiré par la spiritualité. ses Œuvres principales sont Paulina 1880, Le Monde désert, Les Noces. Il est engagé dans le mouvement pacifiste de la Première Guerre mondiale, Compagnon du mouvement psychanalytique français, engagé dans la résistance intellectuelle contre le nazisme pendant la seconde guerre mondiale

En bref

La parole du poète français Pierre Jean Jouve s'élève, toujours impérieuse, et emprunte les crêtes acérées du langage. Elle cherche avec minutie à éterniser le galbe de l'amour dans le nom du poème. Elle s'efforce de cerner le vide dévorant de l'incernable Beauté dont les intermédiaires sont la femme, le sexe et la mort. L'Éros et la Mort dansent un ballet fatal, seul gage d'éternité. La lente et stricte création jouvienne vise à atteindre et à étreindre la mort au cœur même de la vie, en une inlassable « scène capitale » où la sueur du désir a saveur d'éternité sanglante. La poésie n'est qu'au prix de la mort. L'entrée en poésie :
C'est à Arras que Jouve voit le jour en 1887 et qu'il passe une enfance bourgeoise, assombrie déjà par la maladie. Seule, la musique – qui occupera toujours une place importante dans sa vie – offre à l'adolescent une source d'évasion. Il n'a que mépris pour la littérature jusqu'au jour où il découvre Mallarmé. L'appel est tout-puissant, et Jouve ne tarde pas à entrer en poésie. Ses premiers vers sont influencés par les derniers symbolistes. Bientôt, Jouve fait connaissance avec le groupe de l'Abbaye et devient un chantre passionné de l'unanimisme.
Mais, au-delà de vagues appels à une participation humaine, il rêve déjà d'une poésie-acte de connaissance. Lorsque survient la Première Guerre mondiale, obéissant à son généreux idéal, Jouve s'engage comme infirmier volontaire dans un hôpital militaire. Il y contracte de graves maladies infectieuses qu'il va soigner en Suisse où il se lie de forte amitié avec Romain Rolland. Il écrit alors ce qu'il appellera plus tard des œuvres de bonne conscience. Mais Jouve sent soudain qu'il se fourvoie, qu'il fait œuvre inauthentique. Il sait que son génie ne réside pas dans un élan de généreux altruisme, mais bien plus dans un profond retirement en soi. À la catastrophe extérieure représentée par la guerre correspond donc, pour lui, le début d'une libération intérieure. Au sortir de l'épreuve, le poète se réfugie dans la solitude, se recueille et médite les grands mystiques ; François d'Assise, Thérèse d'Avila, Ruysbroeck l'Admirable. En 1921, il se rend à Florence, puis à Salzbourg, ses lieux de prédilection. Son mariage avec une psychanalyste, Blanche Reverchon, hâte encore l'évolution spirituelle du poète. En 1928, il décide de rejeter en bloc toute l'œuvre publiée avant 1924, parce qu'elle n'obéit aucunement aux deux objectifs qu'il vient de se fixer : « obtenir une langue de poésie qui se justifiât entièrement comme chant ... et trouver dans l'acte poétique une perspective religieuse – seule réponse au néant du temps. Femmes :
Les Noces 1931 inaugurent l'œuvre nouvelle. Jouve écrit le mot du premier mot du livre qui scelle l'alliance entre la poésie et les valeurs spirituelles. Le poète s'est libéré du monde pour s'abandonner, en de mystérieuses noces mystiques, aux volontés du Père. Poème de la soumission et de la naissance, Les Noces mûrissent lentement, de 1925 à 1931. Dans le même temps, Jouve travaille à un Paradis perdu 1927, où apparaît le thème de la Faute, et surtout à son œuvre romanesque. Pendant dix ans, la création romanesque et l'inspiration poétique vont s'entrecroiser. En 1925, paraît Paulina 1880, roman du déchirement de la foi par la volupté, qui marque déjà le rapport dialectique étroit entre l'Amour et la Faute. La jeune Paulina essaie d'échapper à son amant Michele et se réfugie dans un couvent de visitandines où elle devient vite indésirable. Elle se redonnera donc à Michele, mais – scène capitale – le tuera. Si Florence sert de cadre à Paulina 1880, Genève est le centre du Monde désert où le conflit à deux devient un drame à trois personnages. Pour n'avoir éprouvé qu'un amour filial à l'égard de la sensuelle Baladine, Jacques de Todi est supplanté par Luc Pascal. En possédant Baladine, Luc provoque la mort de Jacques. Mais, au lendemain de leur mariage, Luc est abandonné par Baladine. Pas de grande vie sans grande mutilation. Luc se réfugiera donc dans la poésie, née pour lui d'un manque. Le Monde désert est le récit d'une ascension vers la poésie qui, seule, parvient à réaliser l'unité désirée, par-delà la vie et la mort. Des poèmes de Luc Pascal seront plus tard insérés dans Les Noces. En ce sens, l'expérience romanesque est une invite à la création poétique. Hécate 1928 et Vagadu 1931 content l'histoire de Catherine Crachat qui, elle aussi, aime et donne la mort. Dans Vagadu, Jouve s'est inspiré d'une véritable expérience de psychanalyse pour approfondir son personnage fictif.
Si les destins féminins fascinent l'écrivain, c'est que la vie lui a offert d'étranges rencontres et des amours bizarres. Lisbé apparaît à Jouve en 1909 ; il la retrouve, vingt-quatre ans plus tard, mariée à un officier. Ce fait l'intrigue. Très jeune, Jouve a connu à Arras une femme d'officier dont il a embrassé la prodigieuse et fauve chevelure. L'image des deux femmes se superpose alors et contribue à la naissance du personnage mythique d'Hélène. À la fin de Dans les années profondes – un des plus beaux récits de Jouve – Hélène meurt au cours de l'acte érotique. Deux années plus tard, le poète apprend que Lisbé est morte. Cette mort, il l'avait secrètement pressentie ; désormais, l'œuvre romanesque est achevée. Esprit mutilé des ténèbres, Jouve va arpenter le mètre poétique. Hélène et l'Ange
Hélène est présente dans Sueur de sang 1935 où Jouve cherche Dieu dans la profondeur du péché. Le recueil contient un avant-propos important, intitulé Inconscient, spiritualité et catastrophe. Jouve ne fait pas acte d'allégeance à la psychanalyse, mais il en accepte les données fondamentales pour les fondre à une vie religieuse et mystique. Pour le poète, le désir freudien est essentiellement péché et, par là même, porteur des germes de la mort. Le poème introduit de nombreux symboles l'œil, la bouche, la chevelure, le cerf, supports et ferment de l'interrogation créatrice. Matière céleste 1937 chante « Hélène, après qu'elle est morte et introduit le thème dialectique du Nada, hérité des mystiques espagnols :Celui qui forme tout est celui qui détruit. Dans Kyrie 1938, le poète fait retentir l'écho des grandes musiques entendues à Salzbourg, invoque Hélène mise au tombeau tout comme Mozart jeté dans la fosse commune, et perçoit l'arrivée de quatre cavaliers qui annoncent la guerre. Pendant les cinq années de la Seconde Guerre mondiale, Jouve va vivre mystiquement l'esprit de la résistance nationale. La Vierge de Paris 1946 sera la somme des poèmes de guerre écrits à Grasse, à Dieulefit, puis dans l'exil genevois. Jouve compense le poids de la catastrophe par une fougue visionnaire, génératrice d'espérance. Son rêve serait que fussent conciliés l'idéal du Moyen Âge chrétien et l'esprit de la Révolution française.
Le temps de la guerre est pour lui l'occasion de faire une Défense et illustration 1946 des maîtres qu'il aime : Baudelaire, Rimbaud, Nerval. Mais son travail le plus remarquable est une analyse pénétrante du Don Juan de Mozart 1942. Avec Hymne 1947, le thème de la guerre s'estompe pour faire place à celui, très enrichi, du Nada, et surtout à la fascination d'un archétype baudelairien : la prostituée. Dans En miroir 1954, véritable confession du poète, Jouve raconte l'histoire de Yanick, connue, aimée et perdue. Cette humble fille livrée aux mâles errant apparaît dans Diadème 1949 ; elle est le cygne de Ode 1950, où l'esprit de Segalen et l'attrait formel de Saint-John Perse sont sensibles. Yanick est encore présente dans Langue 1952, recueil dédié à l'esprit d'Alban Berg dont Jouve admire le Wozzeck et Lulu, cette incarnation de la chaleur – joyeuse ou désastreuse – de l'Éros. Le mythe de Yanick s'enrichira au contact de la Lulu bergienne, sans pourtant se confondre avec le mythe d'Hélène. Dans Mélodrame 1958, le poète écoute le Temps qui inscrit très près de son cœur les traits d'une plume de fer. La mort est là, qui veille et qui unira peut-être définitivement le poète et le corps de toutes les femmes aimées-défuntes. La mort du poète conditionne, pour ainsi dire, la vie du poème. Mais, avant d'emprunter le sentier de Ténèbre, Jouve jette un dernier regard sur les Moires 1962 de son enfance. Les messieurs-dames ont beau s'esclaffer car il s'agit de désespoir, Jouve n'en continue pas moins à renaître par une foi qui lui fait dire que toute poésie est à Dieu et que sans cette ambition d'ange ... le vers ne serait que le jeu des osselets de la mort.
L'itinéraire poétique de Jouve est semé de nombreuses rencontres lieux, femmes, lectures, musiques que l'écrivain a pouvoir d'élever à la dimension mythique. La poésie est le fruit d'une expérience intérieure toujours dépassée dans un mouvement d'ascèse purificatrice ; elle est une dramaturgie religieuse où les multiples symboles fondent et se fondent à l'énergie du chant. L'œuvre de Jouve est une recherche souterraine de soi qui veut transmuer la matière d'en bas en matière d'en haut ». Par là, Jouve est un héritier de Baudelaire. Mais, tandis que l'auteur des Fleurs du mal se place toujours sur le plan de la conscience, Jouve se situe, lui, sur un plan mystique qui le rapproche de Nerval, Novalis et Hölderlin dont il a traduit les Poèmes de la folie. Le mysticisme de Jouve est vécu tragiquement, avec une froide et passionnée rigueur qu'on retrouve d'ailleurs dans la disposition typographique très soignée de son poème et dans le souci fréquent d'une concision formelle mallarméenne. Poésie de la transparence, l'œuvre de Pierre Jean Jouve est une métamorphose mythique qui clame l'élan mystique toujours recommencé. Daniel Leuwers

Sa vie

Pierre Charles Jean Jouve a eu plusieurs vies. Avant 1914, il est un des écrivains de l'unanimisme, ce mouvement créé par Jules Romains, puis un membre actif du mouvement pacifiste animé par Romain Rolland pendant la Première Guerre mondiale.
À partir de 1921, une profonde rupture a lieu grâce à sa seconde épouse, la psychanalyste Blanche Reverchon, traductrice de Sigmund Freud 1923 et amie de Jacques Lacan. Elle fait de lui l'un des premiers écrivains à affronter la psychanalyse et à montrer l'importance de l'inconscient dans la création artistique — et cela dès le milieu des années 1920. On peut citer parmi les œuvres de cette époque ses recueils de poèmes : Les Noces 1925-1931, Sueur de Sang 1933-1935, Matière céleste 1937, et ses romans : Le Monde désert 1927, Hécate 1928, Vagadu 1931, La Scène capitale 1935, et le plus connu Paulina 1880, paru en 1925 adapté au cinéma en 1972 par Jean-Louis Bertuccelli.
Il a été aussi, dès 1938 et pendant son exil en Suisse, un important acteur de la résistance intellectuelle contre le nazisme, avec ses poèmes apocalyptiques de Gloire et de La Vierge de Paris.
Jouve a été le compagnon de route de nombreux artistes, d'écrivains Romain Rolland, Stefan Zweig, Joë Bousquet, Jean Paulhan, Henry Bauchau, de peintres André Masson, Balthus, Joseph Sima, …, de philosophes Jean Wahl, Jacques Lacan, …et de musiciens (Michel Fano, : il a d'ailleurs beaucoup écrit sur l'art et la musique.
Cet écrivain souvent perçu comme un marginal hautain, refusant les embrigadements des mouvements a su toucher beaucoup d'écrivains et d'artistes dont certains peuvent être considérés comme ses disciples, par exemple les poètes Pierre Emmanuel, Salah Stétié ou Yves Bonnefoy.

Pierre Jean Jouve, un panorama Reniements

Pierre Jean Jouve a renié toute son œuvre publiée avant 1925, année où il fait commencer sa vita nuova. On a donc peu commenté sa vie antérieure pour ne commenter que son œuvre postérieure à cette date, où il publie les poèmes de Mystérieuses Noces et le roman Paulina 1880 quatre voix au prix Goncourt. C'est ce qu'il a fait lui-même dans En Miroir, son "Journal sans date" de 1954 où il ne décèle de sa vie que certaines grandes lignes soigneusement choisies. C'est aussi ce qui a été fait dans des ouvrages de référence, souvent écrits par des amis du poète, comme René Micha2 ou Robert Kopp. Cependant la biographie de Daniel Leuwers4 et les notes et commentaires de Jean Starobinski pour son édition de Œuvre5, ont révélé des pans méconnus de sa vie et l'importance de sa première œuvre pour sa formation et son évolution. La récente biographie de Béatrice Bonhomme6 a apporté un nouvel éclairage sur la crise de Jouve entre 1921 et 1927. Cette crise a profondément marqué sa vie et orienté son écriture. Pierre Jean Jouve est l'homme des ruptures, d'avec son père puis d'avec son fils ; d'avec sa première épouse Andrée, grande militante de mouvements féministes et pacifistes ; d'avec ses amis pacifistes Romain Rolland, Georges Duhamel, Charles Vildrac, Frans Masereel qui au moment de la rupture créaient la revue Europe 1923, toujours vivante ; d'avec ses amis artistes même Joseph Sima en 1954 ; d’avec ses éditeurs, Jean Paulhan et Gaston Gallimard en 1945. Et donc d'avec sa première œuvre. On peut aussi considérer que la réédition de ses romans et de ses poèmes, avec peu de modifications mais beaucoup de coupures, que Jouve a effectuée de 1959 à 1968, est une nouvelle réécriture de sa vie et de son œuvre.

Plusieurs vies

Pierre Jean Jouve a donc eu plusieurs vies. Jouve pourrait être considéré comme un des écrivains de l'unanimisme, ce mouvement créé par Jules Romains, ou de l'Abbaye de Créteil Groupe de l'Abbaye. Ou comme un membre actif du mouvement pacifiste animé par Romain Rolland pendant la Première Guerre mondiale. Grâce à sa seconde épouse, la psychanalyste Blanche Reverchon, traductrice de Freud 1923 et amie de Jacques Lacan, il fut l'un des premiers écrivains à affronter la psychanalyse et à montrer l'importance de l'inconscient dans la création artistique, et cela dès le milieu des années 1920, avec ses poèmes de Noces 1925-1931, de Sueur de Sang 1933-1935 et de Matière céleste 1937, ou avec des romans, Hécate 1928, Vagadu 1931 et La Scène capitale 1935. Il montra aussi l'enrichissement que la lecture des grands mystiques, Thérèse d'Avila, Catherine de Sienne, Jean de la Croix, François d'Assise, peut apporter à l'écriture poétique. À ces mystiques il associa étroitement des poètes précurseurs, Hölderlin, Gérard de Nerval, Charles Baudelaire, Stéphane Mallarmé.
Ce fut aussi, dès 1938 et pendant son exil en Suisse, un important acteur de la résistance intellectuelle contre le nazisme, avec ses poèmes apocalyptiques de Gloire et de La Vierge de Paris. Parmi ses essais sur l'art et sur la musique, on notera pendant la guerre un important Don Juan de Mozart 1942, avec l'aide du musicien Fernand Drogoul et ensuite un essai sur Wozzeck d'Alban Berg écrit avec le compositeur Michel Fano, 1953. Après guerre, son art rencontra ceux de Saint-John Perse et de Victor Segalen, et il émigra vers la sérénité de sa Chine intérieure.

Artistes et écrivains

Jouve fut aussi le compagnon de route d'artistes, d'écrivains, de philosophes. Les artistes : le peintre cubiste Albert Gleizes qui illustra Artificiel ; le graveur expressionniste belge Frans Masereel, avec qui il fit de nombreux livres avant 1925 ; le grand artiste surréaliste André Masson qui illustra la 1re édition de Sueur de Sang, 1933 ; le peintre tchèque Joseph Sima qui fit avec lui quelques-uns des plus importants livres illustrés d'avant guerre Beau Regard, 1927 et la 2e édition de Paradis perdu, 1938 ; l'éditeur typographe Guy Lévis Mano "GLM" qui réalisa quelques-uns de ses plus beaux livres ; et enfin le grand peintre Balthus, qu'il avait connu adolescent et sur qui il écrivit des textes importants. Il a accompagné, par des collaborations, des correspondances et des traductions, des écrivains amis comme Pierre Klossowski traduction de Hölderlin, 1930, Romain Rolland, Stefan Zweig, Albert Béguin, Jean Paulhan, Joë Bousquet10, Bernard Groethuysen, Gabriel Bounoure, Jean Wahl qui l'initia à Kierkegaard, Eugenio Montale et Giuseppe Ungaretti qu'il traduisit, Catherine Pozzi. Cet écrivain souvent perçu comme un marginal hautain, refusant les embrigadements des "mouvements" a su toucher beaucoup d'écrivains et d'artistes, dont certains peuvent être considérés comme ses disciples mais Jouve n'avait absolument pas la tournure d'esprit d'un maître d'école, Pierre Emmanuel qui lui rendit hommage dans Qui est cet homme, 1947, Yves Bonnefoy, Salah Stétié, Henry Bauchau, Jules Roy, David Gascoyne, Fernand Ouellette, Heather Dohollau, Gérard Engelbach.
Pierre Jean Jouve a créé de puissants mythes féminins qui ont une place originale parmi les figures de l’amour dans la littérature : Paulina, Baladine du Monde désert, Catherine Crachat l'héroïne d' Hécate et de Vagadu, et tout particulièrement Lisbé et Hélène La Rencontre dans le carrefour, La Scène capitale, Matière céleste, enfin Yanick, la chaste prostituée Diadème, En Miroir.

Les vies et les Å“uvres de Pierre Jean Jouve

De 1905 à 1921 : La première vie de Pierre Jean Jouve : symbolisme, unanimisme, pacifisme
Dans son autobiographie, En miroir, Jouve donne une image triste de son enfance, entre un père tyranneau domestique, et une mère musicienne effacée. Une grave appendicite vers ses seize ans entraîne une longue dépression. Il obtient le baccalauréat en 1905 et commence simultanément à Lille des études scientifiques et juridiques.
En 1906, un ami belge, Pierre Castiaux, l'initie à la littérature symboliste : il découvre Rimbaud, Mallarmé et Remy de Gourmont dont Le Livre des masques lui fait découvrir les poètes qui comptent depuis Baudelaire.
Avec des amis, Paul Castiaux, Théo Varlet et Edouard Charpentier, il crée à la fin de 1906 une revue, Les Bandeaux d'or. Il y publie ses premiers poèmes où règnent l'influence de Gourmont, Maeterlinck et Verhaeren. On y décèle des thèmes qui se déploieront plus tard, ainsi la recherche de l'expression de sa vie intérieure. Jouve est à la recherche d'une nouvelle poétique qui lui permettra de dire ce qu'il voit en imagination, et grâce à Paul Castiaux, il entre en relation avec les écrivains et artistes de l'abbaye de Créteil : Georges Duhamel, Charles Vildrac, Alexandre Mercereau, Albert Gleizes, René Arcos.
Une grave maladie nerveuse le conduit à se faire soigner en Suisse en 1908. En 1909, il publie son premier recueil, Artificiel, illustré par Albert Gleizes. Il fait la connaissance du peintre cubiste, Henri Le Fauconnier qui fait son portrait. En 1954, dans En miroir, il racontera l'histoire de Lisbé qu'il a rencontrée une première fois en 1909 et qui lui a inspiré le personnage de Claire Dernault de son premier roman. Il fait aussi l'expérience des "toxiques" et c'est un séjour de trois mois en Italie qui le guérit de ses addictions. En 1910 il publie un deuxième recueil poétique, de forme très néo-classique, Les Muses romaines et florentines où il décrit les paysages vus dans son récent voyage. Il épouse Andrée Charpentier 1884-1972, la sœur d'Édouard, qui est professeure et qui sera une active militante progressiste et féministe. Le couple vit à Poitiers. En 1911, il publie La Rencontre dans le carrefour où il s'inspire de son histoire avec Lisbé pour écrire un roman développant les théories unanimistes de Jules Romains qui était un proche de l'Abbaye de Créteil. Cette influence perdure dans Les ordres qui changent, Les Aéroplanes 1911, Présences 1912. Jouve a une riche imagination poétique, mais il n'a pas encore trouvé la voie littéraire et spirituelle qui lui convient. Il espère la trouver en pratiquant un art social et il se rapproche de Jean-Richard Bloch qu'il a connu à Poitiers, et dans cet esprit il publie une pièce de théâtre, Les deux forces 1913.
La guerre éclate et Jouve adopte une position pacifiste inspirée par Tolstoï. Il était déjà réformé, aussi pour s'engager lui aussi, il devient infirmier bénévole à l'hôpital de Poitiers où règnent des maladies contagieuses. Jouve tombe gravement malade.
Jouve part se faire soigner en Suisse fin 1915 et s'insère dans le milieu pacifiste qui s'est constitué autour de Romain Rolland qui devient l'ami et le guide spirituel du poète. Gallimard publie son premier grand recueil de proses poétiques pacifistes, Vous êtes des hommes 1915. Ses écrits, Poème contre le grand crime–1916 et À la Révolution russe 1917, ses conférences, ses nombreux articles pour la presse pacifiste, sa tentative de redevenir infirmier bénévole, montrent une activité militante incessante. Il rejette alors la poésie symboliste, trop «égoïste, qui l'a formé.
Il écrit ses propres Vie des martyrs et publie en 1918 Hôtel-Dieu, Récits d'Hôpital - 1915 qui s'appuie sur son expérience d'infirmier soignant des militaires mourants. Le livre est illustré de bois gravés par Frans Masereel : le grand artiste expressionniste belge est un compagnon de route très actif des pacifistes français. Les productions suivantes de Jouve montrent un triple mouvement : il écrit un Romain Rolland vivant qui paraîtra en 1920, et des poèmes engagés publiés avec l'aide de Frans Masereel, Heures – Livre de la nuit (aux Éditions du Sablier, 1919, Heures – Livre de la grâce dédié à un grand ami des pacifistes, l'écrivain autrichien Stefan Zweig, 1920, et enfin Toscanes 1921. D'une part, il veut y magnifier l'œuvre et la pensée pacifistes de Romain Rolland, mais d'autre part on y voit aussi son fort désir de sortir d'une influence qui ne convient qu'imparfaitement à son tempérament, et enfin des poèmes comme ceux de la section Enfance du Livre de la nuit nous montrent une inspiration venue de son expérience existentielle propre. Celle-ci est bien loin de ses œuvres militantes qui sont, humainement et politiquement, très estimables, mais littérairement, leur ton emphatique ou compassionnel ne dépasse pas celui des œuvres de ses compagnons, écrivains militants et généreux. Jouve est prêt pour une nouvelle vie : c'est celle que va lui apporter la rencontre de la psychanalyste Blanche Reverchon.

De 1921 à 1927 la crise de :

Ruptures, la rencontre avec Blanche Reverchon, la psychanalyse, les mystiques et Baudelaire

En 1921, d'abord à Florence, puis à Salzbourg chez Stefan Zweig, Pierre Jean Jouve rencontre Blanche Reverchon, alors psychiatre à Genève où elle fréquente les milieux féministes et pacifistes. Leur entente passionnée conduira Jouve à divorcer d'avec Andrée Charpentier-Jouve elle décédera en 1972, à découvrir la psychanalyse freudienne Blanche a rencontré Freud, à lire les grands mystiques et à relire les grands poètes symbolistes. Il surveille en 1923 la traduction que Blanche fait des Trois essais sur la théorie de la sexualité. Ses poèmes publiés en 1921-1922, d'abord Toscanes, puis surtout Voyage sentimental, se souviennent de son inspiration passée veine compassionnelle et sont souvent explicitement autobiographiques. En 1923-1924, il dirige une collection de poésie chez Stock où il publie des traductions (de Rudyard Kipling, de Rabindranath Tagore et son dernier recueil manqué, Prière.
À partir de 1925, c'est une période d'intense création premiers grands poèmes de Noces, parution de Paulina 1880 et du Monde désert mais aussi de profonde crise morale et psychologique d'où il semble ne sortir qu'en 1927 ou 1928. Quand il publie Noces en 1928, il précise dans une postface célèbre qu'il renie toute son œuvre antérieure à 1925. Il a divorcé en 1925, il a rompu avec ses amis pacifistes Romain Rolland, Frans Masereel, Georges Duhamel, Charles Vildrac, il interdit toute réédition de son premier ouvrage. Une vita nuova commence

De 1925 à 1937 :

une création littéraire très importante

La production littéraire de Jouve entre 1925 et 1937 est très importante. Cette période de fécondité débute en 1925 avec une plaquette de poèmes, Mystérieuses Noces et un roman qui trouve rapidement un grand public, Paulina 1880. Jusqu'en 1937, année de la parution de Matière céleste, Jouve publie en parallèle des romans et des poèmes. Comme l'a souligné un récent Cahier Pierre Jean Jouve la référence psychanalytique est au cœur de la modernité de l'écrivain : dans ses grands textes, Jouve a su faire parler son inconscient dans les images et la musique de sa poésie et de sa prose, et parallèlement il a su mettre en résonance l'inconscient de son lecteur pour que celui-ci sente et comprenne ce qui pourrait passer pour indicible et difficile à transmettre.

Les Romans, de Paulina 1880 à La Scène capitale

Paulina 1880 et Le Monde désert
On peut présenter les romans de Jouve en trois diptyques. Le premier comprend Paulina 1880 1925 et Le Monde désert 1927. On peut résumer schématiquement Paulina 1880 comme une chronique italienne » qui mêle amour charnel et amour mystique, jouissance et pulsion de mort : la belle et passionnée Paulina connaît successivement la détestation de sa famille, la fascination pour les images religieuses sanglantes, un amour charnel passionné et adultère pour le comte Michele, puis une grande expérience mystique dans un couvent où elle finit par faire scandale. Revenue à la vie laïque, elle retrouve le comte Michele veuf, donc libre. Sa passion amoureuse refuse un mariage. Elle tue Michele pendant son sommeil et tente de se suicider. Son suicide échoue. Paulina connaît la prison. Puis elle découvre la sérénité en menant pauvrement la vie d’une paysanne. Ce résumé ne donne pas le ton du livre : vif et passionné, ironique et torturé, mêlant avec bonheur amour humain et amour divin. Paulina 1880 a été adapté au cinéma en 1972 par Jean-Louis Bertuccelli et en opéra de chambre en 1983 par Claude Prey sous le titre Paulina ou la chambre bleue. Le souvenir de Paulina réapparaît dans Le Monde désert de 1927 qui traite des difficiles relations entre la vie amoureuse et la création artistique chez trois personnages : Jacques de Todi, homosexuel qui a peut-être une vocation de peintre son modèle, fils d’un pasteur genevois, s’est réellement suicidé, Luc Pascal, le poète maudit, et la mystérieuse Baladine qui aide les hommes qu’elle aime à se révéler, mais qui ne les protège pas de la mort physique ou symbolique. Le roman se lit à deux niveaux : la vie visible de ses personnages se distingue de leur vie intérieure à laquelle le romancier nous rend très sensible. Le Monde désert a été adapté en téléfilm par Pierre Beuchot et Jean-Pierre Kremer en 1985.

Aventure de Catherine Crachat : Hécate et Vagadu

Le second diptyque, Aventure de Catherine Crachat constitue une transition : Il débute par Hécate (1928) qui conte l’histoire d’une star de cinéma, Catherine Crachat, qui cherche son destin entre différents hommes et différentes femmes. On retient surtout la figure de Pierre Indemini, mathématicien, peintre et poète, et celle de la baronne Fanny Felicitas Hohenstein, la femme fatale. Comme Hécate, la déesse lunaire à laquelle elle est comparée, Catherine conduit à la mort ceux et celles qu’elle aime. Le roman peut aussi être lu comme une percutante chronique de la vie dans les milieux intellectuels, mondains, artistiques et féministes des années 1920 en Europe. Le second volet de ce qui est devenu Aventure de Catherine Crachat ce titre collectif est postérieur à la guerre est Vagadu 1931 : moins qu’un roman, c’est une extraordinaire succession de scènes oniriques rêvées par Catherine lors du transfert qu’elle vit avec son psychiatre, le "Docteur Leuven" où on peut reconnaître Rudolph Loewenstein, le célèbre psychiatre de Blanche Reverchon et Jacques Lacan et ami de Marie Bonaparte : ce roman exploite explicitement la "matière psychanalytique" comme aucun roman ne l’avait fait auparavant. En 1990 Hécate et Vagadu ont été adaptés au cinéma par Pierre Beuchot sous le titre Aventure de Catherine C, avec Fanny Ardant, Hanna Schygulla et Robin Renucci.

Histoires sanglantes et La Scène capitale

En fait Vagadu inaugure un nouveau type d’écriture romanesque qu'on va retrouver dans le dernier diptyque : Jouve y exploite son savoir psychanalytique venu de son épouse Blanche Reverchon en le fécondant avec sa propre inventivité venue de sa vie intérieure, spirituelle et onirique. On retrouve d'abord cette inspiration mettant en scène des personnages aux prises avec leurs névroses et leurs pulsions dans les nouvelles des Histoires sanglantes de 1932. Le recueil débute par une variation sur le thème de Wozzeck que Jouve avait connu à travers la suite tirée de l’opéra d’Alban Berg. On peut également lire de la même façon les deux longs récits qui composent La Scène capitale de 1935 : La victime, récit dédié à Balthus qui en fit un tableau, et Dans les années profondes. Ce court roman mêle une riche matière oniriques avec un récit initiatique sur la quête de la création artistique à travers un épisode amoureux qui associe étroitement la découverte de la vie sensuelle avec celle de la mort. De La Scène capitale, Jean Starobinski a pu écrire : Dans la prose d'imagination, en ce siècle, il est peu d’œuvre qui égale ces deux récits. Après la guerre, Jouve regroupera Histoires sanglantes et La Scène capitale en un seul volume, d'abord sous le titre Histoires sanglantes puis sous le titre La Scène capitale. Le récit Dans les années profondes marque la fin officielle de l'œuvre romanesque en prose de Pierre Jean Jouve.

Romans reniés

Le premier roman de Pierre Jean Jouve est en réalité La Rencontre dans le carrefour de 1911, mais Jouve l'a renié comme toute son œuvre d'avant 1925. Ce roman fait cependant retour dans En miroir 1954 avec le personnage de Lisbé. Ce roman était admiré par Paul Éluard. Lisbé est une des sources du personnage d'Hélène du récit Dans le Années profondes. On peut aussi considérer Hôtel-Dieu, récits d'Hôpital en 1915 1918, avec 25 bois gravés par Frans Masereel comme un cycle de nouvelles inspirées à Jouve par son expérience d'infirmier volontaire en 1915 à l'hôpital de Poitiers où il a vu mourir des soldats revenus du front, malades ou blessés. Compassion et précision des descriptions. Le conte Beau Regard de 1927, nouvelle variation sur des poèmes de 1922 Voyage sentimental et illustré par son ami, l'artiste tchèque Joseph Sima, a ensuite été renié : Jouve y mettait en scène trop explicitement son histoire d'amour avec Blanche Reverchon pendant son séjour à Salzbourg chez Stefan Zweig pendant l'été de 1921.

Les Poèmes, de Mystérieuses noces à Matière céleste

Les poèmes publiés par Jouve dans la période 1925-1937 ont pu être considérés comme un des plus hauts sommets de la poésie française du xxe siècle — comme en témoigne cette lettre de René Char :« la poésie vous devra des sommets égaux à ceux de Hölderlin et de Rimbaud ou cette déclaration d'Yves Bonnefoy : « Pierre Jean Jouve est un des grands poètes de notre langue. La publication de ces poèmes est complexe, car ils sont souvent publiés en revues et de façon partielle, c'est-à-dire en plaquettes ou en minces volumes, puis regroupés en volumes collectifs. Certains de ces recueils contiennent des textes théoriques historiquement très importants la postface des Noces, l'Avant-propos de Sueur de Sang, la préface de la seconde édition du Paradis perdu, tous réédités en 1950 dans Commentaires. On peut distinguer deux périodes.

Les Noces et Le Paradis perdu

De 1925 à 1931, Jouve relit notamment Baudelaire; il découvre aussi les mystiques (Thérèse d'Avila, Jean de la Croix, François d'Assise, Catherine de Sienne, et il traduit les poèmes de la folie de Hölderlin. L'influence de ces lectures traverse Les Noces et Le Paradis perdu qu'il faudrait lire en parallèle aux romans Paulina 1880 et Le Monde désert : Les Noces, 1925-1931. La publication de la plaquette Mystérieuses Noces en 1925 chez Stock a été suivie par Nouvelles Noces en 1926 chez Gallimard. Le premier recueil Noces en 1928 au Sans Pareil, reprend les deux plaquettes précédentes et annonce dans une importante Postface, sa rupture avec son œuvre antérieure à 1925: " ... surtout pour le principe de la poésie, le poète est obligé de renier son premier ouvrage. Paris, février 1928." En 1930 paraît Symphonie à Dieu avec une gravure de Joseph Sima. En 1931 Jouve regroupe toutes ces publications dans un volume collectif chez Gallimard, Les Noces. Les poèmes de cet ensemble développent plusieurs grands thèmes. Celui de la conversion qui doit être à la fois poétique et spirituelle. Le thème de la rupture qui, simultanément, libère des prisons morales et matérielles, mais qui entraîne des souffrances dues à l'abandon d'une première vie. Le thème du sentiment de la faute à cause de la présence de la culpabilité au sein du plaisir. Jouve y développe petit à petit une écriture musicale qui englobe les apports des grands écrivains mystiques et des grands poètes symbolistes, ses précurseurs revendiqués. Le Paradis perdu, 1929-1938. En parallèle aux Noces, Jouve écrit et publie Le Paradis perdu en 1929 chez Grasset. Le poète souhaitait que ce livre soit illustré par des gravures de Joseph Sima, ce qui sera fait en 1938 seulement, chez GLM. Cette deuxième édition est augmentée d'une préface-manifeste, La Faute.

[size=SIZE]Sueur de Sang et Matière céleste
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De 1933 à 1937, la poésie de Jouve prend une tournure particulière du fait de son compagnonnage avec la psychanalyste Blanche Reverchon. Il approfondit ainsi sa connaissance de la pensée freudienne. Cette forme poétique est emplie de heurts et de rupture. Sueur de Sang, regroupant des poèmes des années 1933-1935, avec l'avant-propos Inconscient, Spiritualité et Catastrophe a connu trois éditions successives, fortement augmentées à chaque fois 1933 et 1934 aux Cahiers libres, et 1935 chez Gallimard. Matière céleste, 1936-1937. En 1936, Jouve publie deux plaquettes partielles chez GLM, Hélène et Urne avec un dessin de Balthus qui seront reprises et complétées par trois autres sections Nada, Matière céleste et Récitatif dans Matière céleste en 1937 chez Gallimard.
De 1963 à 1967, Jouve rééditera toutes ses œuvres poétiques Mercure de France. Il les modifiera (coupures parfois importantes dans Les Noces, Sueur de sang et Matière céleste. Ce sont ces versions qu'on trouve aujourd'hui en livres de poche Poésie/Gallimard. Dans son édition de Œuvre en 1987 Mercure de France, Jean Starobinski donne en notes les textes retranchés.

De 1938 à 1946 :

L’annonce de la Catastrophe, la poésie résistante apocalyptique contre le nazisme, Baudelaire, la musique

Dès le début des années 1930, Pierre Jean Jouve a senti la montée des périls en Europe, sans doute parce qu'il connaissait bien l'Italie et Salzbourg : il était l'ami d'Arturo Toscanini et de Bruno Walter, et il a vu l'arrivée des fascistes dans la cité de Dante et celle des nazis dans la cité de Mozart. Si la nouvelle édition du Paradis perdu avec des gravures de Joseph Sima est l'aboutissement d'un travail de 10 ans, sa nouvelle préface La Faute reprend la thématique de l'Avant-Propos de Sueur de Sang : la pulsion de mort, que Jouve a découverte chez les individus grâce à sa lecture de Freud importance du rôle de son épouse Blanche Reverchon dans cette aventure, est élargie à la destinée tragiques des peuples. Cette thématique qui mêle aventure existentielle et spirituelle avec une vision apocalyptique de l'histoire de l'Europe se retrouve dans le quatrième recueil de poèmes, Kyrie Gallimard, 1938. Les poèmes introspectifs de la section "Kyrie" y voisinent avec les poèmes visionnaires des "Quatre cavaliers". Ses prises de position politique se retrouvent aussi bien dans ses chroniques musicales — voir dans l'article Le dernier concert de la Paix NRF, décembre 1939 l'affrontement entre Arturo Toscanini et Wilhelm Furtwaengler accusé de faire carrière en dirigeant Beethoven devant un public spécial — que dans des poèmes ouvertement anti-hitlériens : L'Ode au Peuple chez GLM, mars 1939 sera intégrée dans le triptyque À la France 1939, publiée par Jean Paulhan en ouverture de la NRF du 1er février 1940. En 1940, durant l'exode, Jouve fuit Paris. Il entend l'appel du 18 Juin du général De Gaulle, vit quelques mois dans le Sud de la France Dieulefit, puis c'est l'exil en Suisse où il restera toute la guerre. Il y participera activement aux publications suisses Cahiers du Rhône, "Le Cri de la France" de la LUF qui défendent la culture française résistant à l'oppression du régime de Vichy et à l'occupation allemande : son Défense et Illustration de 1943 "défend et illustre" des artistes révolutionnaires français, de Delacroix à Courbet. Un recueil de poèmes comme Gloire est engagé sur un chemin spirituel et sur un terrain politique. Gloire 1940 et 1942 : les grands poèmes de Gloire sont à l'origine de la considération de Jouve par ses contemporains comme "témoin" et "prophète" annonçant la guerre. En 1947, Jean Paulhan et Dominique Aury ont écrit : "Ses poèmes Kyrie, Résurrection des Morts et À la France ont laissé pressentir la catastrophe". Ses sections, Tancrède, Résurrection des Morts, La Chute du Ciel et Catacombes, ont été écrites juste avant ou juste au début de la Seconde Guerre mondiale. La Vierge de Paris de 1946 est une cathédrale dont les chapelles les sections reprennent les précédents recueils publiés un peu avant la guerre, comme certaines parties de Gloire, puis pendant la guerre : Porche à la Nuit des Saints 1941, Vers majeurs 1942 et La Vierge de Paris, plaquette de 1944 dont le volume de 1946 reprend le titre. Le recueil associe des poèmes sur la réflexion mystique de Jouve thème du "Nada", sur ses relations avec les figures féminines et sur la pulsion de mort. Celle-ci est à l'œuvre dans le désastre collectif qu'est la guerre engagée par le nazisme : Ces poèmes conçus et écrits pendant le temps d'apocalypse, pour libérer l'âme, sont aussi des signes de la résistance française à un accablant ennemi prière d'insérer du volume de 1946. La guerre a aussi été pour Jouve le temps de l'écriture de grands recueils de textes critiques : sur la littérature, voir son Tombeau de Baudelaire, mais aussi sur la peinture et la musique, comme dans Le Don Juan de Mozart 1942. Le grand recueil Défense et Illustration montre l'étendue de ses champs de réflexion éthiques et esthétiques poésie, peinture, musique.

De 1946 à 1965 : art, musique et poésie intérieure

Diadème Minuit, 1949
Commentaires La Baconnière, 1950
Ce recueil regroupe les principaux textes théoriques publiés par Jouve, en accompagnement de ses romans ou ses poèmes, ou en revues, et devenus souvent introuvables. Certains sont historiquement très importants, comme l'Avant-propos de Sueur de Sang 1933-1934 qui marque une théorisation de l'arrivée de la psychanalyse dans la plus haute poésie. D'autres textes, à propos de la musique en particulier, nous rappellent que Jouve a été un écrivain participant précocement à la Résistance intellectuelle contre le nazisme.
Ode Minuit, 1950
Langue ed. de l'Arche, avec trois lithographies de Balthus, André Masson, Joseph Sima 1952; rééd. Mercure de France,
Wozzeck ou le nouvel Opéra, avec Michel Fano Plon, 1953
En Miroir Mercure de France, 1954
En Miroir est sous-titrée Journal sans date : Jouve y présente sa trajectoire artistique et spirituelle en la liant à un petit nombre de faits biographiques soigneusement choisis. Jouve a choisi de rompre avec sa première œuvre d'avant 1925, et il a souvent rompu avec ses proches : ce "journal sans date", écrit dans une langue somptueuse et percutante, illustre donc ses choix très aigus.
René Micha, Pierre Jean Jouve : parution en 1956 du premier ouvrage de référence sur l'écrivain dans la collection Poètes d'aujourd'hui des éditions Pierre Seghers.
Lyrique Mercure de France, 1956
Mélodrame Mercure de France, 1957
Tombeau de Baudelaire Le Seuil, 1958
Ce volume intitulé comme un petit livre de 1942, est en fait une nouvelle édition de Défense et Illustration. Il contient le Tombeau de Baudelaire, son essai sur le maître que s'est choisi Jouve, dans une version entièrement réécrite et trois textes sur des artistes aimés de Jouve : Delacroix, Meryon, Courbet.
Invention Mercure de France, 1959
Proses Mercure de France, 1960
À 73 ans, Jouve relève le défi de succéder à Baudelaire en publiant un recueil de poèmes en prose dont certains sont proches des contes à la façon de Poe. Il y revisite l'ensemble de ses thématiques exergue : La voix, le sexe et la mort. Dans son style somptueusement imagé et subtilement dissonant, il nous offre de nouveaux portraits de ses mythes féminins Retour chez Hélène, Coffre de fer, La Capitaine, La douce visiteuse.
Moires Mercure de France, 1962
Ténèbre Mercure de France, 1965

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Posté le : 09/10/2015 21:13
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Pierre-Jean Jouve 2
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De 1925 aux années 1960

Paulina 1880, Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française 1925
Mystérieuses Noces, Stock 1925
Nouvelles Noces, Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française avec un portrait par Joseph Sima
Le Monde désert, Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française 1927
Beau Regard, avec des gravures de Joseph Sima, Paris, Au Sans Pareil 1927
Noces, Paris, Au Sans Pareil, 1928, reprend Mystérieuse Noces et Nouvelles Noces
Hécate, Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française 1928
Paradis perdu, Paris, Grasset, 1929
Symphonie à Dieu, avec un frontispice de Joseph Sima,Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française 1930
Vagadu, Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française 1931
Œuvres poétiques, Les Noces, collectif, reprend Noces et Symphonie à Dieu, Éditions de la Nouvelle Revue française 19
Histoires sanglantes, Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française 1932
Sueur de Sang, Paris, Cahiers libres, avec une gravure d'André Masson 1933 et l'avant propos "Inconscient, Spiritualité et Catastrophe"
Sueur de Sang, réédition très complétée, Paris, Cahiers Libres 1934
Œuvres poétiques, Sueur de Sang, nouvelle édition, Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française 1935
La Scène capitale, Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française 1935
Hélène, Paris, GLM 1936
Urne, Paris, GLM, 1936 avec un dessin de Balthus
Œuvres poétiques, Matière céleste, Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française 1937, contient Hélène et Urne
Paradis perdu, réédition, Paris GLM, en 1938 avec la préface "La Faute" et 12 gravures de Joseph Sima
Kyrie, plaquette avec des lettrines de Joseph Sima, GLM 1938
Œuvres poétiques, Kyrie, recueil collectif, Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française 1938
Ode au Peuple - 1939, Paris, GLM 1939
Résurrection des Morts, Paris, GLM 1939
A la France - 1939, Poème, Nouvelle Revue Française, 1er février 1940
Gloire, Dijon, Édition hors commerce,1940
Porche à la Nuit des Saints, Neuchâtel, Ides et Calendes 1941
Le Don Juan de Mozart, Librairie universitaire de Fribourg, LUF, Egloff 1942
Vers majeurs, Librairie universitaire de Fribourg, LUF, Egloff 1942
Tombeau de Baudelaire, Neuchâtel, La Baconnière 1942
Gloire, Alger, collection "Fontaine" dirigée par Max-Pol Fouchet, Edmond Charlot éditeur, 1942
Défense et Illustration, Neuchâtel, Ides et Calendes 1943, comprend Tombeau de Baudelaire
Les Témoins - Poèmes choisis de 1930 à 1942, Neuchâtel, Les Cahiers du Rhône, La Baconnière 1943
Le Bois des Pauvres, Librairie Universitaire de Fribourg, LUF, Egloff 1944
La Vierge de Paris, Librairie Universitaire de Fribourg, LUF, Egloff 1944
Gloire 1940, Librairie Universitaire de Fribourg, LUF, Egloff 1944 reprend Gloire et Porche à la Nuit des Saints
Processionnal de la Force anglaise, Librairie universitaire de Fribourg, LUF, Egloff 194
L'Homme du 18 Juin, Librairie universitaire de Fribourg, LUF, Egloff 1945
A une Soie, Librairie universitaire de Fribourg, LUF, Egloff 1945
La Louange, Librairie universitaire de Fribourg, LUF, Egloff 1945
La Vierge de Paris Paris, Librairie universelle de France, LUF, Egloff 1946, reprend Gloire 1940, Vers majeurs et la Vierge de Paris. Repris sous une nouvelle couverture au Mercure de France, 1957.
Défense et Illustration, Alger, Edmond Charlot, nouvelle édition 1946
Le Quartier de Meryon 1946
Hymne, Paris, Librairie universelle de France, LUF, Egloff 1947, reprend Louange
Aventure de Catherine Crachat, Paris, Librairie universelle de France, LUF, Egloff 1947, rééd. en un volume de Hécate et Vagadu
Histoires sanglantes, Paris, Librairie universelle de France, LUF, Egloff 1948, rééd. en un volume des Histoires sanglantes et de La Scène capitale
Génie, GLM, Paris, 1948.
Diadème, Paris, Éditions de Minuit 1949
Commentaires, Neuchâtel, La Baconnière 1950
Ode, Paris, Éditions de Minui
Langue, Éditions de l'Arche, avec trois lithographies de Balthus, André Masson, Joseph Sima 1952; réédition Paris, Mercure de France 1954
Wozzeck ou le nouvel Opéra, Librairie Plon 1953, avec Michel Fano
En Miroir, Paris, Mercure de France 1954
Lyrique, Paris, Mercure de France 1956
Mélodrame, Paris, Mercure de France 1957
Invention, Paris, Mercure de France 1959
Proses, Paris, Mercure de France 1960
Moires, Paris, Mercure de France 1962
Ténèbre, Paris, Mercure de France 1965

Traductions

Poèmes de la Folie de Hölderlin, traduction de Pierre Jean Jouve avec la collaboration de Pierre Klossowski ; avant propos de Bernard Groethuysen, Fourcade, 1930 ; Gallimard, 1963.
La Tragédie de Roméo et Juliette de Shakespeare, traduction de Pierre Jean Jouve et Georges Pitoëff, Gallimard, 1937, revue en 1955 pour le Club français du livre in Œuvres complètes de Shakespeare dirigées par Pierre Leyris et Henri Evans, tome 3.
Sonnets de Shakespeare, version française par Pierre Jean Jouve, Le Sagittaire, puis Club français du livre, 1955.
Les Trois Sœurs, de Tchekhov, texte français de Pierre Jean Jouve, Georges et Ludmilla Pitoëff, in Théâtre de Tchekhov, Denoël, 1958.
Poèmes de Giuseppe Ungaretti, traduction de Pierre Jean Jouve, All’insegna dei Pesce d’Oro, Milan, 1959.
Macbeth de Shakespeare, 1959, Club français du livre in Œuvres complètes de Shakespeare dirigées par Pierre Leyris et Henri Evans, tome 9.
Othello de William Shakespeare, Traduction de Pierre Jean Jouve, Mercure de France, 1961.
Lulu, de Frank Wedekind, version française et adaptation par Pierre Jean Jouve, L'Âge d'Homme, 1969.

À partir de 1958,

réédition des romans et des recueils de poèmes

À partir de 1958, Jouve réédite son œuvre, principalement au Mercure de France : cette réédition est en fait une sorte de nouvelle écriture, non pas par des modifications des textes elles sont rares, mais par de nombreuses suppressions de poèmes, voire de sections entières pour les livres de poésie ; de chapitres pour certains romans. Le cas le plus flagrant concerne ses poésies du temps de la guerre La Vierge de Paris On peut donc considérer qu'il s'agit pour Jouve d'une nouvelle rupture et de la marque de son désir de maîtrise sur son œuvre et sur l'image qu'il veut en donner. Ces coupes modifient souvent la signification des œuvres écrites trente ou quarante ans plus tôt période 1925-1937. L'édition de Œuvre par Jean Starobinski donne de nombreux textes retranchés.

Préfaces

Avant-propos à La Colombe de Pierre Emmanuel, Fribourg, LUF, 1943,
.
Jouve traducteur

Pierre Jean Jouve est l'auteur, avec Georges Pitoëff, d'une des traductions de référence en français de Roméo et Juliette de William Shakespeare et aussi des traductions suivantes:
Macbeth Shakespeare
Othello Shakespeare
Sonnets Shakespeare
Poèmes de la Folie de Hölderlin
Les trois SÅ“urs Tchekhov
Lulu Wedekind

Bibliographie : Autres œuvres et éditions de Pierre Jean Jouve

Avant 1925

Artificiel, Frontispice d'Albert Gleizes, imprimé par L. Linard à 7 exemplaires 1909
Les Muses romaines et florentines, Paris, Léon Vannier1910
Les Ordres qui changent, Paris, Eugène Figuière 1911
La Rencontre dans le carrefour, Paris, Eugène Figuière 1911
Les aéroplanes, Paris, Eugène Figuière 1911
Présences, Paris, Georges Crès 1912
Les deux forces, pièce de théâtre en quatre actes, Paris, Éditions de l'Effort libre 1913
Parler, Paris, Georges Crès 1913
Vous êtes des Hommes, Paris, Éditions de la Nouvelle Revue Française 1915
Poème contre le grand crime, Genève, Éditions de la Revue Demain 1916
Danse des Morts, Genève, Édition des Tablettes 1917 et La Chaux-de-Fonds, Action sociale 1918
A la Révolution russe, collectif, Genève, Éditions de la Revue Demain 1918
Hôtel-Dieu, récits d'Hôpital en 1915, avec 25 bois gravés par Frans Masereel, Genève, par les auteurs 1918, et Paris, Librairie Ollendorf, 1919.
Le défaitisme contre l'homme libre, La Chaux-de-Fonds, Action sociale 1918
Heures, Livre de la Nuit, Genève, Éditions du Sablier, 1919
Heures, Livre de la Grâce, Genève, Librairie Kundig 1920
Les Poètes contre la Guerre, collectif Romain Rolland, Georges Duhamel, Charles Vildrac, bois gravé de Frans Masereel, etc., Genève, Éditions du Sablier, 1920.
Romain Rolland vivant, 1914-1919, Paris, Librairie Ollendorf 1920
Toscanes, Genève, Librairie Kundig 1921
Tragiques suivi de Voyage sentimental, Paris, Stock, 1922
Prière, portrait gravé par Frans Masereel, Paris, Stock 1924

Traductions

Cygne de Rabindranath Tagore, traduction du Bengali par Kâlidâs Nâg et Pierre Jean Jouve, portrait gravé par Frans Masereel, coll. Poésie du temps 1923.
Les Sept Mers de Rudyard Kipling, traduction de l'anglais par Maud Kendall et Daniel Rosé, portrait gravé par Joseph Sima, coll. Poésie du temps, Librairie Stock, 1924. "Daniel Rosé" est le pseudonyme de Pierre Jean Jouve.

Après

Tombeau de Baudelaire, Paris, Le Seuil 1958, nouvelle édition de Défense et Illustration, le texte du Tombeau de Baudelaire est entièrement réécrit.
Paulina 1880, Mercure de France, 1959
Le Monde désert, Mercure de France, 1960
Aventure de Catherine Crachat I, Hécate, Mercure de France, 1961
La Scène capitale, Mercure de France, 1961, comprend Histoires sanglantes et La Scène capitale.
Aventure de Catherine Crachat II, Vagadu, Mercure de France, 1963
Poésie*, 1925-1938, I Les Noces, II Sueur de Sang, III Matière céleste, IV Kyrie, Mercure de France, 1964
Poésie**, 1939-1947, V La Vierge de Paris, VI Hymne, Mercure de France, 1965
Le Paradis perdu, Grasset, 1966
Poésie***, 1939-1947, VII Diadème, VIII Ode, IX Langue, Mercure de France, 1966
Poésie****, 1939-1967, X Mélodrame, XI Moires, Mercure de France, 1967
Le Don Juan de Mozart, Plon 1968, avec un avant-dire de P. J. Jouve.

Éditions posthumes

Pierre Jean Jouve avait interdit la réédition de ses œuvres antérieures à 1925, et il avait donné à la fin de sa vie de nouvelles versions de ses œuvres d'après 1925 qui les modifiaient sensiblement. La lecture moderne des écrivains recherche au contraire des informations très précises sur l'évolution littéraire et intellectuelle des grands auteurs. L'édition des deux volumes de Œuvre par Jean Starobinski a permis d'accéder à de nombreux textes retranchés. Il manque un troisième volume (qui aurait dû paraître) principalement consacré aux textes critiques : les rééditions par Christian Bourgois et Fata Morgana donnent accès à certains d'entre eux.
Œuvre I, Paris, Mercure de France, 1812 p., 1987. Texte établi et présenté par Jean Starobinski, avec une note de Yves Bonnefoy et pour les textes inédits la collaboration de Catherine Jouve et de René Micha.
Œuvres II, Paris, Mercure de France, 2224 p., 1987. Texte établi et présenté par Jean Starobinski, avec une note de Yves Bonnefoy et pour les textes inédits la collaboration de Catherine Jouve et de René Micha.
Paradis perdu, Pandora, 1978, Fata Morgana, 1985.
Génie, Fata Morgana, 1983.
Folie et génie, introduction par Daniel Leuwers, Fata Morgana, 1983.
Sacrifices, Fata Morgana, 1986.
Apologie du poète, suivi de Six lectures, Fata Morgana/Le Temps qu'il fait, 1987.
Beau Regard, Fata Morgana, 1987, avec les illustrations de Joseph Sima.
Le Don Juan de Mozart, Christian Bourgois, 1993, 2004.
Wozzeck d'Alban Berg, avec Michel Fano, Christian Bourgois, 1999.
Lettres à Jean Paulhan - 1925-1961, Édition établie, préfacée et annotée par Muriel Pic, Paris, Éditions Claire Paulhan, 2006
Tombeau de Baudelaire, Fata Morgana, 2006.

Traductions

Saint François d'Assise, Cantique du Soleil; Sainte Thérèse d'Avila, Glose sur le Pater, traductions de Pierre Jean Jouve, Fata Morgana, 1987.

Livres de Pierre Jean Jouve publiés en poche

Les lecteurs de Jouve ont accès à ses œuvres les plus célèbres de la période 1925-1937 par des rééditions en collections de poche. Mais il faut savoir que les textes sont ceux des rééditions tardives au Mercure de France.
Paulina 1880, livre de poche, 1964; Folio, 1974.
Wozzeck d'Alban Berg, avec Michel Fano, 10/18, 1964.
Les Noces, suivi de Sueur de Sang, préface de Jean Starobinski, poésie/Gallimard, 1966.
Le Monde désert, livre de poche, 1968; L'Imaginaire, Gallimard, 1992.
En miroir, 10/18, 1972.
Hécate, suivi de Vagadu, collection L'Imaginaire, Gallimard, décembre 2010. Cette édition se substitue à :
Aventure de Catherine Crachat I, Hécate, Folio, 1972.
Aventure de Catherine Crachat II, Vagadu, Folio, 1989.
La Scène capitale, L'Imaginaire, Gallimard, 1982.
Diadème, suivi de Mélodrame, Poésie/Gallimard, 1970; nouvelle éd. 2006.
Dans les Années profondes - Matière céleste - Proses, Présentation de Jérôme Thélot, Poésie/Gallimard, 1995.

Traductions

Shakespeare, Roméo et Juliette, avec Georges Pitoëff, GF-Flammarion, 1992.
Shakespeare, Macbeth, GF-Flammarion, 1993.
Shakespeare, Sonnets, Poésie/Gallimard, 1975.

Å’uvres de Pierre Jean Jouve dans d'autres langues

Die leere Welt, Aus dem Französischen von Friedhelm Kemp, Stuttgart, Klett Cotta Verlag, 1982.
Hecate: The Adventure of Catherine Crachat: I, traduit par Lydia Davis, Marlboro Press, 1997.
Il "Don Giovanni" di Mozart, Adelphi, 2001.
Loucura e gênio, Hiena Portugal, 1991.
Paulina 1880, Einaudi, 1997.
Poesie, antologia poetica, Mondadori, 2001.
Poesía, selección, traducción y prólogo de Federico Gorbea, Buenos Aires, Fausto, 1974.
The Desert World, traduit par Lydia Davis, Marlboro Press, 1996.
Vagadu: The Adventure of Catherine Crachat: II, traduit par Lydia Davis, Marlboro Press, 1997.

Bibliographie : Études sur Pierre Jean Jouve

Pierre Jean Jouve n'est pas très connu du grand public, mais son importance a été reconnue par divers écrivains, poètes et critiques, de différentes générations. Afin de distinguer les approches, la bibliographie critique sur Jouve distingue les livres écrits par des Témoins, c'est-à-dire par des auteurs qui ont connu Jouve et qui ont souvent été ses amis d'avec les livres écrits par des auteurs qui ne l'ont pas connu personnellement. Certains livres collectifs sont difficiles à classer, car s'y mêlent études distanciées et témoignages personnels.

Livres écrits par des témoins

Balthus, Correspondance amoureuse avec Antoinette de Watteville 1928-1937, Buchet-Chastel, 2001
Henry Bauchau, La Déchirure, Paris, Gallimard, 1966: Bruxelles, Labor, 1986 et 1998.
Henry Bauchau, La grande Muraille, Journal de la Déchirure 1960-1965, Arles, Actes Sud, 2005.
Albert Béguin, Quatre de nos poètes, Alger, revue Fontaine, juin 1942, rééd. in Création et destinée II - La Réalité du rêve, édité par Pierre Grotzer, préface de Marcel Raymond, Paris, Seuil, 1974.
Gabriel Bounoure, Pierre Jean Jouve entre abîme et sommets, Fata Morgana, 1989, avec la correspondance entre Pierre Jean Jouve et Gabriel Bounoure.
Joë Bousquet, Lumière, infranchissable pourriture et autres essais sur Jouve, Fata Morgana, 1987.
Martine Broda, Jouve, Lausanne, L'Age d'Homme, 1981.
Balthus sous la direction de Jean Clair, Flammarion, 2008.
Georges-Emmanuel Clancier, Panorama critique de Rimbaud au Surréalisme, Paris, Seghers, 1953.
André Delons, Au Carrefour du grand Jeu et du Surréalisme, textes polémiques et artistiques réunis et présentés par Odette et Alain Virmaux, Rougerie, 1988.
Pierre Emmanuel, Qui est cet Homme, Paris, Librairie Universelle de France, LUF, 1947.
Max-Pol Fouchet, Les Poètes de la Revue Fontaine, Paris, Poésie 1, N° 55-61, septembre-novembre 1978.
Sigmund Freud, Trois essais sur la théorie de la sexualité, éditions de la Nouvelle Revue française, Documents bleus N° 1, 1923, traduction par B. Reverchon-Jouve, travail fait avec Bernard Groethuysen; rééd. Gallimard, 1962; Collection Idées, 1971.
Léon-Gabriel Gros, Poètes contemporains, Les Cahiers du Sud, 1944.
Pierre Klossowski, Tableaux vivants, Paris, Le Promeneur, 2001.
Robert Kopp et Dominique de Roux : Pierre Jean Jouve, Cahiers de l'Herne, 1972. Textes, lettres et témoignages : Jean Starobinski, Giuseppe Ungaretti, Pierre Emmanuel, Yves Bonnefoy, André Pieyre de Mandiargues, Jules Romains, Jean Paulhan, Rainer Maria Rilke, Freud, Heinrich Mann, Valery Larbaud, Roger Martin du Gard, Max Jacob, André Gide, René Char, Gaston Bachelard, S. Corinna Bille, Henri Bauchau, Jules Roy, Jean Cassou, Michel Fano, Jean Amrouche, Martine Broda, François Lallier, René Micha, Dominique de Roux, Christiane Blot-Labarrère, Robert Abirached, Marcel Raymond, Pierre Klossowski, Denis Roche.
Daniel Leuwers, Jouve avant Jouve ou la naissance d'un poète, Paris, Klincksieck, 1984.
Daniel Leuwers, Pierre Jean Jouve, revue Europe N° 543-544, La Poésie et la Résistance, juillet-août 1974.
René Micha, L'Œuvre de Pierre Jean Jouve, Bruxelles, Les Cahiers du Journal des poètes, 1940.
René Micha, Pierre Jean Jouve, Paris, Poètes d'Aujourd'hui, Seghers, 1956.
Louis Parrot, L'Intelligence en Guerre, Paris, La jeune Parque, 1945; rééd. Paris, Le Castor astral, 1990.
Jean Paulhan et Dominique Aury, La Patrie se fait tous les Jours, textes français 1939-1945, Paris, Éditions de Minuit, 1947.
Marcel Raymond, De Baudelaire au Surréalisme - Essai sur le Mouvement poétique contemporain, Paris, Éditions Corréa, 1933; rééd. Paris, José Corti,1940.
Pierre Seghers, La Résistance et ses poètes, Paris, Seghers, 1974, rééd. 2004.
Jean Starobinski, Paul Alexandre, Marc Eigeldinger : Pierre Jean Jouve poète et romancier, Neuchâtel, A la Baconnière, 1946.
Jean Starobinski, La Douce Visiteuse. Pages retrouvées et textes inédits de Pierre Jean Jouve, La Nouvelle Revue française N° 417, Paris, 1er octobre 1987.
Jean Starobinski, La Poésie et la Guerre - Chroniques 1942-1944, Carouge-Genève, Mini Zoe, 1999.
Henry Bauchau, Pierre et Blanche, souvenirs sur Pierre Jean Jouve et Blanche Reverchon, Arles, Actes Sud, 2012.

Ouvrages Collectifs

Pierre Jean Jouve, Les Cahiers du Sud N° 182, Marseille, avril 1936, avec des articles de Joe Bousquet, Robert Guiette et Roger Bastide.
De la poésie comme exercice spirituel, Revue Fontaine N° 19-20, Alger, mars-avril 1942, rééd. Paris, Le Cherche midi, 1978 avec une préface de Max-Pol Fouchet.
Pierre Jean Jouve, La Nouvelle Revue française Paris, 1er mars 1968, avec des textes de Giuseppe Ungaretti, Jean Starobinski, Jean Cassou, Henry Amer, René Micha, André Marissel, Dominique Noguez.
Pierre Jean Jouve et l'Italie, une rencontre passionnée, par Wanda Rupolo, Roma 2007, Edizioni di Storia et Letteratura. Contient des entretiens et des témoignages : Mario Luzi, André Orsini, Nelo Risi, Dianella Selvatico Estense, Christiane Blot-Labarrère.

Études sur Jouve

Christiane Blot-Labarrère, Relation de la faute de l'éros et de la mort dans l'œuvre romanesque de Pierre Jean Jouve, Aix-en-Provence, La Pensée universitaire, 1961.
Béatrice Bonhomme, Jeux de la psychanalyse - initiation, images de la femme dans l'écriture jouvienne, Paris, archives des lettres modernes, 1994.
Béatrice Bonhomme, Pierre Jean Jouve ou la quête intérieure, Paris, Éditions Aden, 2008.
Benoît Conort, Pierre Jean Jouve - Mourir en poésie, Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2002
Jean Decottignies, Pierre Jean Jouve romancier ou l'expérience de l'abîme, Paris, José Corti, 1994.
Adrien Le Bihan, Le Général et son double. De Gaulle écrivain, Flammarion, 1996. Voir aussi : Pierre Jean Jouve et De Gaulle, Esprit, novembre 1990.
Adrien Le Bihan, De Gaulle écrivain un chapitre traite des rapports entre Charles de Gaulle et Pierre Jean Jouve), Fayard/Pluriel, 2010 .
Alain Marc, Écrire le cri,Sade, Jouve, Bataille, Maïakovski, Mansour, Giauque, Venaille, Laâbi, Calaferte, Noël, Guyotat…, préface de Pierre Bourgeade, l’Écarlate, 2000.
Alain Paire, Chronique des Cahiers du Sud 1914-1966, Paris, IMEC éditions, 1993.
Muriel Pic, Pierre Jean Jouve. Le désir monstre, Paris, Le Félin, 2006.
Lauriane Sable, Pierre Jean Jouve, une poétique du secret, Étude de Paulina 1880, L'Harmattan, Décembre 2008.
Suzanne Sanzenbach, Les Romans de Pierre Jean Jouve, Vrin, Paris, 1972.
Pierre Silvain, Passage de la morte - Pierre Jean Jouve, L'Escampette Éditions - Essai, 2007.
Élisabeth Roudinesco, Histoire de la psychanalyse en France.2., Paris, Seuil, 1986.
Franck Venaille, Jouve l'Homme grave, Paris, jeanmichelplace/poésie, 2004.

Ouvrages collectifs

Bousquet Jouve Reverdy, Colloque Poésie-Cerisy, direction Charles Bachat, Daniel Leuwers, Étienne-Alain Hubert, revue Sud, Marseille, 1981.
Série Pierre Jean Jouve La Revue des Lettres modernes, Paris-Caen, éditée de 1981 à 1987 par Daniel Leuwers, et depuis 1987, par Christiane Blot-Labarrère. Jouve 3, Jouve et ses curiosités esthétiques, 1998. Jouve 4, Jouve et ses curiosités esthétiques 2, 1992. Jouve 5, Jouve et les jeux de l’Écriture, 1994. Jouve 6, Jouve et les jeux de l’Écriture 2, 2001. Jouve 8, Modernité de Jouve, 2006.
Pierre Jean Jouve, revue nord' N° 16, Lille, décembre 1990.
Jouve, revue l'Autre, Paris, 1992, dirigé par François Xavier Jaujard avec la collaboration de Robert Bensimon.
Pierre Jean Jouve, sous la direction de Christiane Blot-Labarrère et Béatrice Bonhomme, Actes du colloque international Pierre Jean Jouve, Université de Nice, 24-26 novembre 1994, Arras, Éditions Roman 20/50, 1996.
Jouve poète, romancier, critique, Colloque de la Fondation Hugot du Collège de France réuni par Yves Bonnefoy. Actes rassemblés par Odile Bombarde, Lachenal et Ritter, 1995.
L'Unanimisme et l'Abbaye, revue in'hui, Bruxelles-Paris, 1996, Le Cri et Jacques Darras.
Relecture de Pierre Jean Jouve, Nice, revue NUe, coordonnée par Béatrice Bonhomme, Hervé Bosio, Giovanni Dotoli, François Lallier.N° 28, 2003, avec un entretien avec Yves Bonnefoy. N° 30, 2005, avec un entretien avec Salah Stétié.
Pierre Jean Jouve, revue Europe N° 907-908, novembre 2004.
Pierre Jean Jouve et Henry Bauchau : les voix de l'altérité, sous la direction de Myriam Watthee-Delmotte et Jacques Poirier, Éditions Universitaires de Dijon, 2006.
Pierre Jean Jouve – Voyage au bout de la psyché, L'Atelier du Roman N°56, numéro conçu par Philippe Raymond-Thimonga et dirigé par Lakis Proguidis, éditions Flammarion et Boréal, Décembre 2008.
Jouve, poète européen, Cahiers Pierre Jean Jouve, N° 1, textes réunis par Béatrice Bonhomme et Jean-Yves Masson, Éditions Calliopées, 2009. Actes des Colloques "Jouve" de la Sorbonne 2006 et Saorge 2007.
Intégrités et transgressions de Pierre Jean Jouve, Cahiers Pierre Jean Jouve, N° 2, textes réunis par Béatrice Bonhomme, Éditions Calliopées, 2010. Actes du Colloque Relectures de Pierre Jean Jouve de Cerisy août 2007.

Films et Documentaires

Paulina 1880 1972, adaptation pour le cinéma par Jean-Louis Bertuccelli, avec Romolo Valli, Michel Bouquet, Maximilian Schell, Olga Karlatos, Eliana De Santis, Sami Frey.
Le Monde désert 1985, adaptation pour la télévision par Pierre Beuchot et Jean-Pierre Kremer.
Pierre Jean Jouve, court-métrage documentaire 1989 réalisé par Pierre Beuchot pour la collection "Préfaces", production La Sept/DLL/Archipel 33 26 min..
Aventure de Catherine C, 1990, adaptation pour le cinéma de Hécate et Vagadu par Pierre Beuchot, avec Fanny Ardant, Hanna Schygulla et Robin Renucci.
Robert Kopp et Olivier Mille, Pierre Jean Jouve, film pour la série Un siècle d'écrivains de Bernard Rapp diffusée sur France 3, 1996. Lire un commentaire par Magali Jauffret sur le site de l'Humanité

Jugements

Jean Starobinski : Il ne reste aujourd'hui qu'à souligner ce fait trop méconnu : le roman Vagadu 1931, les Histoires sanglantes, La Scène capitale furent, parallèlement aux poèmes de Sueur de sang 1935, les premières œuvres françaises écrites à partir de la psychanalyse - de la pensée freudienne à la fois pleinement comprise et librement retravaillée, Jean Starobinski, préface à La Scène capitale, Gallimard, 1982.
Jacques Lacan : Ces yeux deux fois posés avec une rigueur singulière ôtent tout sens aux questions d'esthète qu'on pose sur votre dette à la psychanalyse : vous avez sa clef tout simplement », Jacques Lacan, lettre du 26 novembre 1962, catalogue de la vente du 5 mars 2007.
André Pieyre de Mandiargues : Et j'étonnerai peut-être quelques-uns en proclamant ici que le poète Jouve est, peut-être avant André Malraux, le premier romancier ou conteur que je choisirais si l'on me demandait une liste de mes préférences parmi ceux dont l'œuvre s'inscrit approximativement dans les vingt ans qui ont déparés les deux guerres ultimes ... Avant les romans de Malraux, pourtant, une œuvre narrative, qui nous paraît aujourd'hui plus moderne et mieux accordée avec l'idée que nous nous faisons de la "littérature", avait crû dans l'obscurité, celle de Pierre Jean Jouve, André Pieyre de Mandiargues, Troisième Belvédère, chapitre "Le roman rayonnant", Gallimard, 1971.
Salah Stétié : J'ai fait mieux que rencontrer Pierre Jean Jouve: je l'ai accompagné de ma présence, plus ou moins effective, sur près de trente ans. Je connaissais l'œuvre de Jouve et j'étais un passionné de cette grande musique qu'on trouve dans ses principaux recueils : Matière Céleste, Noces, Sueur de sang, etc. Je me récitais aussi comme un texte de poésie pure les premières pages de Paulina 1880, à savoir la description de la "chambre bleue"... « Jouve était impressionnant d'acuité et de pureté. On sentait avec force son appartenance au monde spirituel, sa participation intérieure à tout ce qui donne à la parole son poids de vérité et, aussi, sa puissante légèreté lyrique. » Salah Stétié, entretien avec Béatrice Bonhomme et Hervé Bosio, revue NUe N° 3, 1996.
Charles de Gaulle : Merci d'avoir été un interprète de l'âme française pendant ces dernières années, télégramme de Charles de Gaulle, 12 mai 1945, reproduit dans le Cahier de l'Herne, Pierre Jean Jouve, 1972.
Gaëtan Picon : « Ces dernières années ont vu grandir, plus que tout autre, l'œuvre de Pierre Jean Jouve. Sans doute est-ce d'abord la conséquence de sa relation à l'événement historique, auquel elle a su donner les figures du rêve le plus profond. Dès le début, la poésie de Jouve a été dominée par le pressentiment de la catastrophe : nostalgie du "paradis perdu", elle est plus encore prophétie d'un incommensurable malheur. Elle était depuis toujours préparée à saisir dans l'histoire l'incarnation du combat éternel. Aussi un recueil comme La Vierge de Paris est-il l'un des plus beaux recueils de Jouve, et un poème comme La Chute du ciel offre l'alliance exemplaire de choses vues avec un réalisme saisissant le passant "qui prend mesure de sa croix sur le trottoir"et des figures entr'aperçues de la lutte spirituelle. Gaëtan Picon, Panorama de la nouvelle littérature française, nouvelle édition, Gallimard, 1976.

Distinctions

Grand prix national des lettres décerné par le ministère de la Culture en 1962.
Grand prix de poésie de l'Académie française le 19 juin 1966.
Grand-croix de la Légion d'honneur remise par le général de Gaulle.


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Posté le : 09/10/2015 21:11
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Re: Défi de la semaine du 3 au 10 Octobre
Modérateur
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Arielle,
On te pardonne ton retard. L'important c'est de participer.
Elle est bien triste la vie de cette maman. Il était temps de lui redonner le sourire en la fêtant. Priscilla est bien là meilleure pour organiser cela.

Merci

Couscous

Posté le : 09/10/2015 20:59
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Re: Défi du 10 Octobre 2015
Plume d'Or
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Pas mal ton idée Athéna, je rêve déjà. Je vais essayer de participer plus vite que cette semaine, je suis toujours la dernière à publier mon texte. Let's go !

Posté le : 09/10/2015 18:39
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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