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Re: Défi du 27 février 2016
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Ah le grand débat du "D'où venons-nous" ? Des dinosaures ? Des E.T. ?
Toi tu prends le parti du fantastique, c'est original !
Finalement, le problème est toujours le même car on tourne en rond...

Merci Cavalier

Couscous

Posté le : 28/02/2016 14:52
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21/2/16R.Nurse,M.Alfassa,G.caillebotte,A.Nin,C.MarieWidor,A.Bazin,S.Guitry,L.Delibes
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    rose 4

Découvrir BACCHUS  " pour ceux qui aiment "

Texte à l'affiche : " Juvénile jeunesse"  de KJtiti

 rose 6rose 4 rose 6 rose 4    rose 6rose 4rose 71rose 4



Le    21  Février   1894     meurt  Gustave   CAILLEBOTTE

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Le     21      Février    1885     naît     Sacha    
GUITRY
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Le   17   Janvier    2011    meurt     JEAN  DUTOURD

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   * Les bons mots de Grenouille *

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Aujourd'hui Dimanche 21  Février  2016

LIRE , ÉCRIRE, DECOUVRIR


PAGES D'ACCUEIL PRECEDENTES Dans la BIBLIOTHEQUE LIRE ICI 


*Les bons mots de Grenouille

*Vos défis avec notre fidèle Couscous

        
BACCHUS NOUS A QUITTÉ 

Ami poète, ami aimé, notre coeur pleure, ta famille de L'ORée te fera vivre encore et encore ... La beauté de ta plume et la beauté de ton âme resteront pour nous le phare de L'ORée des rêves. Merci ami; merci  d'être venu nous offrir ton talent d'écriture et de vie, merci pour ta tendre présence, nous la gardons comme un trésor.
 

   

ICI  PAS  DÉFORME D'ORTHOGRAPHE


Le   21  Février  1849   naît  
 
Arthur  BAZIN
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Le   21  Février    1844   naît  
Charles-Marie     WIDOR

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Le  21   Février  1876   naît   Mirra    ALFASSA
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Le   21    Février    1903    naît     Anaïs   
NIN
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            ---*ATELIER CONCOURS
*--

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                   dans son nouveau défi 
                                                                                                           
 
      
     




Posté le : 27/02/2016 17:24
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Re: Défi du 27 février 2016
Accro
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Merci couscous pour ce sujet, posté...

Voici ma petite contribution :

Tournis queue ni tête en repère galiléen

" En la queue et en la fin
Gît de coutume le venin "
G. Meurier


Une atmosphère glaciale régnait dans le tribunal, et les paroles y résonnaient un peu. La fée abasourdie par les questions des juges, leur répondait du tac au tac.

Comment ? Non, son grimoire n’attaquait pas la personne du Grand Sorcier. D’ailleurs elle avait obtenu son aval. Pour y faire une présentation objective contradictoire de l’évolution des espèces. D’abord reprendre la doctrine du Continu, comme déclinée dans les Tables Sacrées. Ensuite y exposer aussi ses propres découvertes. Ses derniers travaux. Ses dernières hypothèses.

Non ! C’était un problème politique. La position fragile du Grand Sorcier aboutissait maintenant à la prendre, elle, comme bouc émissaire. Qu’elle eût ici à abjurer ses erreurs sous peine de sanctions cruelles à l’encontre de sa famille. Ses femmes, ses enfants, son bébé encore dans la poche de sa mère, et même ses deux dernières larves marsupiales.

Il le fallait bien...

Alors, oui, elle admettrait que l’on descendît des dinosaures puis des mammifères tous éteints maintenant. Siècles après siècles, par petites touches, continûment.

Que ces deux prétendues grandes extinctions planétaires n’eussent jamais eu lieu. Ni astéroïde catastrophique ni ensuite civilisation démoniaque de mammifères humains anoures.

Elle se rétracta sur tout, et les juges souriaient !

" Eppur si muovevano… Oui… mais ces humains anoures se mordaient pourtant bien la queue " , répétait-elle tout bas en sortant.

"Et… pourtant, ils ne tournaient pas rond…"




Posté le : 27/02/2016 09:46
_________________
Fabricando fit faber est un proverbe de vérité, car il est plutôt rare qu'en poétisant dru on en devienne petit télégraphiste, voire même mannequin de haute couture...
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Pomaré
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Le 28 février 1813 naît Pōmare IV ou Pomaré la Grande

à Paré à Tahiti, elle meurt le 17 septembre 1877 à Tahiti à 64 ans, Monarques de Tahiti elle appartenait à la dynastie tahitienne des Pomare, elle fut reine de Tahiti, Moorea et dépendances de 1827 à 1877, d'abord sous l'influence des missionnaires britanniques, puis sous le protectorat français. Elle est la 4e reine de Tahiti de 1827 à 1877 son prédécesseur est Pōmare III, son successeur Pōmare V.
Son père est Pōmare II, sa mère est la Princesse Teriʻitoʻoterai Tere Moemoe Tamatoa et son conjoint Teariʻinohoraiʻi Tapoa, Tenania Ariʻi Faʻaitea Hiro
Ses enfants sont le Prince Henri Pōmare, le Prince Ariʻiaue Pōmare, Pōmare V, le Prince Tamatoa Pōmare, le Prince Punuariʻi Teriʻitapunui Pōmare, le Prince Teriʻitua Tuavira Joinville Pōmare, son héritier est le Prince Teriʻi Taria Teratane
Elle fut la seule reine régnante de Tahiti ; elle régna pendant 50 ans, le plus long règne de toute l'histoire de Tahiti. Sa sépulture se trouve au cimetière royal d'Arue, à papa'oa


LES POMARÉ

Famille de souverains qui régna sur Tahiti jusqu'à la fin du protectorat et la « cession à la France de la souveraineté sur tous les territoires dépendant de la couronne de Tahiti » 1880.
L'histoire de l'accession des Pomaré au trône se confond avec la période de colonisation européenne dans le Pacifique : à l'origine, chef relativement mineur du district des environs de Papeete, connu plus tard sous le nom de Pomaré Ier 1743 env.-1803, devint l'intermédiaire des navigateurs de passage commerce de porc avec la jeune colonie de Nouvelle-Galles du Sud en Australie et l'hôte des missionnaires. Son fils Tu II Pomaré II, 1780 env.-1821, de son véritable nom Variatoa, par une habile politique de conquête et d'alliances matrimoniales traditionnelles, réussit à s'imposer peu à peu comme l'interlocuteur royal des représentants européens des grandes puissances.
Il embrassa la religion protestante en 1812. Cependant, malgré la promulgation du sévère Code Pomaré en 1819, des troubles continuèrent à se produire, fomentés par des adversaires ou par des chrétiens déçus mouvement millénariste Mamaia.
Après le court règne de Pomaré III 1819-1827, le trône revint à Aïmata la reine Pomaré IV, 1813-1877 qui dut, en 1843, accepter le protectorat français imposé contre les Britanniques. En 1880, la France annexe le royaume de Pomaré pour mettre fin au désordre que l'on attribuait au régime du protectorat et aux intrigues étrangères. La dernière « reine » de Tahiti, Marau Taaroa, est morte en 1934. Jean-Paul Latouche

Sa vie

Nommée Aimata à la naissance, elle est la fille de Pōmare II, roi de Tahiti et de la princesse Teremoemoe Tamatoa, fille de Tamatoa III, roi de Raiatea. Elle devient reine de Tahiti à l'âge de 14 ans, après la mort, en janvier 1827, de son frère Pōmare III.

Les débuts du règne : l'influence britannique

Elle parvient à réunir Bora Bora et une partie de Raʻiatea au royaume de Tahiti.
Dans les premières années, elle semble avoir voulu s'écarter de la religion protestante, devenue officielle sous le règne de Pomare II, en favorisant un culte local, la secte des Mamaia, mais les missionnaires britanniques, s'appuyant sur les autres chefs tahitiens l'obligent à revenir sous leur influence. Dans les années 1830, un rôle essentiel est joué par le pasteur George Pritchard, son principal conseiller. En 1838, elle refuse l'accès de l'île à des missionnaires catholiques, les pères Caret et Laval, membres de l'ordre de Picpus, implanté aux îles Gambier. Cette décision va être l'occasion pour la France d'intervenir dans les affaires tahitiennes.

La France impose son protectorat

La reine Pomaré IV au début de son règne.
Les missionnaires catholiques font en effet appel à l'aide de l'amiral Abel Aubert du Petit-Thouars, qui vient de prendre le contrôle des îles Marquises et décide d'établir le protectorat français sur Tahiti sur les conseils de Jacques-Antoine Moerenhout, consul français local et bon connaisseur de la situation.
Un premier traité est signé en 1842, mais Pomare IV est très réticente et choisit finalement de résister à l'entreprise française ; en 1844, elle se réfugie sur un navire anglais, le Basilisk, puis à Raiatea, et refuse toute négociation de 1844 à 1846, pendant la guerre franco-tahitienne. Après la victoire de l'amiral Bruat, Pomare IV peut revenir à Papeete le 9 février 1847 et reprendre place sur le trône en acceptant le protectorat.
Ce statut lui accorde le pouvoir exécutif mais elle doit partager la plupart des fonctions importantes avec le représentant de la France, alors désigné comme Commissaire royal, puis impérial : convocation de l’assemblée législative, nomination des chefs et des juges de district, promulgation des lois. Toutes les forces armées et les corps de police étaient placés sous les ordres du commissaire. Elle règne donc sous le contrôle de l'administration française de 1847 à 1877.

Décès et inhumation

Pomare IV meurt le 17 septembre 1877 d'une crise cardiaque. Elle est d'abord enterrée sous un mausolée à la pointe Outu'ai'ai commune de Arue. Une dizaine d'années plus tard, sa dépouille est déplacée dans le cimetière royal des Pomare pour laisser place au dernier roi de la dynastie, Pomare V, qui lui succède de 1877 à 1880.

Noms et titulature

Son nom de naissance, ʻAimata signifie : mangeur d'œil, d'après une ancienne coutume qui voulait que le souverain mange l'œil de son ennemi vaincu.
Son nom polynésien complet, en tant que reine, est ʻAimata Pōmare IV Vahine-o-Punuateraʻitua.
Les titres qu'elle a porté au cours de son existence sont :
Son Altesse la princesse ʻAimata 1813 - 1815
Son Altesse royale la princesse ʻAimata Pōmare 1815 - 1821
Son Altesse royale la princesse héritière de Tahiti 1821 - 1827
Sa Majesté la reine de Tahiti et dépendances 1827 - 1877

Mariages et descendance

La reine Pōmare IV et son époux le prince consort Ariʻifaaite.
Mariée en décembre 1822 à l'âge de 10 ans avec Tapoa, elle en divorce en accédant à la royauté et épouse Ari'ifaaite, chef à Huahine, son cousin germain par sa mère, et avec qui elle donne naissance à :
S.A. le prince Henri Pōmare décédé jeune.
S.A. le prince Ariʻiaue Pōmare 1838-1855 : héritier présomptif de Pōmare IV, mais atteint de tuberculose, il décède à la veille de ses 18 ans.
S.A. le prince Teratane Pōmare 1839-1891 : Pōmare V, roi de Tahiti de 1877 à 1880.
S.A. la princesse Victoria Pōmare décédée à l'âge d'un an.
S.A. le prince Tamatoa Pōmare 1842-1881 : Tamatoa V, roi de Raiatea.
S.A. le prince Punuariʻi Teriʻitapunui Pōmare 1846-1888.
S.A. le prince Teriʻitua Tuavira Joinville Pōmare 1847-1875.

Iconographie

Outre la photographie illustrant cet article on connaît une gravure représentant Pomare IV. Cette illustration figure dans l'ouvrage de Duperrey, Voyage autour du monde exécuté par ordre du roi, sur la corvette de Sa Majesté, La Coquille..., atlas du volume Histoire du voyage. Planche no 13, avec la légende: Femmes de l’ile Taïti. Iles de la Société 1. Po-maré Vahiné, régente. 2. Téré-moémoé ; veuve de Po-maré II. Lejeune et Chazal delt. De l’Impre de Rémond. Ambroise Tardieu sculpt.



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Posté le : 26/02/2016 23:01

Edité par Loriane sur 27-02-2016 16:05:49
Edité par Loriane sur 27-02-2016 16:06:29
Edité par Loriane sur 27-02-2016 16:07:14
Edité par Loriane sur 27-02-2016 16:10:08
Edité par Loriane sur 27-02-2016 16:11:24
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Ernest Renan 1
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Le 28 février 1823 naît Joseph Ernest Renan,

à Tréguier côtes-du-Nord et mort, à 69 ans le 2 octobre 1892 à Paris, écrivain, philologue, philosophe et historien français.Drand-officier de la légion d'honneur.
Fasciné par la science, Ernest Renan adhère immédiatement aux théories de Darwin sur l'évolution des espèces. Il établit un rapport étroit entre les religions et leurs racines ethnico-géographiques. Une part essentielle de son œuvre est d'ailleurs consacrée aux religions avec par exemple son Histoire des origines du christianisme, 7 volumes de 1863 à 1881 dont le premier tome est consacré à la Vie de Jésus 1863. Ce livre qui marque les milieux intellectuels de son vivant contient la thèse, alors controversée, selon laquelle la biographie de Jésus doit être comprise comme celle de n'importe quel autre homme, et la Bible comme devant être soumise à un examen critique comme n'importe quel autre document historique. Ceci déclenche des débats passionnés et la colère de l'Église catholique.
Ernest Renan est considéré aujourd'hui comme un intellectuel de référence avec des textes célèbres comme Prière sur l'Acropole 1865 ou Qu'est-ce qu'une nation ? 1882. Dans ce discours, Renan s’efforce de distinguer race et nation, soutenant que, à la différence des races, les nations s’étaient formées sur la base d’une association volontaire d’individus avec un passé commun : ce qui constitue une nation, ce n'est pas parler la même langue, ni appartenir à un groupe ethnographique commun, c'est avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore dans l'avenir. Ce discours a souvent été interprété comme le rejet du nationalisme racial du type allemand en faveur d’un modèle contractuel de la nation. Toutefois, des auteurs comme Marcel Detienne et Gérard Noiriel estiment que la conception par Renan de la nation comme un principe spirituel n’est pas exempte d’une dimension raciale et que ce plébiscite de tous les jours ne concerne que ceux qui ont un passé commun, c'est-à-dire ceux qui ont les mêmes racines .
Son intérêt pour sa Bretagne natale a été également constant de L'Âme bretonne 1854 à son texte autobiographique Souvenirs d'enfance et de jeunesse 1883.

Quelques dates de sa vie

Reçu premier à l'agrégation de philosophie en septembre 1848, il devient docteur en lettres à la suite d'une thèse sur le philosophe musulman Averroès terminée en 1852. De 1849 et 1850, il est chargé de mission en Italie.
En 1856, il devient membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, tandis que, le 11 septembre 1856, il épouse Cornélie Henriette Scheffer, la fille du peintre Henry Scheffer qui est la nièce du peintre Ary Scheffer. Plusieurs portraits d'Ernest Renan sont conservés au Musée de la vie romantique, dans l'Hôtel Scheffer-Renan, 16 rue Chaptal, au cœur de la Nouvelle Athènes à Paris. Ils sont signés Henry Scheffer, René de Saint-Marceaux et Léopold Bernstamm. Les collections et les archives du musée évoquent également son épouse et leurs enfants Ary Renan né en 1858 et Noémi née en 1862, épouse de l'écrivain et philologue Jean Psichari.
En 1860, Ernest Renan effectue à l'occasion de l'expédition française une mission archéologique au Liban et en Syrie. Professeur d'hébreu au Collège de France en 1862, il est suspendu en 1864 pour des propos jugés sacrilège sur Jésus Christ, l'érudit Salomon Munk lui succédant à la chaire d'hébreu. Dans son cours d'ouverture du cours de langue hébraïque, chaldaïque et syriaque au Collège de France, Ernest Renan fait une description apocalyptique de la lourdeur de l'esprit sémite qui s'oppose au génie Indo-Européen et à son héritière la culture européenne enrichie aux sources grecques. Il est nommé chevalier de la Légion d'honneur.
En 1863, la publication de sa Vie de Jésus, livre écrit lors de son séjour à Ghazir au Liban, connaît un grand succès et fait scandale. Le pape Pie IX, très affecté, le traite de blasphémateur européen , et en 1864, le ministre de l'Instruction publique Victor Duruy supprime son cours.
En 1865, il effectue un voyage en Égypte, en Asie Mineure et en Grèce.
En 1869, il se présente sous l'étiquette d'indépendant à un siège de député en Seine-et-Marne, ce qui lui vaut un échec électoral.
Le 13 juin 1878, il est élu à l'Académie française, au fauteuil 29, en remplacement de Claude Bernard.
En 1880, il est promu officier de la Légion d'Honneur
En 1883, il devient administrateur du Collège de France.
En 1884, il est promu commandeur de la Légion d'honneur.
En 1888, il fut élevé au grade de grand officier de la Légion d'honneur.
Ernest Renan naît le 28 février 1823 à Tréguier dans une famille de pêcheurs ; son grand-père, ayant acquis une certaine aisance, y a acheté une maison où il s'était établi ; son père, capitaine d'un petit navire et républicain convaincu, a épousé la fille de commerçants royalistes de la ville voisine de Lannion. Sa mère n'est qu'à moitié bretonne, ses ancêtres paternels étant venus de Bordeaux : Renan confessera qu'en sa propre nature, le Gascon et le Breton ne cessent de se heurter. Toute sa vie, Renan se sentira déchiré entre les croyances politiques de son père et celles de sa mère. Il a cinq ans lorsque son père meurt, sa sœur Henriette, de douze ans son aînée, devient alors le chef moral de la famille. Tentant en vain d'ouvrir une école pour filles à Tréguier, elle part pour Paris comme professeur dans une école de jeunes filles. Ernest, en attendant, est instruit au petit séminaire de sa ville natale aujourd'hui, lycée Joseph Savina. Les appréciations de ses maîtres le décrivent comme « docile, patient, appliqué, soigneux. Les prêtres lui donnaient une solide éducation en mathématiques et en latin, sa mère la complète.
En 1838, Renan remporte tous les prix au séminaire de Tréguier. Sa sœur parle de lui pendant l'été au directeur de l'école parisienne où elle enseigne et il en parle lui-même à l'abbé Félix Dupanloup, qui a créé le séminaire de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, une école où les jeunes aristocrates catholiques et les élèves les plus doués des séminaires doivent être instruits ensemble, afin de renforcer le lien entre l'aristocratie et le clergé. Dupanloup fait donc venir Renan, qui n'a que quinze ans et n'a jamais quitté la Bretagne. J'appris avec étonnement qu'il y avait des laïcs sérieux et savants (…) les mots talents, éclat, réputation eurent pour moi un sens. » Cependant la religion lui paraît complètement différente à Tréguier et à Paris. Le catholicisme superficiel, brillant, pseudo-scientifique de la capitale, n'arrive pas à satisfaire ce garçon qui a reçu de ses maîtres bretons une foi austère.
En 1840, Renan quitta Saint-Nicolas-du-Chardonnet pour poursuivre ses études de philosophie au séminaire d'Issy-les-Moulineaux. Il entre rempli de passion pour la scolastique catholique car il est las de la rhétorique de Saint-Nicolas et il espère satisfaire son intelligence sérieuse avec le vaste matériel que lui offre la théologie catholique. Parmi les philosophes Reid et Malebranche l'attirent tout de suite et, après eux, il se tourne vers Hegel, Kant et Herder. C'est alors qu'il commence à voir une contradiction essentielle entre la métaphysique qu'il étudie et la foi qu'il professe, mais un goût pour les vérités vérifiables retient son scepticisme. Il écrit à Henriette que la philosophie ne satisfait qu'à moitié sa faim de vérité ; il se sent attiré par les mathématiques. Sa sœur a accepté dans la famille du comte Zamoyski, noble polonais, un poste de préceptrice qui l'oblige à séjourner en Pologne à Varsovie et à la campagne, éloignée de la France pour des années. C'est Henriette qui exerce l'influence la plus forte sur son frère, et les lettres d'elles qui ont été publiées indiquent un esprit presque égal à celui de son frère, en même temps qu'elle lui est moralement supérieure
Ce n'est pas la philosophie mais la philologie qui finalement éveille le doute chez Renan. Ses études terminées à Issy, il entre au séminaire Saint-Sulpice pour étudier les textes bibliques avant de prendre les ordres et commencer à apprendre l'hébreu. L'un de ses maîtres est l'abbé Arthur-Marie Le Hir, auquel il rend hommage dans ses Souvenirs d'enfance et de jeunesse. Renan constate à cette époque que la deuxième partie d'Isaïe diffère de la première non seulement quant au style, mais également quant à la date, que la grammaire et l'histoire du Pentateuque sont postérieures à l'époque de Moïse et que le livre de Daniel est manifestement apocryphe. Intellectuellement Renan se sent détaché de la croyance catholique, même si sa sensibilité l'y maintenait toujours. La lutte entre vocation et conviction est gagnée par la conviction. Le 6 octobre 1845, Renan quitte Saint-Sulpice pour devenir surveillant au collège Stanislas, dirigé par le Père Joseph Gratry. Mais cette solution impliquant une profession extérieure avouée de cléricature, il préfère briser le dernier lien qui le retient à la vie religieuse et il entre à la pension privée de M. Crouzet comme répétiteur au pair, c'est-à-dire, selon le langage du quartier latin d'alors, sans appointements. Il avait une petite chambre, la table avec les élèves, à peine deux heures par jour occupées, beaucoup de temps par conséquent pour travailler. Cela le satisfaisait pleinement.

Renan, malgré son éducation par des prêtres, doit accepter pleinement l'idéal scientifique. La splendeur du cosmos est pour lui un ravissement. À la fin de sa vie, il écrira au sujet d'Amiel, l'homme qui a le temps de tenir un journal intime n'a jamais compris l'immensité de l'univers. Les certitudes de la physique et des sciences naturelles sont révélées à Renan en 1846 par le futur chimiste Marcellin Berthelot, alors âgé de dix-huit ans, et qui est son élève à la pension de M. Crouzet. Leur amitié se poursuivra jusqu'à la mort de Renan et est marquée par une intensive correspondance. Très proches, ils suivront les cours de sanskrit Burnouf au Collège de France ensemble et Berthelot l'invita régulièrement dans sa maison de famille à Rochecorbon, le domaine Montguerre. Dans cette atmosphère favorable Renan continue ses recherches en philologie sémitique et, en 1847, il obtient le prix de Volney, une des principales récompenses décernées par l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, pour le manuscrit de son Histoire Générale des langues sémitiques. En 1847, il est reçu premier à l'agrégation de philosophie et nommé professeur au lycée de Vendôme.
En 1856, il épouse Cornélie Scheffer, fille d'Henry Scheffer et nièce d’Ary Scheffer. Cette alliance avec une famille protestante de peintres lui ouvre les portes du milieu artistique.
De 1860 à 1861, il effectue à l'occasion de l'expédition française une mission archéologique au Liban et en Syrie. Il séjourne avec son épouse Cornélie et sa sœur Henriette dans la demeure de Zakhia Chalhoub el-Kallab et son fils Abdallah Zakhia el Kallab, famille de notables maronites d'Amchit région de Byblos dont les ancêtres ont été anoblis par le Sultan ottoman et ayant fondé le premier hôpital au Liban hôpital Saint-Michel d'Amchit. Sur une plaque accrochée au mur de la demeure, il est écrit que c'est également à Amchit que Renan a trouvé la sérénité et l'inspiration nécessaires pour écrire l'une de ses œuvres majeures : La Vie de Jésus. C'est ici aussi, qu'Henriette, morte en 1861, repose dans le caveau de la famille Zakhia, tout près de l'église de ce village qu'elle a tant aimée .
Renan n'est pas seulement un érudit. En étudiant saint Paul ou les apôtres, il montre combien il est soucieux d'une vie sociale plus développée, quel est son sens de la fraternité, et combien revit en lui le sentiment démocratique qui avait inspiré L'Avenir de la science. En 1869, il se présente à Meaux en tant que candidat de l'opposition libérale aux élections législatives. Tandis que son tempérament est devenu moins aristocratique, son libéralisme a évolué vers la tolérance. À la veille de sa dissolution, Renan est presque prêt à accepter l'empire, et, s'il avait été élu au Corps législatif, il aurait rejoint le groupe libéral des bonapartistes. Un an après éclate la guerre franco-allemande, l'empire tombe et Napoléon III part pour l'exil. La guerre franco-allemande est un moment charnière dans l'histoire intellectuelle de Renan. Pour lui, l'Allemagne a toujours été l'asile de la pensée et de la science désintéressée. Maintenant, il voit le pays qui jusque-là représentait son idéal, détruire et ruiner la terre où il est né ; il ne voit plus l'Allemand comme un prêtre, mais comme un envahisseur.
Dans La Réforme intellectuelle et morale 1871, Renan cherche à sauvegarder l'avenir de la France. Pourtant il reste sous l'influence de l'Allemagne. L'idéal et la discipline qu'il propose à son pays vaincu étant ceux du vainqueur : une société féodale, un gouvernement monarchique, une élite et le reste de la nation n'existant que pour la faire vivre et la nourrir ; un idéal d'honneur et de devoirs imposé par un petit nombre à une multitude récalcitrante ou soumise. Les erreurs de la Commune confirment Renan dans cette réaction. En même temps, l'ironie reste toujours perceptible dans son travail mais devient plus amère. Ses Dialogues philosophiques, écrit en 1871, son Ecclésiaste 1882 et son Antéchrist (1876) (le quatrième volume des Origines du Christianisme, traitant du règne de Néron) relèvent d'un génie littéraire incomparable, mais révèlent un caractère désabusé et sceptique. Après avoir en vain essayé de faire suivre à son pays ses préceptes, il se résigne à observer sa dérive vers la perdition. Mais la suite des événements lui montre, au contraire, une France qui, chaque jour, redevient un peu plus forte. Ce qui le réveille donc de son incrédulité, de son attitude désillusionnée pour observer avec intérêt la lutte pour la justice et pour la liberté d'une société démocratique. Son esprit est le plus large de son temps. Les cinquième et sixième volumes des Origines du Christianisme (L'Église Chrétienne et Marc-Aurèle) le montrent ainsi réconcilié avec la démocratie, confiant dans l'ascension graduelle de l'Homme, conscient que les catastrophes les plus grandes n'interrompent pas vraiment le progrès du monde imperceptible mais sûr. Il s'est réconcilié en somme sinon avec les dogmes, du moins avec les beautés morales du catholicisme et les souvenirs de son enfance pieuse.
Dans sa vieillesse, le philosophe jette un regard sur ses jeunes années. Il a presque soixante ans quand, en 1883, il publie ses Souvenirs d'enfance et de jeunesse, l'ouvrage par lequel il est le plus connu à l'époque contemporaine. On y trouve cette note lyrique, ces confidences personnelles auxquelles le public attache une grande valeur chez un homme déjà célèbre. Le lecteur blasé de son temps découvre qu'il existe un monde non moins poétique, non moins primitif que celui des Origines du Christianisme et qu'il existe encore dans la mémoire des hommes sur la côte occidentale de la France. Ces souvenirs sont pénétrés de la magie celtique des vieux romans antiques tout en possédant la simplicité, le naturel et la véracité que le xixe siècle apprécie alors si fortement. Mais son Ecclésiaste, publié quelques mois plus tôt, ses Drames philosophiques, rassemblés en 1888, donnent une image plus juste de son esprit, même s'il se révèle minutieux, critique et désabusé. Ils montrent l'attitude qu'a envers un « socialisme instinctif » un philosophe libéral par conviction, en même temps qu'aristocrate par tempérament. Nous y apprenons que Caliban la démocratie), est une brute stupide, mais qu'une fois qu'on lui apprend à se prendre en main, il fait somme toute un dirigeant convenable ; que Prospero le principe aristocratique, ou, si l'on veut, l'esprit) accepte de se voir déposé pour y gagner une liberté plus grande dans le monde intellectuel, puisque Caliban se révèle un policier efficace qui laisse à ses supérieurs toute liberté dans leurs recherches ; qu'Ariel le principe religieux acquiert un sentiment plus exact de la vie et ne renonce pas à la spiritualité sous le mauvais prétexte du changement. En effet, Ariel fleurit au service de Prospero sous le gouvernement apparent des rustres innombrables. La religion et la connaissance sont aussi impérissables que le monde qu'elles honorent. C'est ainsi que, venant du plus profond de lui-même, c'est l'idéalisme essentiel qui a vaincu chez Renan.

Renan est un grand travailleur. À l'âge de soixante ans, ayant terminé Les Origines de Christianisme, il commence son Histoire d'Israël, fondée sur une étude qui occupera toute sa vie, celle de l'Ancien Testament et du Corpus Inscriptionum Semiticarum, publié sous sa direction par l'Académie des inscriptions et belles-lettres de 1881 jusqu'à sa mort. Le premier volume de l’Histoire d'Israël parait en 1887, le troisième en 1891, les deux derniers à titre posthume. Comme histoire des faits et des théories, l'ouvrage n'est pas sans erreurs ; comme essai sur l'évolution de l'idée religieuse, il reste (malgré quelques passages moins sérieux, ironiques ou incohérents d'une importance extraordinaire ; pour faire connaître la pensée d'Ernest Renan, c'est là où il est le plus vivant.

Dans un volume qui rassemble des essais, Feuilles détachées, publié lui aussi en 1891, on retrouve la même attitude mentale, une affirmation que la piété est nécessaire, tout en étant indépendante des dogmes.
Dans les dernières années de sa vie, Ernest Renan reçoit de nombreux honneurs et est nommé administrateur du Collège de France et Grand-Officier de la Légion d'honneur. Dans les huit dernières années du XIXe siècle paraissent deux volumes de l’Histoire d'Israël, sa correspondance avec sa sœur Henriette, ses Lettres à M. Berthelot et l’Histoire de la politique religieuse de Philippe le Bel, qu'il a écrite dans les années précédant immédiatement son mariage. De 1884 à sa mort en 1892, il passe ses vacances à Louannec, dans le manoir de Rosmapamon, demeure qu'il loue près de Perros-Guirec.
À l'affection cardiaque et rhumatismale dont il souffre depuis 1868 et qui a provoqué une enflure généralisée, se sont ajoutées dans les dernières années de sa vie les souffrances d'une maladie de la vessie et d'un zona. Au mois de juillet 1892, Renan part, bien malade, pour sa solitude de Rosmapamon où il meurt le 2 octobre 18928. Après des obsèques civiles comme Victor Hugo et Félicité Robert de Lamennais, il est enterré au cimetière de Montmartre dans le caveau de sa belle-famille famille Scheffer, avec l'inscription Veritatem delixi, j'ai aimé la vérité. Une loge maçonnique est nommée en son honneur, bien que Renan n'ait jamais adhéré à la Franc-Maçonnerie, et qu'il ait été indifférent à cette dernière.
Parmi la descendance familiale d'Ernest Renan, peuvent être mentionnés le philosophe Olivier Revault d'Allonnes dont il est l'arrière-grand-père, ainsi que Ernest Psichari, dont il est le grand-père.
De L'Avenir de la science à l'Examen de conscience philosophique 1889, pendant quarante ans, bien qu'il eût paru se livrer avec volupté au jeu des antinomies, Renan est resté fidèle à ses options initiales. Qu'il traite d'histoire, de morale ou de philosophie, de critique littéraire ou religieuse, qu'il médite sur la politique ou sur la réforme de l'enseignement, qu'il adopte la forme d'essai, de lettre, de dialogue, de drame, ce sont toujours les mêmes traits qu'il révèle : négation du surnaturel ; confiance en la Nature dont les lois n'ont jamais subi d'infraction ; affirmation de la primauté de l'esprit et du progrès de la raison, continu, malgré de passagers échecs ; foi en l'homme. Aussi n'est-il pas excessif de dire que l'œuvre de Renan résume à elle seule, par ses défauts comme par ses qualités, le XIXe siècle français.

Une carrière exemplaire

Après avoir marqué profondément son temps, Renan vit surtout aujourd'hui par les Souvenirs d'enfance et de jeunesse 1884 qui retracent son itinéraire intellectuel depuis sa naissance à Tréguier, sa formation à Saint-Nicolas-du-Chardonnet (1838-1841) et au grand séminaire 1841-1845 jusqu'à sa sortie de Saint-Sulpice. Il se croyait la vocation religieuse : ses études le convainquirent de la fragilité des bases du christianisme et il rompit avec l'Église, « dignement et gravement ». Il n'a pas vécu une crise métaphysique comme Jouffroy, ni une révolte politique comme Lamennais : il a renoncé par probité d'esprit à une carrière ecclésiastique qui s'annonçait facile et brillante. Enclin par tempérament au respect des corps constitués, il substitua naturellement au prestige de l'Église celui du savoir officiel représenté pour lui par le Collège de France et l'Institut ; dès sa sortie du séminaire, il songe à une chaire au Collège de France ; en même temps qu'il conquiert ses grades universitaires, il est couronné deux fois (1846 et 1848) par l'Académie des inscriptions pour des mémoires érudits. Il restera toujours fidèle à son programme juvénile de 1848 qu'il réalisera grâce à l'appui de sa sœur Henriette : « Poursuivre à tout prix mon développement intellectuel. Je ne vis que par là : sentir et penser. »
L'Institut le chargea d'une mission archéologique en Italie (1849-1850). À son retour, il donna à ces antichambres académiques qu'étaient alors le Journal des débats et la Revue des Deux Mondes les articles que recueilleront ses Études d'histoire religieuse (1857) et ses Essais de morale et de critique (1859). À trente-trois ans, il entra à l'Académie des inscriptions.
Ses tendances l'opposaient au régime de Napoléon III dont il dénoncera plus tard (La Réforme intellectuelle et morale, 1871) le cléricalisme et la vulgarité matérialiste. Mais il était l'ami des bonapartistes libéraux, notamment de Mme Cornu, dont l'influence sur l'empereur obtint pour lui une mission scientifique au Liban et contribua à sa nomination au Collège de France (1862). Les persécutions qu'il subit de la part des catholiques le contraignirent à quitter sa chaire, mais sa révocation (1864) lui donna l'auréole de victime du régime impérial : aussi, quoique par sympathie il penchât vers une monarchie constitutionnelle, la troisième République le combla-t-elle d'honneurs. Élu à l'Académie française (1878), administrateur du Collège de France (1883), il réussit dans la société laïque une carrière aussi glorieuse que celle qu'il aurait faite dans l'Église. Au moment de sa mort qui survint à Paris, son génie conciliant, son prodigieux labeur lui avaient valu un rayonnement analogue à celui des grands esprits encyclopédiques de la Renaissance, et il paraissait incarner la France officielle.

L'« Histoire des origines du christianisme »

Une part de l'œuvre de Renan se trouve aujourd'hui déclassée. Si le Corpus inscriptionum semiticarum dont il fut l'initiateur (1867) maintient son renom d'orientaliste, ni son essai De l'origine du langage (1848), ni son Histoire générale des langues sémitiques (1855) n'ont conservé de valeur scientifique, mais ces ouvrages l'ont préparé à construire le monument qui devait occuper toute sa vie, l'Histoire des origines du christianisme, avec son nécessaire complément, l' Histoire du peuple d'Israël.
Encore à Saint-Sulpice (1845), Renan avait écrit un curieux Essai psychologique sur Jésus-Christ. En 1849, son article sur les Historiens critiques de Jésus affirmait l'intérêt du problème des origines du christianisme, qu'on devrait, disait-il, étudier en se gardant de tout préjugé doctrinal. Présage significatif : la grandeur de Renan est d'avoir, pour la première fois en France, désacralisé les recherches bibliques et fondé une exégèse laïque. Son séjour à Beyrouth de 1860-1861, dont il exposa les résultats dans la Mission de Phénicie, cristallisa son projet d'une Vie de Jésus, qu'il commença à rédiger en 1861.
Sa leçon inaugurale au Collège de France (22 février 1862), où il parlait de Jésus comme d'un « homme incomparable », heurta l'opinion conservatrice. La polémique contre lui redoubla de violence lorsque parut la Vie de Jésus (1863), dont le succès fut retentissant. Dans un style très étudié, il faisait revivre Jésus dans son cadre historique, en rejetant l'appareil du fidéisme chrétien. Six volumes suivirent, racontant l'histoire du christianisme depuis Les Apôtres (1866) jusqu'à Marc-Aurèle (1881). Puis Renan remonta du christianisme à sa source dans les cinq volumes de l'Histoire du peuple d'Israël (1887-1893).
Ce chef-d'œuvre est d'un historien philosophe et non d'un théologien. Renan se propose une étude d'embryogénie : il veut, dit-il, traiter en naturaliste de la naissance d'une religion. Renan estime en outre que les faits, incomplètement connaissables, requièrent de l'historien une sorte de divination qui supplée à la pénurie des sources. L'historien, selon lui, doit retenir au besoin les légendes qui montrent « sinon comment les choses se sont passées, du moins comment on les conçut ». Ainsi, son œuvre d'historien est positiviste par son présupposé constant que « tout dans l'histoire a son explication humaine », mais, par l'imagination et la sensibilité qu'il met à l'interprétation des faits, on y retrouve la tradition romantique. Le choix même d'un sujet où la documentation certaine est peu abondante atteste que, pour lui, l'essentielle qualité de l'historien est « le sentiment des choses primitives, la souplesse qui fait deviner et sentir des états d'âme ». Savant scrupuleux, il s'attache à « discerner les degrés divers du certain, du probable, du plausible, du possible » et réunit dans un ensemble harmonieux érudition et ingéniosité, au risque de réduire l'histoire à ce qu'il a un jour appelé « une petite science conjecturale ».

Le jeu des antinomies et l'humanisme renanien

La prudence qui incitait Renan à juxtaposer les hypothèses explicatives l'a fait passer pour un dilettante. Reproche injustifié, car la valeur de ses travaux historiques est due largement à la philosophie critique de la nature et de l'humanité qui les soutient. Sa pensée présente une unité qu'un fait suffit à prouver : il publia en 1890 L'Avenir de la science, écrit dans l'enthousiasme au printemps de 1849, et put affirmer en préface qu'au fond il n'avait guère changé. Cet essai prolixe, nourri de Cousin, de Herder et de Hegel, assigne à la science, dans le monde moderne, la grandeur d'une religion nouvelle capable d'organiser rationnellement l'humanité.
Cette métaphysique idéaliste, qui substitue la catégorie du devenir à celle de l'être, ne cessa de nourrir la réflexion de Renan, comme le montre sa lettre à Berthelot (1863) : il y conçoit la matière comme animée d'un nisus qui la pousse à sortir du chaos, à s'élever par étapes, jusqu'à l'apparition de l'humanité qui donne à l'Univers la conscience et l'exemple d'une cause libre. Cette création continue se résume par le mot « Dieu ». Dieu n'est pas, mais il devient, à travers et par le progrès de l'humanité, progrès qu'achèvera le triomphe de l'esprit sur la matière. En 1871, alors que la guerre et la Commune semblaient infirmer son optimisme, Renan reprit ces méditations en Dialogues philosophiques, forme qui lui plaisait, car elle lui permettait de laisser converser entre eux « les lobes de son cerveau » et de présenter sans dogmatisme les diverses faces des problèmes métaphysiques. Les interlocuteurs des Dialogues philosophiques sont d'assez froides abstractions : dans les Drames philosophiques, Renan donna de la vie à ses idées en les incarnant dans des personnages symboliques et en développa les aspects moraux et sociaux. Caliban (1878) et l'Eau de Jouvence (1880) traitent de l'aristocratie du savoir aux prises avec la brutalité démocratique. Le Prêtre de Némi (1885) évoque l'antinomie entre l'esprit, qui cherche à épurer les croyances, et la masse, aveuglément attachée à ses traditions. L'Abbesse de Jouarre (1886) donne une grave méditation sur le rôle de l'amour dans la réalisation de l'être idéal. Ainsi, chez Renan, la réflexion du moraliste vient-elle donner un sens profondément humain à son œuvre de savant et d'historien.
Jean Gaulmier

Comment Renan faisait ses cours

Je suivis au Collège de France, assez régulièrement pendant trois ans, le cours de Renan. Tout le monde sait comment Renan faisait son cours d'hébreu. Il ne le préparait que peu ou point. En ce temps-là, il expliquait le texte des Psaumes. Il prenait un verset, le lisait, le traduisait, lisait la version grecque des Septante pour la comparaison, citait les conjectures de l'oratorien Houbigant ou de quelque critique moderne pour la correction du texte, pesant chaque mot pour ainsi dire, et ne s'interdisant ni les digressions ni les répétitions. Son avis était qu'un professeur du Collège de France doit travailler devant ses auditeurs, et il travaillait, en effet, devant nous, un peu plus lentement, je suppose, que dans son cabinet. Somme toute, son cours était une très bonne initiation à la critique textuelle de l'Ancien Testament. Il y parlait souvent d'autre chose ; mais c'est cela surtout qu'on y pouvait apprendre

Idées et thèses

Ernest Renan se montre fasciné par la quête de vérités et le désintéressement, seuls systèmes permettant à la connaissance humaine de se consolider de génération en génération, alors que la perpétuation aveugle des mêmes erreurs et les égoïsmes individuels ont pour résultante de nécessairement s'annuler sous l'effet de forces antagonistes et sont voués à ne laisser aucune trace. (Voir aussi l'article Noosphère.
Les rapports d'Ernest Renan avec la religion sont complexes. Il la critique comme système de pensée tout en affirmant son importance comme facteur d'unification des sociétés humaines ainsi que le danger de s'en détourner trop hâtivement. Dans L'Avenir de la science, il résume la situation en disant : « Quand je suis à la ville, je me moque de celui qui va à la messe ; mais quand je suis à la campagne, je me moque au contraire de celui qui n'y va pas ».
Il établit un rapport étroit entre les religions et leurs racines ethnico-géographiques. Une part essentielle de son œuvre est d'ailleurs consacrée aux religions avec par exemple son Histoire des origines du christianisme, 7 volumes de 1863 à 1881, dont le premier, la Vie de Jésus, eut un grand retentissement. Ce livre qui marque les milieux intellectuels de son vivant contient la thèse, alors controversée, selon laquelle la biographie de Jésus doit être comprise comme celle de n'importe quel autre homme, et la Bible comme devant être soumise à un examen critique comme n'importe quel autre document historique. Ceci déclenche des débats passionnés et la colère de l'Église catholique.
Renan comprend immédiatement l'idée de sélection naturelle défendue par Charles Darwin et s'y rallie. Il ne prône cependant pas pour autant, au contraire, son application à l'ordre social.
Ernest Renan se montre en général inquiet pour l'avenir de l'humanité, craignant « sa mort par épuisement de la générosité des cœurs, comme celle de l'industrie peut-être un jour par épuisement du charbon de terre ». Peut-être nos descendants ne vivront-ils que comme « des lézards ne pensant qu'à profiter paresseusement du soleil ».
Il ne se rallie pas pour autant à une philosophie de la vie tournée vers la réussite matérielle comme la prône Benjamin Franklin : La science du bonhomme Richard m’a toujours semblé une assez mauvaise science. Quoi ! un homme qui résume toute sa vie en ces mots : faire honnêtement fortune (et encore on pourrait croire qu’honnêtement n’est là qu’afin de la mieux faire), la dernière chose à laquelle il faudrait penser, une chose qui n’a quelque valeur qu’en tant que servant à une fin idéale ultérieure ! Cela est immoral ; cela est une conception étroite et finie de l’existence ; cela ne peut partir que d’une âme dépourvue de religion et de poésie. Eh grand Dieu ! qu’importe, je vous prie ? Qu’importe, à la fin de cette courte vie, d’avoir réalisé un type plus ou moins complet de félicité extérieure ? Ce qui importe, c’est d’avoir beaucoup pensé et beaucoup aimé ; c’est d’avoir levé un œil ferme sur toute chose, c’est en mourant de pouvoir critiquer la mort elle-même. J’aime mieux un iogui, j’aime mieux un mouni de l’Inde, j’aime mieux Siméon Stylite mangé des vers sur son étrange piédestal, qu’un prosaïque industriel, capable de suivre pendant vingt ans une même pensée de fortune.
Dans son livre Histoire générale et système comparé des langues sémitiques 1855, Ernest Renan établit un rapport étroit entre les religions et leur racines ethnico-géographiques, thèse qu'il développera en 1862 dans son discours d'ouverture au Collège de France, opposant le « psychisme du désert » des peuples sémites le désert est monothéiste au psychisme de la forêt des Indo-Européens dont le polythéisme paraît modelé par une nature changeante et la diversité des saisons.
Il combat l'idée selon laquelle la race ou même la langue citant le contre-exemple de la Suisse constituerait l'origine de la Nation, et s'oppose ainsi à toute forme de pangermanisme, panslavisme, etc.
Ernest Renan est considéré aujourd'hui comme un intellectuel de référence avec des textes célèbres comme Prière sur l'Acropole 1865 ou Qu'est-ce qu'une nation ? 1882. Dans ce discours, Renan s’efforce de distinguer race et nation, soutenant que, à la différence des races, les nations s’étaient formées sur la base d’une association volontaire d’individus avec un passé commun : ce qui constitue une nation, ce n'est pas parler la même langue, ni appartenir à un groupe ethnographique commun, c'est avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore » dans l'avenir. Ce discours a souvent été interprété comme le rejet du nationalisme racial du type allemand en faveur d’un modèle contractuel de la nation. Pourtant, comme l’ont signalé Marcel Detienne et Gérard Noiriel, la conception par Renan de la nation comme un principe spirituel n’est pas exempte d’une dimension raciale, au point que des penseurs racistes comme Maurice Barrès en firent leur précurseur. Le plébiscite de tous les jours défendu par Renan « ne concernent que ceux qui ont un passé commun, c'est-à-dire ceux qui ont le même racines .

Des interrogations sur l'Univers

« La nature n'est pas obligée de se plier à nos petites convenances. À cette déclaration de l'homme : « Je ne peux être vertueux sans telle ou telle chimère », l'Éternel est en droit de nous répondre : « Tant pis pour vous. Vos chimères ne sauraient me forcer à changer l'ordre de la fatalité ».
« De cette résultante suprême de l'univers total, nous ne pouvons dire qu'une chose, c'est qu'elle est bonne. Car si elle n'était pas bonne, l'univers total, qui existe depuis l'éternité, se serait détruit. Supposons une maison de banque existant depuis l'éternité. Si cette maison avait le moindre défaut dans ses bases, elle eût mille fois fait faillite. Si le bilan du monde ne se soldait pas par un boni au profit des actionnaires, il y a longtemps que le monde n'existerait plus. … Pourquoi être s'il n'y avait aucun profit à être ? Il est si facile de n'être pas ! »
« Ici, le mystère est absolu ; nous sentons bien en nous la voix d'un autre monde ; mais nous ignorons quel est ce monde. Que nous dit cette voix ? Des choses assez claires. D'où vient cette voix ? Rien de plus obscur. … Elle éclate surtout dans ces sublimes absurdités où l'on s'engage, tout en sachant bien que l'on fait un mauvais calcul, dans ces quatre grandes folies de l'homme, l'amour, la religion, la poésie et la vertu, inutilités providentielles que l'homme égoïste nie et qui, en dépit de lui, mènent le monde.

Renan et la Bretagne

Renan était reconnu de son vivant, à la fois par les habitants de sa région trégorroise comme par toute la Bretagne, y compris par ses ennemis, comme un grand intellectuel breton. Il parlait le breton dans sa jeunesse et n'en perdit pas l'usage13. Son intérêt pour sa Bretagne natale a été constant ; de L'Âme bretonne 1854 à son texte autobiographique Souvenirs d'enfance et de jeunesse 1883.
Quelques citations extraites de l'ouvrage de l'universitaire Jean Balcou, Renan et la Bretagne :
« Il est certes évident qu'un Renan breton n'est pas tout Renan. p. 9 ;
« Qu'Ernest Renan soit un des auteurs les plus importants de la culture française, nul ne le contestera. Qu'il ait, avec deux autres Bretons, Chateaubriand et Lamennais, orienté le romantisme, un historien de la littérature comme Thibaudet l'avait déjà établi en démontrant que le XIXe siècle tout entier reposait sur cette assise granitique ;
« (…) il y a dans l'œuvre de Renan la permanence d'une musique bretonne et celtique. » ;
« (…) à travers le destin d'un homme exceptionnel confronté à la modernité, et qui fait cette modernité, nous touchons, par-delà l'Histoire, à ce qu'il faut bien appeler une nouvelle matière de Bretagne. » ;
« (…) j'étais, je suis patriote et je ne me désintéresserai jamais de la Grande patrie française ni de la Petite patrie bretonne15. » ;
« (…) nous autres Bretons, nous sommes tenaces… En cela, j'ai été vraiment breton.

Les peuples

Ernest Renan était aussi le relais de certains préjugés de son temps. En témoigne par exemple cette citation : La nature a fait une race d'ouvriers. C'est la race chinoise, d'une dextérité de main merveilleuse, sans presque aucun sentiment d'honneur ; gouvernez-la avec justice en prélevant d'elle pour le bienfait d'un tel gouvernement un ample douaire au profit de la race conquérante, elle sera satisfaite ; une race de travailleurs de la terre, c'est le nègre : soyez pour lui bon et humain, et tout sera dans l'ordre ; une race de maîtres et de soldats, c'est la race européenne. Que chacun fasse ce pour quoi il est fait et tout ira bien Ernest Renan, La Réforme intellectuelle et morale, 1871
Ainsi que celle-ci : Nous aspirons, non pas à l’égalité, mais à la domination. Le pays de race étrangère devra redevenir un pays de serfs, de journaliers agricoles ou de travailleurs industriels. Il ne s’agit pas de supprimer les inégalités parmi les hommes, mais de les amplifier et d’en faire une loi. Ernest Renan, La Réforme intellectuelle et morale, 1871

Le judaïsme

Il importe, avant d'en donner des extraits, de rappeler que Renan ne cachait pas son admiration pour le peuple juif, « le seul à avoir su se passer longtemps de cette chimère de la survie individuelle » et à qui il ne reprochait - au terme d'une analyse fondée sur des datations de textes (Proverbes, l'Ecclésiaste, Livre de Job, etc - que de s'être laissé en fin de compte contaminer par cette notion, jugée par lui absurde. Le judaïsme devenait dès lors une religion comme les autres, renonçant à ce qui avait longtemps fait son honneur face à elles Renan était philologue de profession.
Dans La jeunesse cléricale d'Ernest Renan, Jean Pommier rapporte que Renan avait inscrit sur la couverture de sa Bible ce mot de Néhémie, celui qui reconstruisit les murs de Jérusalem : Magnum opus facio et non possum descendere Je fais une grande œuvre et je ne puis descendre. Dans son Histoire du peuple d'Israël, Renan souligne encore que
Néhémie fit une réponse que doivent toujours avoir dans l'esprit ceux qui ont quelque devoir à remplir dans la vie : Je fais une grande œuvre et je ne puis descendre .
— Ernest Renan, Histoire du peuple d'Israël cité in Jean Guéhenno, Journal des années noires, 31 octobre 1941, Gallimard, 1947.
Et pourtant, on trouve aussi sous sa plume : L'homme peut faire de très grandes choses sans croire à l'immortalité ; mais il faut qu'on y croie pour lui et autour de lui. On peut ainsi comprendre cette réflexion de George Sand au sujet de Renan : « Renan s'acharne à réparer d'une main ce qu'il détruit de l'autre.
Jules Lemaître souligne ce mélange de prudence et d’ironie comme un trait de caractère constant chez Renan :
Il nie dans le même temps qu’il affirme : il est si préoccupé de n’être point dupe de sa pensée, qu’il ne saurait rien avancer d’un peu sérieux, sans sourire et railler tout de suite après.

La science et la prédilection

« Aimez la science », disait Renan.
« L'existence et la nature d'un être ne se prouvent que par ses actes particuliers, individuels, volontaires, et, si la Divinité avait voulu être perçue par le sens scientifique, nous découvririons dans le gouvernement général du monde des actes portant le cachet de ce qui est libre et voulu ; la météorologie devrait être sans cesse dérangée par l'effet des prières des hommes, l'astronomie parfois en défaut. Or aucun cas d'une telle dérogation n'a été scientifiquement constaté ; aucun miracle ne s'est produit devant un corps savant ; tous ceux que l'on rencontre ou bien sont le fruit de l'imagination et de la légende, ou bien se sont passés devant des témoins qui n'avaient pas les moyens nécessaires pour se garantir des illusions et juger du caractère miraculeux d'un fait. »
La Métaphysique et son avenir, 1860.
Quand la science aura décrit tout ce qui est connaissable dans l'univers, Dieu alors sera complet, si l'on fait du mot Dieu le synonyme de la totale existence. En ce sens, Dieu sera plutôt qu'il n'est : il est in fieri, il est en voie de se faire. Mais s'arrêter là serait une théologie fort incomplète. Dieu est plus que la totale existence, il est en même temps l'absolu. Il est de l'ordre où les mathématiques, la métaphysique, la logique sont vraies, il est le lieu de l'idéal, le principe vivant du bien, du beau et du vrai. Envisagé de la sorte, Dieu est pleinement et sans réserve ; il est éternel et immuable, sans progrès ni devenir.
— Les sciences de la nature et les sciences historiques, lettre à Marcellin Berthelot, 1863.
L'art[modifier | modifier le code]
« Notre race ne débuta point par le goût du confortable et des affaires. Ce fut une race morale, brave, guerrière, jalouse de liberté et d'honneur, aimant la nature, capable de dévouement, préférant beaucoup de choses à la vie. Le négoce, l'industrie ont été exercés pour la première fois sur une grande échelle par des peuples sémitiques, ou du moins parlant une langue sémitique, les Phéniciens. Au Moyen Âge, les Arabes et les Juifs furent aussi nos maîtres en fait de commerce. Tout le luxe européen, depuis l'Antiquité jusqu'au xviie siècle, est venu de l'Orient. Je dis le luxe et non point l'art : il y a l'infini de l'un à l'autre (…) »

L'Islam

L'islamisme [à l'époque, sens général de religion musulmane »] ne peut exister que comme religion officielle ; quand on le réduira à l'état de religion libre et individuelle, il périra. L'islamisme n'est pas seulement une religion d'État, comme l'a été le catholicisme en France, sous Louis XIV, comme il l'est encore en Espagne, c'est la religion excluant l'État (…) Là est la guerre éternelle, la guerre qui ne cessera que quand le dernier fils d'Ismaël sera mort de misère ou aura été relégué par la terreur au fond du désert. L'islam est la plus complète négation de l'Europe ; l'islam est le fanatisme, comme l'Espagne du temps de Philippe II et l'Italie du temps de Pie V l'ont à peine connu ; L'islam est le dédain de la science, la suppression de la société civile ; c'est l'épouvantable simplicité de l'esprit sémitique, rétrécissant le cerveau humain, le fermant à toute idée délicate, à tout sentiment fin, à toute recherche rationnelle, pour le mettre en face d'une éternelle tautologie : Dieu est Dieu …
Discours au Collège de France De la part des peuples sémitiques dans l'Histoire de la civilisation, 1862.
Cette civilisation musulmane, maintenant si abaissée, a été autrefois très brillante. Elle a eu des savants, des philosophes. Elle a été, pendant des siècles, la maîtresse de l'Occident chrétien. Pourquoi ce qui a été ne serait-il pas encore ? Voilà le point précis sur lequel je voudrais faire porter le débat. Y a-t-il eu réellement une science musulmane, ou du moins une science admise par l'islam, tolérée par l'islam ? Il y a dans les faits qu'on allègue une très réelle part de vérité. Oui ; de l'an 775 à peu près, jusque vers le milieu du xiiie siècle, c'est-à-dire pendant cinq cents ans environ, il y a eu dans les pays musulmans des savants, des penseurs très distingués. On peut même dire que, pendant ce temps, le monde musulman a été supérieur, pour la culture intellectuelle, au monde chrétien.
...
Tout fut changé quand, vers l'an 750, la Perse prit le dessus et fit triompher la dynastie des enfants d'Abbas sur celle des Beni-Omeyya, Le centre de l'islam se trouva transporté dans la région du Tigre et de l'Euphrate. Or, ce pays était plein encore des traces d'une des plus brillantes civilisations que l'Orient ait connues, celle des Perses Sassanides, qui avait été portée à son comble sous le règne de Ghosroès Nou-sehirvan. L'art et l'industrie florissaient en ces pays depuis des siècles; Ghosroès y ajouta l'activité intellectuelle. La philosophie, chassée de Constantinople, vint se réfugier en Perse; Ghosroès fit traduire les livres de l'Inde. Les chrétiens nestoriens, qui formaient l'élément le plus considérable de la population, étaient versés dans la science et la philosophie grecques ; la médecine était tout entière entre leurs mains ; leurs évéques étaient des logiciens, des géomètres. Dans les épopées persanes, dont la couleur locale est empruntée aux temps sassanides, quand Roustem veut construire un pont, il fait venir un djathalik (catholicos, nom des patriarches ou évêques nestoriens) en guise d'ingénieur.
Le terrible coup de vent de l'islam arrêta net, pendant une centaine d'années, tout ce beau développement iranien. Mais l'avènement des Abbassides sembla une résurrection de l'éclat des Ghosroès. La révolution qui porta cette dynastie au trône fut faite par des troupes persanes, ayant des chefs persans. Ses fondateurs, Âboul-Âbbas et surtout Mansour, sont toujours entourés de Persans. Ce sont en quelque sorte des Sassanides ressuscités ; les conseillers intimes, les précepteurs des princes, les premiers ministres sont les Barmékides, famille de l'ancienne Perse, très éclairée, restée fidèle au culte national, au parsisme, et qui ne se convertit à l'islam que tard et sans conviction. Les nestoriens entourèrent bientôt ces califes peu croyants et devinrent, par une sorte de privilège exclusif, leurs premiers médecins. Une ville qui a eu dans l'histoire de l'esprit humain un rôle tout à fait à part, la ville de Harran, était restée païenne et avait gardé toute la tradition scientifique de l'antiquité grecque ; elle fournit à la nouvelle école un contingent considérable de savants étrangers aux religions révélées, surtout d'habiles astronomes.
— Conférence prononcée à la Sorbonne, L'Islamisme et la Science, 1883.,
Le sociologue Gustave Le Bon commente la conférence, intitulée L'Islamisme et la Science et prononcée par Ernest Renan à la Sorbonne en 1883 :

« (…) l'antagonisme intérieur entre l'homme ancien créé par le passé, et l'homme moderne formé par l'observation personnelle, produit dans l'expression des opinions les contradictions les plus curieuses. Le lecteur trouvera un exemple remarquable de ces contradictions, dans l'intéressante conférence faite à la Sorbonne, sur l'islamisme : l'auteur veut prouver la nullité des Arabes, mais chacune de ses assertions se trouve généralement combattue par lui-même à la page suivante (…) les préjugés s'effacent un instant, le savant reparaît et est obligé de reconnaître l'influence exercée par les Arabes sur le Moyen Âge, et l'état prospère des sciences en Espagne pendant leur puissance. Malheureusement les préjugés inconscients l'emportent bientôt (…) L'éminent écrivain semble un peu chagrin quelquefois de la façon dont il malmène les Arabes. La lutte entre l'homme ancien et l'homme moderne aboutit à cette conclusion tout à fait imprévue, qu'il regrette de n'être pas un disciple du prophète : Je ne suis jamais entré dans une mosquée, sans une vive émotion, et, le dirai-je, sans un certain regret de n'être pas musulman. »
La suite immédiate de cette phrase provoque une polémique. En effet, il y accuse l'islam de s'opposer à la liberté et en conséquence au progrès de l'humanité :
(…) pour la raison humaine, l'islamisme [nous dirions aujourd'hui : l'« islam »] n'a été que nuisible. Les esprits qu'il a fermés à la lumière y étaient déjà sans doute fermés par leurs propres bornes intérieures ; mais il a persécuté la libre pensée, je ne dirais pas plus violemment que d'autres systèmes religieux, mais plus efficacement. Il a fait des pays qu'il a conquis un champ fermé à la culture rationnelle de l'esprit. »
Aussi bien Renan que Le Bon omettent de signaler que l'islam a connu deux périodes très distinctes : celle des Arabes prônant l'Ijtihad (guerre sainte contre ses passions) propice à l'esprit scientifique, puis au xiie siècle l'accent mis plutôt par les Ottomans sur le jihad simple, guerre contre autrui, qui coïncide en effet avec la fin d'une période scientifique faste.
Djeman ad Dîn, intellectuel afghan, alors en voyage à Paris, répond à Renan dans Le Journal des Débats 23 : il est permis de se demander comment la civilisation arabe, après avoir jeté un si vif éclat dans le monde, s’est éteinte tout à coup ; comment ce flambeau ne s’est pas rallumé depuis, et pourquoi le monde arabe reste toujours enseveli dans de profondes ténèbres et ajoute : Les religions, de quelque nom qu’on les désigne, se ressemblent toutes. Aucune entente ni aucune réconciliation ne sont possibles entre ses religions et la philosophie. La religion impose à l’homme sa foi et sa croyance, tandis que la philosophie l’en affranchit totalement ou en partie. Comment veut-on dès lors qu’elles s’entendent entre elles ? ce qui va tout à fait dans le sens de Renan. Il y reste cependant positif : « je ne peux pas m’empêcher d’espérer que la société mahométane arrivera un jour à briser ses liens et à marcher résolument dans la voie de la civilisation à l’instar de la société occidentale pour laquelle la foi chrétienne, malgré ses rigueurs et son intolérance, n’a point été un obstacle invincible. Non, je ne peux admettre que cette espérance soit enlevée à l’islam. Je plaide ici auprès de M. Renan, non la cause de la religion musulmane, mais celle de plusieurs centaines de millions d’hommes qui seraient ainsi condamnés à vivre dans la barbarie et l’ignorance .
Il reviendra à Mustapha Kémal de tenter de matérialiser autoritairement cet espoir en fondant manu-militari la Turquie moderne.

Posté le : 26/02/2016 22:33
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La Nation et la Race

La vérité est qu'il n'y a pas de race pure et que faire reposer la politique sur l'analyse ethnographique, c'est la faire porter sur une chimère. Les plus nobles pays, l'Angleterre, la France, l'Italie, sont ceux où le sang est le plus mêlé. L'Allemagne fait-elle à cet égard une exception ? Est-elle un pays germanique pur ? Quelle illusion ! Tout le Sud a été gaulois. Tout l'Est, à partir d'Elbe, est slave. Et les parties que l'on prétend réellement pures le sont-elles en effet ? Nous touchons ici à un des problèmes sur lesquels il importe le plus de se faire des idées claires et de prévenir les malentendus.
Les discussions sur les races sont interminables, parce que le mot race est pris par les historiens philologues et par les anthropologistes physiologistes dans deux sens tout à fait différents. Pour les anthropologistes, la race a le même sens qu'en zoologie ; elle indique une descendance réelle, une parenté par le sang. Or l'étude des langues et de l'histoire ne conduit pas aux mêmes divisions que la physiologie .
« La langue invite à se réunir ; elle n'y force pas. Les États-Unis et l'Angleterre, l'Amérique espagnole et l'Espagne parlent la même langue et ne forment pas une seule nation. Au contraire, la Suisse, si bien faite, puisqu'elle a été faite par l'assentiment de ses différentes parties, compte trois ou quatre langues. Il y a dans l'homme quelque chose de supérieur à la langue : c'est la volonté. La volonté de la Suisse d'être unie, malgré la variété de ses idiomes, est un fait bien plus important qu'une similitude souvent obtenue par des vexations.
Qu'est-ce qu'une nation ?, conférence faite en Sorbonne, le 11 mars 1882, Calmann Lévy, 1882, p. 16.

Prémonition des guerres à venir

Contrairement à Victor Hugo pour qui le xxe siècle verrait l'avènement de la paix mondiale, Renan, devant le monolithisme culturel de la Prusse, prévoit que cette attitude ne pourra « mener qu'à des guerres d'extermination, analogues à celles que les diverses espèces de rongeurs ou de carnassiers se livrent pour la vie. Ce serait la fin de ce mélange fécond, composé d'éléments nombreux et tous nécessaires, qui s'appelle l'humanité24. » Les deux guerres mondiales viendront confirmer ce douloureux pressentiment.

Démocratie

La fin de l'humanité, c'est de produire des grands hommes ; le grand œuvre s'accomplira par la science, non par la démocratie.

— Ernest Renan, Dialogues et fragments philosophiques.

Les Affrontements de Tréguier 1903-1904

Même après son décès, Ernest Renan continua à susciter de violentes controverses entre « laïques » et « cléricaux », en particulier dans sa ville natale où il avait acquis une maison, aujourd'hui devenue le musée « La maison d'Ernest Renan » de Tréguier. L'érection de sa statue sur la place du Martray, devant la cathédrale, inaugurée le 13 septembre 1903 par le Président du conseil Emile Combes en personne, fut vécue comme une véritable provocation par les cléricaux qui protestèrent vigoureusement et répliquèrent par l'édification d'un « calvaire de réparation », dit aussi « calvaire de protestation », encore visible sur l'un des quais du port de Tréguier.

Œuvres:

De l'origine du langage 1848
L'Âme bretonne 1854
Histoire générale et systèmes comparés des langues sémitiques 1855
Études d'histoire religieuse 1857
Essais de morale et de critique 1859
Qu’est-ce qu’une nation ? Conférence prononcée le 11 mars 1882 à la Sorbonne Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales.
Qu'est-ce qu'une nation ? 1882, Texte complet en ligne, Bibliothèque Rutebeuf
Prière sur l'Acropole 1865
Histoire des origines du christianisme - 7 volumes - 1863-1881
Vie de Jésus 1863 Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales, 13e édition révisée, 1867.
Les Apôtres 1866
Saint Paul 1869
L’Antéchrist 1873
Les Évangiles et la seconde génération chrétienne 1877
L’Église chrétienne 1879
Marc-Aurèle et la fin du monde antique 1882
Index 1883
La Réforme intellectuelle et morale de la France 1871 Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales.
Drames philosophiques
Caliban 1878
L’Eau de Jouvence 1881
Le Prêtre de Némi 1885
L’Abbesse de Jouarre 1886
Souvenirs d'enfance et de jeunesse 1883 Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales.
Histoire du peuple d’Israël 1887-1893, 5 volumes
L’Avenir de la science, pensées de 1848 1890 Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales.

Politique

Questions contemporaines 1868

Littérature

Essais de morale et de critique 1859
Henriette Renan, souvenir pour ceux qui l’ont connue 1862
Mélanges d’histoire et de voyages 1878
Discours et conférences 1887
Feuilles détachées 1892
Patrice 1908
Fragments intimes et romanesques 1914
Voyages : Italie, Norvège 1928
Ernest Renan et l’Allemagne. 1945
Sur Corneille, Racine et Bossuet 1928

Philosophie

Averroës et l’averroïsme 1852
De philosophia peripatetica, apud Syros 1852
Dialogues et fragments philosophiques 1876 Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales.
Examen de conscience philosophique 1889

Histoire et religion

Étude d’histoire religieuse 1857
Le Livre de Job 1858
Le cantique des cantiques 1860
Histoire littéraire de la France au xive siècle 1865, avec la collaboration de Victor Le Clerc
La Réforme intellectuelle et morale de la France 1871
Conférences d’Angleterre 1880
L’Ecclésiaste 1881
Nouvelles études d’histoire religieuse 1884
Le bouddhisme 1884, Éditions Lume
Études sur la politique religieuse du règne de Philippe le Bel 1899
Mélanges religieux et historiques 1904
Essai psychologique sur Jésus-Christ 1921

Linguistique et archéologie

Histoire de l'étude de la langue grecque dans l'Occident de l'Europe depuis la fin du ve siècle 2009
De l’origine du langage 1848-1858
Histoire générale des langues sémitiques 1855
Mission de Phénicie 1864-1874

Correspondance

Lettres intimes 1896
Nouvelles lettres intimes 1923
Correspondance avec Berthelot 1898
Lettres du séminaire 1902
Emanuelle 1913
Lettres à son frère Alain 1926
Correspondance 1927
Cahiers de jeunesse 1906
Nouveaux cahiers de jeunesse 1907
Travaux de jeunesse 1931
Mission de Phénicie 1865-1874
La Poésie des races celtiques — Publié dans la Revue des deux Mondes, 2e série, tome 5, 1854, pp. 473–506.
L'avenir de la science 1890
Bonnat l'a peint en 1891 ? assis dans sa maison de Tréguier - dans une attitude analogue à celle du célèbre Monsieur Bertin d'Ingres - portrait reproduit ci-dessus et qui fut prêté en 1922 par Noémie Renan à l'exposition Cent ans de peinture française (1821-1921) d'Ingres au Cubisme, organisée au profit du Musée de Strasbourg au siège parisien de la Chambre des Antiquaires (reprod. par Léandre Vaillat ds "L'Illustration" no 4126, 1/04/1922 - arch.pers..

Bibliographie

Philippe Barret, Ernest Renan. Tout est possible, même Dieu !, François Bourin, 1992
Jean Balcou, Ernest Renan, une biographie, Honoré Champion, 2015
Henry Laurens, Ernest Renan, la science, la religion, la République, Collège de France, Colloque annuel 2012, Odile Jacob, 2013
Francis Mercury, Renan, Olivier Orban, 1990
Jean-Pierre van Deth, Ernest Renan, Fayard, 2012

Sur Renan et la Bretagne

René d’Ys, Renan en Bretagne, 1904.
Léon Dubreuil, Rosmaphamon ou la vieillesse de Renan, 1946.
R.-M. Galand, L’Âme celtique de Renan, 1959.
Jean Balcou, Ernest Renan l’hérésiarque, dans Histoire littéraire et culturelle de la Bretagne, Champion-Slatkine, Paris-Genève, 1987.
Jean Balcou, Renan et la Bretagne, Champion, 1992.

Sur Renan philosophe

Paul Bourget, Ernest Renan, essai Quantin, 1883
Léon Brunschvicg, Sur la philosophie d'Ernest Renan dans Revue de métaphysique et de morale, 1re année, 1893, p. 87-97
R. Dussaud, L'Œuvre scientifique d'Ernest Renan, 1951.
André Stanguennec, Ernest Renan. De l'idéalisme au scepticisme, Editions Honoré Champion, 2015.

Sur les idées politiques de Renan

(eu) Joxe Azurmendi, Historia, arraza, nazioa. Renan eta nazionalismoaren inguruko topiko batzuk, Donostia: Elkar, 2014.
Edouard Richard, Ernest Renan penseur traditionaliste ? Presses universitaires d'Aix-Marseille, 1996, 402 p.

Musées

Musée Ernest-Renan à Tréguier
Musée de la vie romantique, Hôtel Renan-Scheffer, Paris
qui conserve, avec d'autres documents et archives ses portraits par Henry Scheffer, peintre - René de Saint-Marceaux, sculpteur et Léopold Bernstamm, sculpteur.

QU'EST-CE QU'UNE NATION ? Ernest Renan


Conférence prononcée le 11 mars 1882 à la Sorbonne et publiée le 26 mars suivant dans le bulletin de l'Association scientifique de France, Qu'est-ce qu'une nation ? apparaît comme le testament politique de Renan (1823-1892). Partagée entre la religion et la science, l'existence de ce dernier aura été marquée par deux événements majeurs : une crise de conscience qui l'amena en octobre 1845 à renoncer à la carrière ecclésiastique, en rompant avec le catholicisme et ses années de formation au petit puis au grand séminaire du diocèse de Paris ; une crise nationale, politique et sociale consécutive à la défaite de Sedan en 1870 et à laquelle il entreprit de trouver une issue dans La Réforme intellectuelle et morale de la France 1871.
Lorsqu'il en vient à s'interroger sur les fondements de l'identité nationale, celui qui avait accédé, en 1862, à la chaire d'hébreu du collège de France, et provoqué l'année suivante un scandale considérable en publiant sa Vie de Jésus, est devenu un des grands maîtres à penser de la IIIe République : il a été élu en 1878 à l'Académie française et il s'apprête à publier ses Souvenirs d'enfance et de jeunesse (1883) qui lui assureront une large popularité. C'est en sage qu'il s'exprime alors sur une question qui a dominé tout le siècle, avec la diffusion du concept de nation issu de la Révolution française : le problème des nationalités et des mouvements nationalistes en Europe. La réponse qu'il lui donne est en germe dans la correspondance qu'il entretint, en 1870-1871, avec le savant allemand Strauss, à propos de l'annexion de l'Alsace et de la Lorraine. La « politique des races » s'y trouve, en effet, déjà critiquée au nom d'une politique du droit des nations.

La question de l'identité nationale

Après avoir précisé son dessein qui est d'analyser « une idée, claire en apparence, mais qui prête aux plus dangereux malentendus », Renan montre, dans une première partie, que les nations entendues comme individualités historiques constituent un phénomène nouveau dans l'histoire. Ce qui, d'après lui, caractérise les différents États européens, « c'est la fusion des populations qui les composent », et l'on n'a pas à s'attarder sur les vicissitudes des processus qui l'ont opérée : « L'oubli, dit-il, et même l'erreur historique sont un facteur essentiel de la création d'une nation. »
La seconde partie de son propos s'ouvre sur la constatation d'une dé-liaison, celle de la nation et d'un principe dynastique ; à côté du droit dynastique existe un droit national. Il s'agit dès lors d'identifier le « fait tangible » dont ce dernier peut procéder. Ce n'est pas la race ; la race pure est une chimère, comme l'est la politique qui prétend se fonder sur l'ethnographie ; le vocable, au reste entendu dans de multiples sens, désigne un fait qui, certes capital à l'origine, « va toujours perdant de son importance ». Ce n'est pas la langue, formation historique qui « invite à se réunir » sans y forcer, ni la religion, devenue « chose individuelle », ni la communauté des intérêts sans attaches sentimentales – une union douanière n'est pas une patrie –, ni enfin la géographie, les frontières naturelles : une nation n'est pas un groupe « déterminé par la configuration du sol ».
On s'achemine, au terme de ces réfutations, vers la célèbre définition de la nation donnée par Renan dans la dernière partie de sa conférence : « Une nation est une âme, un principe spirituel ... une grande solidarité, constituée par le sentiment des sacrifices qu'on a faits et de ceux qu'on est disposé à faire encore. »
Originalité et complexité d'une réponse

Repris en 1887 dans le volume intitulé Discours et conférences, ce « morceau » est celui auquel Renan a dit attacher le plus d'importance. « J'en ai pesé, déclare-t-il, chaque mot avec le plus grand soin : c'est ma profession de foi en ce qui touche les choses humaines, et, quand la civilisation moderne aura sombré par suite de l'équivoque funeste de ces mots : nation, nationalité, race, je désire qu'on se souvienne de ces vingt pages-là. Je les crois tout à fait correctes. » On a pu les rapprocher de celles où Michelet fait de la nation le produit d'un acte héroïque de volonté transcendant tous les déterminismes. Ainsi l'auteur du Peuple écrit, dans la Préface de 1869 à son histoire de France : « La France a fait la France, et l'élément fatal de la race m'y semble secondaire. Elle est fille de sa liberté. » Elles ne sont pas non plus sans points communs avec certains passages du texte intitulé L'Alsace est-elle allemande ou française ?, rédigé par Fustel de Coulanges au lendemain de la guerre de 1870 : « Ce qui distingue les nations, ce n'est ni la race, ni la langue. Les hommes sentent dans leur cœur qu'ils sont un même peuple lorsqu'ils ont une communauté d'idées, d'intérêts, d'affections, de souvenirs et d'espérances. Voilà ce qui fait la patrie. ... La patrie, c'est ce qu'on aime. »
La même assimilation de la nation à ce complexe sentimental qu'est la patrie est effectuée par Renan qui, dans sa définition, associe constat objectif et représentation subjective aussi étroitement qu'il unit l'héritage et l'avenir. Un nation suppose, rappelle-t-il, un passé, « un héritage de gloire et de regrets à partager », et aussi d'avoir souffert, joui, espéré ensemble. Elle suppose également « dans l'avenir, un même programme à réaliser » ; « elle se résume pourtant dans le présent par un fait tangible : le consentement, le désir clairement exprimé de continuer la vie ensemble ». Dans ce chef-d'œuvre de pédagogie et de rhétorique devenu, tout au long du XXe siècle, un classique des instituts de sciences politiques, se combinent donc une conception de la nation qui place dans le passé le fondement de l'identité collective – la terre et les morts que Barrès devait célébrer –, et l'affirmation que la nation est le produit de ceux qui la composent, ce qui renvoie au libre droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Bernard Valade




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Posté le : 26/02/2016 22:32

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Maurice Renard
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Le 28 février 1875 naît Maurice Renard

à Châlons-sur-Marne, mort le 18 novembre 1939 à 64 ans, à Rochefort-sur-Mer, écrivain français, spécialisé dans le fantastique, la science-fiction et le roman policier.Auteur français de roman fantastique, roman de science-fiction, roman policier. Ses Œuvres principales sont Le Docteur Lerne, sous-dieu 1908, Le Péril bleu 1910, Les Mains d'Orlac 1910

Sa vie

S'il naît à Châlons-sur-Marne, au 7 rue du Grenier-au-Sel, dans une famille bourgeoise, c'est à Reims, où son père, magistrat, a été nommé président du tribunal d'instance en 1877, que Maurice Renard passe son enfance.
Son grand-père Pierre Édouard Renard était également haut magistrat, ainsi que maire d'Épernay.
L'enfance de Maurice est rythmée par des séjours d'été à Hermonville, où ses grands-parents possèdent le château Saint-Rémy détruit en 1918, et où la famille occupe dans le vaste parc un petit pavillon, le clos Saint-Vincent.
Seul garçon et de loin le benjamin de trois enfants, il est un enfant solitaire, choyé par ses parents, marqué par ses lectures – Charles Dickens, Edgar Poe notamment – et par les mannequins du magasin de bonneterie de ses grands-parents à Reims.
Fin 1886, Maurice Renard est interne de l’École Monge, 145 boulevard Malesherbes à Paris, avant de revenir à Reims en 1892, au collège des Bons-Enfants.
En 1894, il obtient son baccalauréat en lettres et en philosophie.
Il effectue trois années de service militaire à Reims 1896-1899 avec le grade de maréchal des logis, au cours desquelles il découvre Herbert George Wells. En 1899, il s'installe à Paris et fait des études de droit qu'il abandonne bientôt pour se consacrer à la littérature.
Il publie un hommage à Victor Hugo, lu à la Comédie-Française.
Puis, sous le pseudonyme de Vincent Saint-Vincent il choisit ce pseudonyme pour ne pas être confondu avec Jules Renard, mais y renonce en découvrant qu'il s'agit d'un patronyme réel, il publie son premier recueil de contes Fantômes et fantoches en 1905, fruit d'inspirations diverses, où l'on note l'influence de Herbert George Wells, dans Les vacances de monsieur Dupont, un Monde perdu avant la lettre.
En 1903, il épouse Stéphanie La Batie.
Le couple aura quatre enfants : Renaud né en 1904, Rémi 1905-1977, Cyril né en 1915, Daniel décédé à 18 mois en 1919. Il s'installe d'abord no 85 avenue Kléber puis, en février 1910, emménage no 8 rue de Tournon.
Des hôtes illustres fréquentent son salon : Colette, Pierre Benoit, Henry de Montherlant entre autres.
Le Docteur Lerne, le premier roman de Renard, paraît en 1908, et est dédié à H.G. Wells : le récit aborde le thème du savant fou, et est suivi par Le Voyage immobile en 1909.
Renard publie Le Péril bleu en 1912, roman remarqué par Louis Pergaud. Il fonde la revue poétique La Vie française et publie Monsieur d'Outremort et autres histoires singulières en 1913.
Il sert comme officier de cavalerie pendant la Première Guerre mondiale, de 1914 à début 1919.
Son roman Les Mains d'Orlac paraît en feuilleton en 1920, il sera adapté plusieurs fois au cinéma notamment pour le film Les Mains d'Orlac Mad Love réalisé par Karl Freund aux États-Unis en 1935.
En 1921 est publié L'Homme truqué et, en 1928, le roman Un homme chez les microbes.
Maurice Renard divorce en 1930 et se remarie.
À partir de 1935, année de la publication du roman policier Le Mystère du masque, dans la collection Le Masque, l'écrivain commence à faire paraître de nombreuses nouvelles et des feuilletons dans divers quotidiens.
Il devient également vice-président de la Société des gens de lettres.
Il meurt des suites d'une opération chirurgicale à Rochefort-sur-Mer en 1939. Il repose à l'île d'Oléron, au cimetière de Dolus-d'Oléron où il possédait une petite maison, son lieu de séjour habituel. Une plaque y est apposée.

Œuvre Romans

Maurice Renard écrivain
Le Docteur Lerne, sous-dieu 1908
Le Voyage immobile 1909
Les Mains d'Orlac 1920
Le Péril bleu 1912 ; réédition, Éditions Jules Tallandier, coll. À travers l'Univers 1953
L'Homme truqué 1921
Le Singe, coécrit avec Albert-Jean 1925. Ce roman met en scène l'écrivain J.-H. Rosny aîné.
L'Invitation à la peur 1926
? Lui ? 1927
Notre-Dame Royale. Tableau du sacre de Louis XVI à Reims 1927. Couronné par l'Académie française.
Un homme chez les microbes 1928 ; réédition, Éditions Métal, 1956
Le Carnaval du mystère 1929
La Jeune Fille du yacht 1930 illustrations de Auguste Leroux, Éd. L'Illustration, revue La Petite Illustration trois fascicules brochés; no 468, 22 février 1930; no 469, 1er mars 1930; no 470, 8 mars 1930 ;
Celui qui n'a pas tué 1932
Le Maître de la lumière feuilleton, 1933, publié à titre posthume en 1947
Le Bracelet d'émeraudes feuilleton, 1933
Colbert feuilleton, 1934
Le Mystère du masque, Paris, Librairie des Champs-Élysées, Le Masque no 176 1935
Le Violon de la reine feuilleton, 1935
Les Mousquetaires des Halles 1936
Fleur dans la tourmente feuilleton, 1936
Le Signe du cœur feuilleton, 1937
Les Trois Coups du destin feuilleton, 1938
La Redingote grise feuilleton, 1939
La Prison d'argile 1942

Nouvelles

Le Professeur Krantz, illustrations de L. Pouzargues, Éd. L'Illustration, revue La Petite Illustration no 571, 2 avril 1932
La Cantatrice, in Fiction no 2, Éditions OPTA, décembre 1953;
Le Brouillard du 26 octobre, in Fiction no 6, Éditions OPTA, mai 1954;
La Gloire du Comacchio, in Fiction no 20, Éditions OPTA, juillet 1955;
L'Homme au corps subtil, in Fiction no 62, Éditions OPTA, janvier 1959;
La Rumeur dans la montagne, in Fiction no 88, Éditions OPTA, mars 1961;
Le Lapidaire, in Fiction no 133, Éditions OPTA, décembre 1964;
Suzannah, in Fouilles archéobibliographiques Fragments, Bibliogs, 2015.

Recueil de nouvelles

Fantômes et Fantoches, sous le pseudonyme de Vincent Saint Vincent 1905 - recueil de 7 nouvelles
Monsieur d'Outremort et autres histoires singulières 1913 - recueil de nouvelles,
Papillon de la mort, NéO, coll. Fantastique - SF - aventure no 139, 1985
Ce recueil de nouvelles publié à titre posthume reprend des nouvelles publiées dans des magazines. Il contient les nouvelles suivantes :
L'Écharpe gris souris 1929
Cambriole 1929
Elle 1929
L'Étrange Souvenir de M. Liserot 1929
À l'eau de rose 1929
Le Papillon de la mort 1929
La Rumeur dans la montagne 1923
Le Professeur Krantz 1932
Le Rendez-vous 1909
Le Lapidaire 1905
La Grenouille 1926
La Damnation de l'"Essen" 1926
L'Affaire du miroir 1926
Théâtre

L'Amant de la Morte, pièce de Théâtre de Grand Guignol 1925

Adaptations cinématographiques et télé Au cinéma

1924 : Les Mains d'Orlac Orlac’s Hände, film autrichien muet réalisé par Robert Wiene, avec Conrad Veidt
1935 : Les Mains d'Orlac Mad Love, film américain réalisé par Karl Freund, avec Peter Lorre
1960 : Les Mains d'Orlac The Hands of Orlac, film franco-britannique réalisé par Edmond T. Gréville, avec Mel Ferrer
1962 : Hands of a Stranger, film américain réalisé par Newton Arnold, avec Paul Lukather

À la télévision

Le Péril bleu de Jean-Christophe Averty 1975, avec Jean-Roger Caussimon
L'Étrange Château du docteur Lerne de Jean-Daniel Verhaeghe 1983, avec Jacques Dufilho, Pierre Clémenti, Dora Doll, Pierre Etaix
Les Mains de Roxana de Philippe Setbon France 2013, avec Sylvie Testud et Loup-Denis Elion




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Posté le : 26/02/2016 20:54

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Henri Breuil
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Le 28 février 1877 naît Henri Breuil à Mortain Manche

connu sous le nom de l'abbé Breuil, mort le 14 août 1961 à L'Isle-Adam Val-d'Oise à 84 ans, à l'époque Seine-et-Oise, est un prêtre catholique et préhistorien français. Il fut surnommé le pape de la Préhistoire, il s’est illustré par ses contributions à la classification des industries paléolithiques et à l’étude de l’art pariétal préhistorique. Son activité principale est : Archéologie, anthropologie, ethnologie et géologie. Il reçoit plusieurs distinctions , la médaille Daniel Giraud Elliot 1924 puis Commandeur de la Légion d'honneur 1958. Il est enterré à Belleu Aisne.

En bref

Originaire d'une famille de bourgeoisie provinciale, Henri Breuil passe son enfance à Clermont-de-l'Oise, où son père est procureur de la République, fait ses études au collège de Saint-Vincent de Senlis, entre au séminaire d'Issy-les-Moulineaux 1895, puis à Saint-Sulpice à Paris 1897, où il est ordonné prêtre 1900. Libéré des servitudes paroissiales, il entreprend une carrière d'homme de science, avec l'accord de l'Église, à laquelle il manifesta, sa vie durant, une stricte obéissance. Son existence s'identifie avec le développement de l'étude de la préhistoire dans la première moitié du XXe siècle, mais il est excessif, comme on l'a fait, de le qualifier de père de la préhistoire ; tout au plus a-t-il souhaité en être le pape, comme il disait plaisamment, et en a-t-il été effectivement un des plus efficaces serviteurs.
Quelques dates jalonnent une carrière sans problèmes : 1901, découverte avec R. Capitan et D. Peyrony de la grotte ornée des Combarelles, aux Eyzies Dordogne ; 1902, voyage avec E. Cartailhac à Altamira ; 1905-1910, privat-docent à la faculté des sciences de Fribourg, Suisse ; 1910, professeur d'ethnographie préhistorique à l'Institut de paléontologie humaine, fondé par le prince Albert Ier de Monaco ; 1929, professeur au Collège de France chaire de préhistoire ; 1938, membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres. Henri Breuil voyage beaucoup, se rend fréquemment en Espagne et au Portugal, va en Chine 1931 et 1935, en Éthiopie 1933, et plusieurs fois en Afrique du Sud 1929, 1942-1945, 1947-1949, 1951.
Il réalise une œuvre immense dont témoignent des centaines de publications, avec des activités et des intérêts multiples qui se sont constamment chevauchés. Ses contributions essentielles ont trait au Paléolithique inférieur, au Paléolithique supérieur, à l'art franco-cantabrique et, enfin, aux peintures rupestres d'Afrique.
L'étude géologique des terrasses de la Somme H. Breuil et L. Koslowski, Études de stratigraphie paléolithique dans le nord de la France, la Belgique et l'Angleterre, in L'Anthropologie, t. XLI, 1931 ; t. XLII, 1932 et, en Angleterre, des gisements de Clacton-on-Sea et de High-Lodge H. Breuil, Le Clactonien, in Préhistoire, fasc. II, 1932 sert de fondement à la théorie des phylums parallèles qu'il propose pour les industries du Paléolithique ancien. Outre les industries à bifaces dès longtemps reconnues (Chelléen ou Abbevillien, Acheuléen et Micoquien, il existe des industries sans bifaces, avec outils sur éclats Clactonien, Tayacien, Levalloisien). Elles évoluent parallèlement, les premières se manifestant dans les périodes chaudes interglaciaires, les secondes dans les périodes froides glaciaires. Cette théorie repose sur l'attribution de la basse terrasse de cinq mètres de la Somme à la glaciation de Riss, et sur l'affirmation qu'il existe une industrie autonome sans bifaces, à éclats Levallois, le Levalloisien. Ces points ont été contestés par F. Bordes, et la théorie n'est plus admise F. Bordes, Les Limons quaternaires du Bassin de Paris. Stratigraphie et archéologie paléolithique, Paris, 1954.
Contre les partisans de G. et A. de Mortillet qui, pour des raisons théoriques, soutiennent que le Solutréen est antérieur à l'Aurignacien, et en s'appuyant sur les stratigraphies établies par A. et J. Bouyssonie, D. Peyrony et lui-même Laussel, le Ruth, le roc de Combe-Capelle, etc., H. Breuil mène et gagne la bataille de l' Aurignacien présolutréen 1909. En 1912, il rassemble, compare et critique tous les documents valables sur le Paléolithique supérieur de la région classique et en établit magistralement les caractéristiques typologiques et la séquence évolutive (Les Subdivisions du Paléolithique supérieur et leur signification, Genève, 1912.
Henri Breuil effectue par milliers des relevés de gravures et de peintures dans les grottes franco-cantabriques Pair-non-Pair, La Mouthe, les Combarelles, Font-de-Gaume, Altamira, Le Castillo, Niaux, Le Portel, La Pileta, Minateda, les Trois-Frères, etc.. Il établit un classement chronologique de l'art rupestre d'après les superpositions de figures et les comparaisons de style avec les objets d'art mobilier, datés par les niveaux qui les contiennent ; cycle aurignaco-périgordien, avec figures en « profil absolu », avec une seule patte par paire, et encornures, oreilles, sabots, en perspective tordue, vus de face pour un animal de profil ; cycle solutréo-magdalénien, avec figures en perspective naturelle. Il attribue à la période paléolithique les peintures des abris du Levant espagnol que les savants datent, actuellement, d'une époque beaucoup plus tardive.
En Éthiopie, il relève les peintures de la grotte du Porc-Épic 1933, en Afrique du Sud la « Dame blanche de Brandberg, dans le Tsibab-Ravine 1947 et dans l'Érongo les fresques de Philip Cave 1951 : la présence dans ces peintures d'un type ethnique à peau claire et cheveux roux, différent des populations actuelles, lui fait supposer des migrations ou des influences de Nilotiques méditerranéens ? À la fin de sa vie, il les datait de ~ 1500, attribution trop ancienne d'après les spécialistes sud-africains. Pénétrant esprit d'observation, l'abbé Breuil, qui avait une rapidité incisive de jugement, était porté par une insatiable curiosité. Il vérifie, contrôle, trie, classe, compare les innombrables documents de la préhistoire, conclut, conscient, parfois à l'excès, de son génie, passionné, abrupt. Il a formé peu d'élèves, sans doute parce que son impatience souffrait mal la contradiction. Denise de Sonneville-bordes

Sa vie

Né d'un père procureur de la République à Mortain et à Clermont-de-l'Oise et de Cécile Morio de L'Isle, petite-fille du général Annet Morio de L'Isle, il entre au séminaire Saint-Sulpice en 1895 en même temps que Jean Bouyssonie 1877-1961, il suit les cours de sciences naturelles de Jean Guibert, auteur d'un traité intitulé Les Origines, questions d'Apologétique sur les rapports de la science et de la religion. Son enseignement fait une large place aux idées évolutionnistes alors relativement nouvelles. Il va faire un certain nombre de rencontres cruciales qui vont conforter son intérêt pour la science préhistorique naissante : Geoffroy d’Ault du Mesnil, Louis Capitan en 1896, Édouard Piette en 1897, chez qui il peut admirer des chefs-d’œuvre de l’art mobilier préhistorique, Denis Peyrony.
Ordonné prêtre le 9 juin 1900 à Saint-Sulpice, Henri Breuil obtient de ne pas être attaché à une paroisse après plusieurs tentatives infructueuses, grâce à l’évêque de Soissons que connaît bien son grand-père maternel qui fut sous-préfet. Il peut ainsi se consacrer entièrement à ses travaux de préhistorien dans un but d'apologétique catholique. Il obtient sa licence d'histoire naturelle en 1904.

Un préhistorien de renommée internationale

Dès 1905, il enseigne la préhistoire à l’université de Fribourg, puis à Paris prend en charge la chaire d'ethnographie historique de l’Institut de paléontologie humaine en 1910, ce qui fait de lui le premier préhistorien professionnel de France. Il enseigne au Collège de France de 1929 à 1947. Il est nommé membre de l’Institut de France en 1938. Bien que détestant l'enseignement, il construit paradoxalement sa carrière dans ce domaine afin de le faire reconnaître et financer par l'université et la Caisse des monuments historiques et préhistoriques.

Apport à la connaissance de la préhistoire Henri Breuil et l’art pariétal

En 1901, avec Louis Capitan et Denis Peyrony, il participe à la découverte de deux grottes ornées majeures de Dordogne, les Combarelles et Font-de-Gaume. Il commence à réaliser des relevés des gravures de la première et des peintures et gravures de la deuxième. En 1902, Émile Cartailhac le convie à étudier les peintures de Marsoulas et d’Altamira. Dès lors, il va participer à l’étude de nombreux sites ornés, en France les grottes du Tuc d’Audoubert, des Trois-Frères et de Saint-Cirq dite grotte du Sorcier, en Espagne Castillo, Tajo de las Figuras mais aussi en Afrique du Sud. Il sera notamment le premier préhistorien à visiter et décrire sommairement la grotte de Lascaux, avant de gagner l'Afrique.
Ses études vont lui permettre d'être reconnu désormais comme le spécialiste international de l'art pariétal préhistorique : en 1929, il reçoit une chaire au Collège de France, et en 1935, il obtient la première chaire du genre à l'université de Bordeaux.
Son ouvrage majeur, Quatre cents siècles d'art pariétal, paru en 1952, dresse pour la première fois un panorama de l'art pariétal paléolithique franco-cantabrique connu à l'époque et lui confère une autorité mondiale. Ce livre est l'aboutissement de plus de 700 jours d’études sous terre. Henri Breuil s'attache avant tout à relever et à décrire minutieusement les œuvres paléolithiques et à en préciser la chronologie qu'il imagine se dérouler en deux cycles successifs.
Plus tard, malgré son âge et ses difficultés visuelles, il ira authentifier les découvertes de Rouffignac révélées par le Spéléo-Club de Périgueux dès 1948 et reconnues seulement en 1954 par Louis-René Nougier et Romain Robert et de Villars découvertes par ces mêmes spéléologues.

Henri Breuil et les industries préhistoriques

Prenant conscience de l'importance des phénomènes périglaciaires, sa contribution majeure concernant les industries lithiques reste sa révision de stratigraphies de références du Paléolithique supérieur et la restitution en 1906 de la véritable position de l’Aurignacien dans la chronologie de cette période, au terme d'une étude méthodique de l'outillage lithique et osseux d'Europe en stratigraphie menée depuis 1905.
Sa passion le conduit à s’intéresser à toutes les formes de la culture matérielle paléolithique, toutes périodes confondues. Avec le père Pierre Teilhard de Chardin, exilé en Chine dans les années 1930, il participe aux recherches concernant le Sinanthrope à Zhoukoudian en Chine.
Il s’intéressa aux découvertes faites dans les gravières du quartier de Montières à Amiens et proposa de donner le nom de levalloisien pour désigner les industries à éclats sans biface dont de nombreux exemplaires furent trouvés de 1930 à 1950 à Montières. Il distingua également d'autres industries avec éclats le Clactonien et le Tayacien, en 1932.
En 1939, l'abbé Breuil proposa de substituer le nom d'Abbevilien à celui de Chelléen aux plus anciens silex taillés grossièrement et de façon irrégulière trouvés à Abbeville.

Henri Breuil et l'Afrique

Ses nombreux voyages en Afrique lui permettent de se lier à sir Ernest Oppenheimer, alors leader mondial de l'industrie de l'or et du diamant. Il peut examiner de nombreuses collections et livrer les premières publications synthétiques traitant de la Préhistoire africaine.
En Afrique du Sud, il prend une part importante au développement académique de la discipline et est même élu Président de la South African Archeological Society. Il se lie d'amitié avec le maréchal Jan Smuts, grâce à qui il obtient les moyens financiers et logistiques de ses expéditions. Plus tard, il se lie avec l'anthropologue sud-africain Phillip Tobias.
En 1918, le prospecteur et topographe allemand Reinhard Maack découvre sur une paroi rocheuse, une importante fresque rupestre, dans les monts du Brandberg 2 573 m, le plus haut massif montagneux de Namibie. En 1947, Henri Breuil visite cette découverte dont le personnage central, qu'il appelle la Dame blanche, le hante depuis qu'il a appris son existence dix-huit ans auparavant.

Principales publications

Henri Breuil a publié plus de 800 contributions concernant la Préhistoire en général et l'art préhistorique en particulier, ainsi que quelques-unes concernant la botanique et l'entomologie.
« La question aurignacienne. Étude critique de stratigraphie comparée, in Revue préhistorique, II, 1907, p. 173-219.
« Les subdivisions du Paléolithique supérieur et leur signification, in Cong.int. d'Anthr. et d'Arch. préhist., 1912, p. 165-238.
« Découverte d'une remarquable grotte ornée, au domaine de Lascaux, Montignac Dordogne, in C.R. de l'Acad. des Inscr. et Belles-Lettres, séance du 11 oct. 1940, p. 387-390
Quatre cents siècles d’art pariétal, Centre d'Études et de Documentation préhistoriques, 1952.
Des descriptions inédites de grottes ornées par H. Breuil Bernifal, la Mouthe, Combarelles II, la Calèvie devaient être publiées par l'abbé André Glory, décédé accidentellement en 1966. Elles ont été publiées par Brigitte et Gilles Delluc et D. Vialou en 1994, 1995 et 2006 dans le Bulletin de la Société historique et archéologique du Périgord.




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Posté le : 26/02/2016 19:57

Edité par Loriane sur 27-02-2016 16:33:09
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Marcel Pagnol
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Le 28 février 1895 naît Marcel Pagnol

à Aubagne Bouches-du-Rhône, écrivain, dramaturge, cinéaste et producteur français, mort à Paris le 18 avril 1974 à 79 ans.
Membre de l'Académie française. Auteur de langue français. Ses Œuvres principales sont Marius, Jean de Florette, Manon des sources, La Gloire de mon père, Le Château de ma mère
Il devient célèbre avec Marius, pièce représentée au théâtre en mars 1929. Il fonde à Marseille en 1934 sa propre société de production et ses studios de cinéma, et réalise de nombreux films avec les grands acteurs de la période en particulier Raimu, Fernandel et Pierre Fresnay : Angèle 1934, Regain 1937, La Femme du boulanger 1938…
En 1946, il est élu à l'Académie française. Après 1956, il s'éloigne du cinéma et du théâtre, et entreprend la rédaction de ses Souvenirs d'enfance avec notamment La Gloire de mon père et Le Château de ma mère. Il publie enfin, en 1962, L'Eau des collines, roman en deux tomes : Jean de Florette et Manon des Sources, inspiré de son film Manon des sources, réalisé dix ans auparavant et interprété par son épouse Jacqueline Pagnol.

En bref

Représentant un cas tout à fait particulier dans le panorama littéraire du XXe siècle, Marcel Pagnol est d'abord le prototype de l'auteur dramatique moderne, auquel le cinématographe a donné un nouveau moyen d'expression : ses œuvres ont ainsi connu un retentissement très vaste et très rapide, que le seul exercice du théâtre ne lui aurait pas offert. Il fait ensuite partie de ces artistes dont le sens aigu des affaires leur a permis de se libérer de la tutelle des industriels et des financiers. Devenu très vite son propre producteur de films, et, beaucoup plus tard, son propre éditeur, Marcel Pagnol a pu réaliser une œuvre cinématographique personnelle en toute liberté.
Cet aspect de son personnage l'a souvent desservi. Propriétaire de studios de prises de vues à Marseille, puis d'une maison d'édition à Monaco, Marcel Pagnol s'est vu dédaigné par une critique chagrine qui n'admet pas qu'un artiste puisse s'intéresser au destin économique de son œuvre, et pour qui l'homme d'affaires oblitère fatalement le poète.
Les années 1960 devaient pourtant faire apparaître, dans le domaine du cinéma tout au moins, Marcel Pagnol comme un novateur : nombreux sont aujourd'hui les cinéastes qui participent à la production de leurs œuvres, quand ils ne l'assurent pas entièrement. Mais ne nous y trompons pas : quelles que soient les raisons de sa réussite sociale, Marcel Pagnol reste, avant tout, un écrivain et un auteur dramatique de premier plan.
De Marseille à Paris. Il est né, le 28 février 1895, à Aubagne, où son père était instituteur public. Mais c'est à Marseille qu'il passe son enfance et qu'il commence des études de lettres. La famille a cependant gardé des attaches dans la région d'Aubagne, et il passe toutes ses vacances dans les collines qui dominent le hameau de La Treille. Il a conservé, de ce temps et de ces lieux, un souvenir ébloui, qu'il fixera plus tard dans plusieurs volumes, et aussi un attachement profond pour les paysages et les gens de Provence.
Les études de Marcel Pagnol s'achèvent à Montpellier avec une licence d'anglais. Il enseigne pendant quelques années, au cours desquelles il traduit Les Bucoliques de Virgile, et Hamlet. Au même moment, il écrit son premier roman, Pirouettes, qui ne paraîtra que quelques années plus tard. Ce petit livre, dont l'action se situe à Marseille, dans le quartier de la Plaine, et qui met en scène un personnage singulier, haut en couleur, manifeste un talent déjà sûr, plein de malice et de tendresse.
L'année 1924 voit à la fois les premières tentatives de Marcel Pagnol comme auteur dramatique et ses débuts dans la vie parisienne. Ses deux premières pièces représentées, Les Marchands de gloire (1925) et Jazz (1926), reflètent une certaine mode « mélo » et ne laissent pas prévoir la prochaine éclosion d'un nouveau talent. Deux ans plus tard, Topaze connaît un véritable triomphe, bientôt dépassé par celui de Marius (1929). Dès lors, le succès de Marcel Pagnol ne se démentira jamais.
En 1931, Fanny donne une suite à Marius. Mais le jeune auteur dramatique s'intéresse au cinéma. Il y fait ses débuts avec les adaptations de ses pièces en collaboration avec des réalisateurs professionnels. Après Marius (1931, Alexandre Korda) et Fanny (1933, Marc Allégret), il achève la trilogie par une œuvre directement écrite pour l'écran : César (1936), et il continue. Admirateur et ami de Jean Giono, il tourne Angèle (1934, d'après Un de Baumugnes) et Regain (1937). Puis, sur des scénarios de sa façon, La Femme du boulanger (1938) et La Fille du puisatier (1940).
Élu à l'Académie française en 1946, il tourne encore quelques films d'un intérêt moins soutenu, comme La Belle Meunière (1948), Manon des sources (1952) ou Les Lettres de mon moulin (1954, d'après Alphonse Daudet).
Pendant les vingt dernières années de sa vie, il revient à la plume, avec deux pièces de théâtre : Judas (1955) et Fabien (1956), et plusieurs volumes de souvenirs d'enfance, dont les deux premiers, La Gloire de mon père (1957) et Le Château de ma mère (1958), connaissent un immense succès.

Sa vie

Marcel Pagnol est le fils de Joseph Pagnol, instituteur à Aubagne depuis 1889, laïc et républicain, et d'Augustine Pauline Henriette Lansot, couturière à la santé fragile. Il est l'aîné de trois autres enfants : Paul, né en 1898, Germaine, née en 1902 et René, né en 1909. Un frère aîné, Maurice, né le 2 avril 1894 et mort le 18 août de la même année, ne sera jamais mentionné dans l'histoire familiale
Marcel Pagnol écrira en incipit de La Gloire de mon père Je suis né dans la ville d'Aubagne, sous le Garlaban couronné de chèvres, au temps des derniers chevriers ; il naît dans un appartement du troisième étage d'un immeuble bourgeois dont ses parents étaient locataires, au 162 cours Barthélémy.
Sa famille paternelle est originaire de Romanos, ses ancêtres ayant quitté l'Espagne au XVe siècle pour s'installer dans le Midi de la France. Ses aïeuls se spécialisent dans le métier d'armurier et d'artificier avant que son grand-père ne devienne tailleur de pierre, compagnon du Tour de France.

Une école précoce et buissonnière

En 1897, le jeune ménage s'établit dans le logement de fonction de l'école de Saint-Loup, à Marseille. Lorsqu'elle allait au marché, sa mère le laissait dans la classe de son père, qui eut un jour la surprise de le voir lire couramment, alors qu'il avait trois ans sa mère l’empêcha aussitôt de retourner à l'école avant l'âge requis.
Puis, à la rentrée 1900, Joseph étant nommé instituteur titulaire à l'école du Chemin des Chartreux, la plus grande école communale de Marseille, la famille emménage au54 de l'avenue des Chartreux. En 1902, les Pagnol emménagent rue du Jardin des Plantes, puis rue Terrusse, dans ce grand rez-de-chaussée, que complétait un sous-sol, éclairé, sur le derrière, par un petit jardin, où Marcel passera une grande partie de son enfance.
À partir de 1904, soucieux de la santé fragile d'Augustine, Joseph décide de louer pour les vacances une villa dans la colline, juste au bord d'un désert de garrigue qui va d'Aubagne jusqu'à Aix. Cette Bastide Neuve, située à la sortie du village de La Treille, à la périphérie de Marseille, et ses collines constitueront ce paradis de l'enfance heureuse où se déroulent les plus beaux épisodes de ses fameux Souvenirs d'enfance.
Reçu second à l'examen des bourses, il entre au lycée Thiers en 1905 où il poursuit de brillantes études, malgré une vie de demi-pensionnaire mouvementée, épopée savoureuse qu'il racontera dans les deux derniers tomes de Souvenirs Le Temps des secrets, Le Temps des amours. C'est là qu'il commence à écrire des poèmes qui paraîtront à partir de 1910 dans la revue Massilia. Il a pour condisciple l'élève Codert, treize ans, cancre d'avenir puisqu'il fera fortune dans l'industrie du matériel roulant qui le prend sous son aile, et Albert Cohen avec qui il se lie d'amitié.
Il n'a que 15 ans lorsqu'il perd sa mère, avec qui il entretenait une relation fusionnelle L'âge d'Augustine, c'était le mien, parce que ma mère, c'était moi, et je pensais, dans mon enfance, que nous étions nés le même jour. Un coup de froid ayant aggravé sa fragilité pulmonaire, Augustine meurt des suites d'une congestion le 16 juin 1910, à l'âge de 36 ans. Elle sera inhumée au cimetière marseillais de Saint-Pierre, puis à La Treille. Joseph s'installe alors avec ses enfants au quatrième étage du 117 cours Lieutaud. Il se remarie le 30 juillet 1912 avec Madeleine Julien, veuve qu'il avait engagée pour s'occuper du ménage et qui n'a que huit ans de plus que Marcel. Ce dernier l'accepte très mal, au point de se brouiller avec son père.
En 1913, à 18 ans, il obtient son baccalauréat de philosophie avec mention Assez bien, et commence ses études de lettres à l'Université d'Aix-en-Provence. Le 10 février 1914, il fonde, avec quelques copains de khâgne, la revue littéraire Fortunio qui deviendra ensuite Les Cahiers du Sud, dans laquelle il publie quelques poèmes et son premier roman, Le Mariage de Peluque. Puis, la Première Guerre mondiale éclatant, il est mobilisé au 163e régiment d'infanterie de Nice en même temps que son ami Lili des Bellons de son vrai nom, David Magnan. Il est réformé en janvier 1915 pour faiblesse de constitution.
Le 2 mars 1916, il épouse Simone Collin. En novembre de la même année, il obtient sa licence de lettres et littératures vivantes anglais. Nommé répétiteur d'anglais, il enseignera successivement aux collèges de Digne, Tarascon, Pamiers sur Ariège et Aix-en-Provence, avant d'être promu professeur adjoint au lycée Saint-Charles à Marseille de 1920 à 1922. Durant cette dernière année, il écrit deux drames en vers : Catulle puis, en collaboration avec Arno-Charles Brun, Ulysse chez les Phéaciens.

Paris : un professeur au théâtre

Nommé surveillant d'externat puis professeur adjoint au lycée Condorcet de Paris, il y enseigne l'anglais jusqu'en 1927, et il décide de prendre congé de l'Éducation nationale pour cause de littérature. Dès son arrivée dans la capitale en 1922, Pagnol a la chance d'y retrouver Paul Nivoix, ancien directeur de l'hebdomadaire marseillais Spectator devenu rédacteur à Comœdia, seul quotidien français des Lettres et des Arts. Grâce à son amitié, Pagnol pénètre le milieu des jeunes écrivains et du théâtre moderne, commence à douter de l'intérêt de ses tragédies grecques et romaines, se risque à signer en 1924, sous le pseudonyme de Castro, un vaudeville composé avec Nivoix, Tonton ou Joseph veut rester pur, qui à son grand étonnement remporte un petit succès au théâtre des Variétés, ce qui encourage les deux novices à persister et écrire leur première pièce de théâtre, Les Marchands de gloire. Représentée en 1925 au théâtre de la Madeleine, cette brillante satire du patriotisme est cependant boudée par le public, de même que sa deuxième pièce, Jazz, donnée en 1926 au théâtre des Arts. Mais Topaze, satire de l'arrivisme jouée au théâtre des Variétés en 1928, connaît un grand succès plus de huit cents représentations à Paris.
Lettre manuscrite de Marcel Pagnol au proviseur du Lycée Condorcet pour lui demander de s’absenter pour surveiller les répétitions de sa dernière pièce de théâtre. Archives nationales
La nostalgie de Marseille qu'il éprouve à Paris l'incite à écrire une pièce marseillaise, son entourage l'en dissuade aussitôt. Mais en 1926, ayant vu jouer à Bruxelles Le Mariage de mademoiselle Beulemans, il comprend qu'une œuvre locale, mais profondément sincère et authentique peut parfois prendre place dans le patrimoine littéraire d'un pays et plaire dans le monde entier. Et c'est ainsi que le 9 mars 1929, Marius, pièce en quatre actes et six tableaux, est créée au théâtre de Paris avec Raimu dans le rôle de César. C'est le triomphe universel pour les deux provençaux exilés qui, tout en s'apportant mutuellement la gloire et la célébrité, se lieront à vie d'une amitié aussi orageuse que sincère.
Séparé de Simone Collin depuis 1926, il rencontre la jeune danseuse anglaise Kitty Murphy. De leur union naîtra Jacques Pagnol en 1930, qui deviendra son assistant après la guerre, puis caméraman pour France 3 Marseille.

Œuvre cinématographique

L'année 1929 est décisive pour sa carrière : il assiste à Londres à la projection d'un des premiers films parlants, Broadway Melody et en est si bouleversé qu'il décide de se consacrer au cinéma parlant. Plus tard, devenu réalisateur, il aimera rappeler que c'est en 1895, l'année de sa naissance, qu'Auguste et Louis Lumière avaient projeté pour la première fois en public à quelques kilomètres d'Aubagne des photos animées sur un écran : l'Arrivée d'un train en gare de La Ciotat.
Pagnol fait la connaissance du directeur de la succursale française de la firme Paramount, Bob Kane, qui lui propose d'acheter les droits de sa pièce Marius cinq cent mille francs. Pagnol refuse, mais accepte de se contenter d'un simple pourcentage sur les recettes à condition que le film soit tourné avec tous les comédiens de la troupe théâtrale Raimu bien-sûr mais aussi Pierre Fresnay dans le rôle de Marius, Fernand Charpin dans celui de Panisse et tous les autres et sous sa direction. Kane, qui voulait imposer les vedettes en contrat avec sa firme, finit par accepter au début de 1931 mais exige un réalisateur américain. Ce sera Alexander Korda, hongrois émigré aux États-Unis où il a conquis Hollywood il se fixera ensuite en Angleterre où, naturalisé, il fera une brillante carrière . Sorti le 10 octobre 1931, Marius est l'un des premiers films à succès du cinéma parlant français. Les recettes sont colossales, y compris à l'étranger. Pressé par le public d'en écrire la suite, Fanny, pièce en trois actes et quatre tableaux, est créée sur scène en décembre 1931 au théâtre de Paris. C'est le deuxième volet de ce qui deviendra la célèbre trilogie marseillaise, dont l'action se passe dans l'ambiance légendaire du Bar de la Marine, sur le vieux port de Marseille. L'adaptation cinématographique, réalisée par Marc Allégret, sort le 2 novembre 1932.
Le 28 juillet 1932, son frère Paul, le dernier chevrier des collines d'Allauch, qu'il va souvent visiter dans les collines où ils ont passé leur enfance, meurt à l'âge de 34 ans. Souffrant du haut mal grand mal épileptique, il s'éteint à l'hôpital de Courtrai Belgique après une opération de la dernière chance effectuée par le professeur Émile Eugène Lauwers. Il est inhumé dans le caveau de la famille Pagnol au petit cimetière de La Treille.
Devant le succès de Marius, la Paramount a fait l'acquisition début 1932, sans son accord, des droits d'adaptation de sa pièce Topaze, confiés au réalisateur Louis Gasnier avec comme interprète Louis Jouvet. Pagnol réussit à participer au tournage mais s'estime dépossédé de son œuvre il tournera plus tard lui-même deux autres versions de Topaze en 1936 avec Alexandre Arnaudy et en 1950 avec Fernandel. Désormais devenu très riche, il décide de devenir producteur et fonde au printemps 1932 à Paris sa propre société de production. Il installe ses studios à Boulogne-Billancourt au bord de la Seine et à Marseille en plein cœur du célèbre quartier du Prado.
En 1934, il achète, dans les collines au-dessus du village de La Treille où, enfant, il passait ses vacances, un domaine de vingt-quatre hectares plus tard agrandi à quarante, dans l'idée d'en faire son « Hollywood provençal. Il y tourne désormais lui-même ses films. Son premier film en tant que réalisateur est Le Gendre de Monsieur Poirier en 1933, suivi de Jofroi en 1933, d’Angèle en 1934, de Merlusse et de Cigalon en 1935, de César en 1936, de Regain en 1937, de La Femme du boulanger en 1938, etc. En 1932, il rencontre aussi Jean Giono qu'il incite à s'intéresser au cinéma, et dont il adaptera quatre œuvres, pour Jofroi d'après Jofroi de la Maussan, Angèle d'après Un de Baumugnes, Regain, La Femme du boulanger d'après un passage de Jean le Bleu. Il fait jouer les plus grands acteurs français de l'époque Raimu, Pierre Fresnay, Fernandel, amis avec qui il joue à la pétanque entre deux scènes.
Il vit désormais avec Orane Demazis, qui incarnait tous les soirs le personnage de Fanny dans Marius et Fanny, et ils ont un fils en 1933, Jean-Pierre Burgart, car Pagnol ne le reconnaîtra pas. Puis, en 1936, Yvonne Pouperon, sa nouvelle collaboratrice des bureaux de la rue Fortuny à Paris, met au monde une fille, Francine Pagnol. C'est l'année où il fonde la revue Les Cahiers du film, avant de diriger sa propre maison d'édition en 1937.
En 1941, pour réaliser son « ambition de construire, sous le ciel de Provence, la Cité du Cinéma », il fait, sans l'avoir vu, l'acquisition du château de la Buzine avec quelques hectares de prairies au bord du canal. C'est en visitant son domaine huit jours plus tard, qu'il reconnaît « l'affreux château, celui de la peur de ma mère » (Le Château de ma mère) : sa mère s’était évanouie lorsque la famille traversait clandestinement la propriété pour rejoindre la Bastide neuve, un garde les avait surpris et leur avait fait faire demi-tour. Mais la Seconde Guerre mondiale fait rage ; Pagnol doit interrompre ses tournages et vendre ses studios à la Gaumont, tout en restant directeur de production. Ceci lui permet de se dérober aux pressions d'Alfred Greven, président de la Continentale société de production française à capitaux allemands, qui veut lui faire réaliser du cinéma de propagande nazie. C'est donc en tant que directeur de production des Films Marcel Pagnol qu'il produit, en novembre-décembre 1941, le documentaire Français, vous avez la mémoire courte !, réquisitoire contre le communisme et apologie du maréchal Pétain, commandé par le Secrétariat général à l'Information et à la Propagande du régime de Vichy. Son dernier film tourné pendant la guerre, La Prière aux étoiles, reste inachevé et, pour garder la maîtrise de son œuvre, Pagnol détruit la pellicule du film.
Le divorce d'avec Simone Collin à peine prononcé, Marcel vit avec l'actrice Josette Day, rencontrée en janvier 1939. Leur liaison ne dure que le temps de leur refuge en zone libre, jusqu'à la fin de la guerre. Bien que très lié à Orane Demazis puis à Josette Day, Pagnol n'a été marié ni à l'une ni à l'autre et trois enfants lui sont nés hors mariage Jacques, Jean-Pierre et Francine. Sa propre mère, Augustine, a accouché d'un premier enfant moins de quatre mois après son mariage. Cela explique que le thème de l'enfant naturel soit une constante de son œuvre.
Il acquiert en 1942 le Domaine de l'Étoile à La Gaude, où il réemploie le personnel de ses studios comme ouvriers horticoles pour la culture d'œillets, afin de leur éviter le Service du travail obligatoire en Allemagne. Cette reconversion spectaculaire inspira à Raimu la boutade suivante : Si Marcel devient fleuriste, alors moi, je n'ai plus qu'à aller vendre des rascasses ! .

De la Comédie à l'Académie

En 1944, Pagnol est élu président de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques. Chargé de constituer une commission d'épuration, il s'emploie à défendre les nombreux auteurs et artistes ayant continué à travailler pendant l'Occupation sans avoir pris de position ouvertement collaborationniste.
En 1945, il épouse l'actrice Jacqueline Bouvier, rencontrée en août 1938, qui sera jusqu'à sa mort son brin de poésie et de tendresse. Elle tournera dans cinq de ses films et lui donnera deux enfants, Frédéric en 1946 et Estelle en 1951 ; Estelle mourut en 1954 à l'âge de trois ans.
Âgé de 51 ans, il est, avec Paul Claudel, Maurice Garçon, Charles de Chambrun, Jules Romains et Henri Mondor, l’une des six personnes élues le 4 avril 1946 à l'Académie française lors de la deuxième élection groupée de cette année visant à combler les très nombreuses places vacantes laissées par la période de l'Occupation. Il y remplace Maurice Donnay au 25e fauteuil. Il est reçu le 27 mars 1947 par Jérôme Tharaud à ce fauteuil qu'occupa jadis Prosper Mérimée.
La brutale disparition en septembre 1946 de son ami Raimu est pour lui une douloureuse épreuve : On ne peut pas faire un discours sur la tombe d'un père, d'un frère ou d'un fils ; tu étais pour moi les trois à la fois : je ne parlerai pas sur ta tombe.
En 1948, il tourne, avec Tino Rossi, La Belle Meunière, premier film français en couleur réalisé en France par des Français avec un procédé français le Rouxcolor, procédé utilisant l'optique au lieu de la chimie, mis au point par deux Français, les frères Roux. C'est un échec retentissant et une perte financière de cinquante millions de francs pour Pagnol. En 1950, il écrit le scénario d'une version modernisée de la nouvelle de Maupassant, Le Rosier de Mme Husson, avec Bourvil, acteur alors débutant, dans le rôle d’Isidore. Le film, mis en scène par Jean Boyer, très mal accueilli par la critique, connaît cependant un succès commercial.
Pagnol prend sa vraie revanche deux ans plus tard, en 1951, avec la troisième version de Topaze - au générique, Fernandel Topaze, Larquey Tamise, sa femme Jacqueline Ernestine Muche - un grand succès unanimement salué par la critique : Nous avons eu le phénomène Raimu, il existe aussi un phénomène Fernandel, écrit Jean-Jacques Gautier dans Le Figaro.
En 1951, poursuivi par le fisc, il s'installe à Monte-Carlo dans une somptueuse villa du XIXe siècle en bord de mer, La Lestra, auprès de son admirateur et ami le prince Rainier III de Monaco. À la mort de sa fille Estelle, âgée de trois ans, il fuira l'endroit en 1954 pour revenir à Paris dans un hôtel particulier au square de l'Avenue du Bois, sur l'avenue Foch, se rapprochant de ses bureaux de la rue Fortuny.
Toujours en 1951, Pagnol achève le scénario de Manon des sources. Brouillé avec Fernandel, il choisit Rellys pour le rôle d'Ugolin. Henri Poupon le Papet, Raymond Pellegrin l'instituteur et Jacqueline Pagnol Manon font partie de la distribution. Le film, qu'il tourne à La Treille, sort en janvier 1953 avec un accueil mitigé. Toujours très actif dans le domaine du cinéma, il signe la même année l'adaptation et les dialogues d'un vaudeville, Carnaval mise en scène Henri Verneuil, et se lance dans ce qui sera sa dernière œuvre pour le cinéma, Les Lettres de mon moulin. Pagnol traduit en langue parlée trois contes d'Alphonse Daudet, Le Secret de maître Cornille, l’Élixir du révérend Père Gaucher tourné à l'abbaye Saint-Michel de Frigolet avec Rellys dans le rôle-titre et Les Trois Messes basses.
En 1955, à 60 ans, il préside le 8e Festival du Film de Cannes. Il fait également jouer au festival d'Angers sa traduction d’Hamlet de William Shakespeare avec Jacqueline Pagnol et Serge Reggiani. Puis, le 6 octobre, il fait donner au théâtre de Paris sa tragédie en cinq actes Judas. L'éclairage nouveau, voire d'avant-garde, du personnage, tant il se rapproche de l’Évangile de Judas, est mal perçu par l'ensemble des confessions. L'accueil tout aussi froid réservé à Fabien, comédie en quatre actes qui sortira quelques mois plus tard, inciteront Pagnol à mettre un terme à son activité d'auteur dramatique, comme il l'avait déjà fait pour sa carrière de cinéaste.

Naissance du romancier

En 1957, il commence la rédaction de ses Souvenirs d'enfance avec La Gloire de mon père, premier tome qui connaît un immense succès plus de cinquante mille exemplaires vendus en un mois, dû entre autres à la façon dont Pagnol décrit les personnes qui lui sont chères dans le petit monde provençal qui l'entoure, et à la vivacité de ses souvenirs, embellis par le temps et l'imagination. Le deuxième tome, Le Château de ma mère, en 1958, s'inscrit en tête du classement des meilleures ventes de l'année.
Pagnol est alors au premier plan de l'actualité littéraire. Grasset lui réclame sa traduction des Bucoliques de Virgile commencée cinq ans plus tôt. Suivent en 1960, Le Temps des secrets Le Temps des amours, inachevé, sera publié en 1977 après sa mort, puis en 1962, L'Eau des collines, une version romancée en deux tomes, Jean de Florette et Manon des Sources, de son film de 1951. En 1965, passionné par cette énigme historique, il publie à son compte Le Masque de fer, remanié en 1973 sous le titre Le Secret du masque de fer.
En 1967, il tourne pour la télévision un conte d’Alphonse Daudet, dont il avait commencé quelques scènes en 1954 pour Les Lettres de mon moulin avant de l'abandonner, Le Curé de Cucugnan avec Fernand Sardou qui sera diffusé le jour de Noël 1968.
En 1968, il fête les quarante ans de Topaze, son premier succès. La pièce a alors été jouée plus de cinq mille fois depuis sa création.
Pagnol a dit : Si j'avais été peintre, je n'aurais fait que des portraits. Peintre de la nature humaine, précurseur du portrait psychologique et de la valorisation de la culture régionale et provençale, il a légué à la postérité des portraits vivants des personnages de son enfance. Auteur comblé, il reçut tous les honneurs de son vivant : le succès, l'argent, la gloire et la reconnaissance des siens.
Marcel Pagnol meurt le 18 avril 1974, à l'âge de 79 ans, dans sa maison de l'avenue Foch à Paris. Son corps repose au cimetière marseillais de La Treille, auprès de sa mère et de sa dernière fille Estelle, non loin du caveau de la famille Pagnol où reposent son père et sa seconde femme Madeleine Julien, ses frères et sœur et leur famille. Sur sa tombe, en guise d'épitaphe, une citation de Virgile : Fontes amicos uxorem dilexit Il a aimé les sources, ses amis, sa femme.

Un conteur méditerranéen

L'essentiel du talent de Marcel Pagnol tient à deux qualités fondamentales : c'est un conteur savoureux, à la langue souple et imagée, mais c'est aussi, et peut-être surtout, un remarquable peintre de caractères. Cette dernière qualité lui a naturellement permis de créer quelques personnages inoubliables, au théâtre et au cinéma. On s'en convaincra aisément en considérant ses premières pièces. Si Les Marchands de gloire et Jazz sont des œuvres mineures, c'est qu'elles appartiennent au théâtre de mœurs ou de situations, genre où Marcel Pagnol ne se sent pas à l'aise. En revanche, avec Topaze et Marius, il campe quelques caractères d'une troublante vérité, mobiles et parfois contradictoires, pleins de vigueur et de tendresse.
Topaze met en scène un petit professeur d'institution privée, effacé, timide, sans envergure et d'une inflexible honnêteté. Utilisé à son insu comme homme de paille par un affairiste véreux mais puissant, conseiller municipal prévaricateur mais respecté, Topaze change d'attitude : ayant compris le mécanisme de la réussite, il bat son maître à son propre jeu et entreprend une ascension sociale irrésistible. Fable immorale, allégorie grinçante, Topaze est surtout une admirable galerie de personnages : tous les caractères, même les plus fugitifs, ont un relief, une épaisseur d'une surprenante vérité.
Avec Marius, Marcel Pagnol renouvelle, avec beaucoup de finesse et d'habileté, le thème éternel de l'homme écartelé entre deux désirs également puissants et contradictoires : l'attachement à ses racines (le plus souvent symbolisé, comme c'est ici le cas, par l'amour d'une femme) et la soif d'aventures. Fils d'un modeste cafetier, Marius rêve de partir sur la mer, de découvrir des horizons nouveaux, des rivages lointains. Fanny, son amie d'enfance, amoureuse de lui plus qu'il ne l'est d'elle, comprend qu'il ne sera jamais pleinement heureux s'il renonce à son rêve pour l'épouser. Elle feint une indifférence soudaine pour le détacher d'elle et lui donner la force de partir. Ici encore, une situation très simple permet à Marcel Pagnol de camper des personnages très caractérisés, à la fois pittoresques et hauts en couleur, mouvants et nuancés. Certains de ces personnages sont devenus de véritables types, comme César, le père de Marius, le maître voilier Panisse, la poissonnière Honorine, mère de Fanny, et M. Brun, l'inspecteur des douanes lyonnais.

Il convient de faire ici une remarque. C'est avec Marius que Marcel Pagnol met au point sa technique dramatique. Ses pièces ne sont pas construites comme celles de Feydeau, où chaque scène, même la plus brève, est absolument nécessaire au développement de l'histoire. Dans Marius, quelques scènes seulement font évoluer la situation. Les autres constituent des « hors-d'œuvre » : elles se suffisent à elles-mêmes, on pourrait les supprimer sans nuire à la continuité dramatique. Elles constituent des récréations, écrites pour le seul plaisir du dialogue. La plus célèbre de Marius est sans doute « la partie de cartes ». On pourrait en citer plusieurs.
C'est évidemment dans ces scènes que les rôles se précisent, que les caractères prennent de l'épaisseur, surtout quand l'auteur est servi par des comédiens exceptionnels, comme ce fut justement le cas pour Marius : Raimu (César), Charpin (Panisse), Alida Rouffe (Honorine) ont largement contribué à rendre leurs personnages vivants et populaires.

L'écrivain au cinéma

Il faut encore observer que cette technique dramatique a beaucoup servi, à partir de 1931, l'auteur de films. Le cinéma, avec sa grande mobilité, ses raccourcis, son indépendance à l'égard du temps et de l'espace, absorbe plus facilement les scènes à faire que le théâtre. Mais il est clair qu'un autre souci, plus profond, plus impérieux, a conduit Marcel Pagnol vers l'expression cinématographique. Un bon scénariste doit posséder deux talents pas toujours réunis : il doit avoir à la fois le sens du récit et celui des dialogues ; il doit être en même temps romancier et auteur dramatique. Inversement, un écrivain né aux alentours de 1900, et qui ressentait le désir d'utiliser ces deux techniques, devait fatalement se mettre à écrire pour le cinéma.
On a souvent reproché à Marcel Pagnol d'avoir fait, au cinéma, du « théâtre filmé ». C'est peut-être vrai pour la mise en images de ses deux pièces marseillaises. C'est faux de films comme Angèle, Regain, et encore de La Femme du boulanger. Dans ce dernier, tiré d'un conte de Jean Giono, Marcel Pagnol adopte, une fois de plus, le sujet d'une fable. Un nouveau boulanger s'installe dans un village provençal. (Il pourrait être berrichon ou savoyard.) Au bout de quelques semaines, son épouse, plus jeune que lui, et probablement insatisfaite, s'éprend d'un berger des environs et s'enfuit avec lui. Dès lors, le boulanger cesse de cuire le pain : il ne rallumera son four, dit-il, que lorsque sa femme lui sera revenue. Alors, tout le village se met à la recherche de l'infidèle. Bien entendu, on la retrouve, elle réintègre le logis conjugal, et le pain recommence à dorer dans la boulangerie. Fable amère, on le voit, où la tradition paysanne triomphe, mais sans gaieté. De ce conte, Marcel Pagnol a fait une œuvre admirable, pleine de tendresse, d'amertume et d'humanité. Ici encore, la peinture des caractères (et leur affrontement) prend le pas sur l'histoire. Ici encore, Raimu donne un éblouissant exemple de son immense talent.
En 1957, La Gloire de mon père, premier volume des souvenirs d'enfance, a connu un succès foudroyant. Deux autres volumes ont suivi : Le Château de ma mère (1958) et Le Temps des secrets (1960), pour composer une nouvelle trilogie. Marcel Pagnol y fait revivre quelques personnages drôles et attachants, comme son père et son oncle Jules. Il y décrit, avec cet amour malicieux qui ne s'est jamais démenti sa vie durant, les petites gens de Provence, les villages et les collines qui s'élèvent à l'est de Marseille. Un quatrième volume, Le Temps des amours, paru en 1977, posthume donc, rapporte des souvenirs d'adolescence qui retrouvent, non sans bonheur, le climat de Pirouettes. C'est ainsi que la boucle d'une œuvre se referme parfois.
De l'œuvre de Marcel Pagnol, la partie qui se présentait comme la plus éphémère, la partie cinématographique, a fort bien résisté à l'épreuve du temps. Peu de films tournés entre 1930 et 1935 ont gardé autant de fraîcheur que sa trilogie, Angèle ou Regain. Ce « théâtre filmé », longtemps dédaigné par des critiques pointilleux, a finalement donné plusieurs « classiques » de l'histoire du cinéma. Marcel Pagnol est mort à Paris, le 18 avril 1974. Il est enterré dans le hameau de La Treille, près d'Aubagne, au pied de ces collines qu'il n'avait jamais réellement quittées. Jacques Bens

Chronologie

1869 Naissance de Joseph, son père
1873 Naissance d'Augustine Lansot, sa mère
1889 Nomination de son père, Joseph Pagnol, au poste d'instituteur public à Aubagne.
1893 Joseph épouse Pauline Henriette dite Augustine Lansot, le 28 décembre.
1894 Naissance de Maurice le 2 avril à Aubagne. Mort de celui-ci le 18 août à Aubagne.
1895 Naissance de Marcel Pagnol le 28 février, au numéro 16 du cours Barthélemy à Aubagne.
1897 Installation de la famille à Saint-Loup Marseille.
1898 Naissance de son frère, Paul Maurice le Petit Paul le 28 avril à Marseille Saint-Loup.
1900 Déménagement à Marseille où Joseph est nommé à l'école des Chartreux.
1902 Naissance de sa sœur, Germaine le 2 février à Marseille 54, chemin des Chartreux.
1904 Premières vacances à la Bastide Neuve.
1905 Élève au lycée Thiers à Marseille.
1909 Naissance de son frère cadet, René.
1910 Mort de sa mère, Augustine. Premiers poèmes dans la revue Massilia.
1913 Marcel obtient le baccalauréat de philosophie avec mention assez bien.
1914 Fonde la revue littéraire Fortunio. Mobilisé à Nice, puis réformé pour faiblesse de constitution.
1915 Répétiteur au collège de Digne, puis de Tarascon.
1916 Mariage le 2 mars avec Simone Collin. Obtient la licence de Langues et Littérature Vivantes.
1917 Répétiteur d'anglais au collège de Pamiers sur Ariège, puis au lycée Mignet d'Aix-en-Provence.
1918 Mort de Lili des Bellons David Magnan le 23 juillet à Vrigny Marne.
1920 Professeur-adjoint au lycée Saint-Charles à Marseille. Catulle, drame en vers.
1922 Professeur-adjoint d'anglais au lycée Condorcet à Paris.
1923 Rencontre d'Orane Demazis à Paris, pour qui il créera ensuite le rôle de Fanny.
1926 Séparation d'avec Simone le divorce ne sera prononcé qu'en 1941.
1930 Rencontre de Kitty Murphy, jeune danseuse anglaise, à Paris.
1930 Naissance de Jacques Pagnol, qu'il a eu avec Kitty Murphy, et qui fut son assistant après la guerre, puis cameraman pour France 3 Marseille.
1932 Mort de son frère, Paul Maurice Pagnol, à l'hôpital de Courtrai Belgique le 28 juillet.
1933 Naissance de son fils Jean-Pierre, qu'il a eu avec Orane Demazis.
1935 Rencontre d'Yvonne Pouperon, sa collaboratrice dans les bureaux de la rue Fortuny.
1936 Naissance de sa fille Francine, qu'il a eue avec Yvonne Pouperon.
1938 Rencontre de Jacqueline Bouvier en août, qui n'entrera dans sa vie qu'en 1944.
1939 Rencontre en janvier de Josette Day. Leur liaison dure le temps de leur refuge en zone libre, à Marseille, puis à la Gaude.
1941 Le divorce d'avec Simone Colin est prononcé. Acquisition du château de la Buzine.
1944 Retiré dans la Sarthe avec Jacqueline Bouvier en attendant le débarquement allié.
1945 Mariage avec Jacqueline Bouvier.
1946 Naissance de leur fils, Frédéric. Le 27 mars, Marcel Pagnol est reçu au fauteuil 25 de l'Académie française.
1951 Naissance de leur fille, Estelle. Le 15 novembre, mort de son père, Joseph Pagnol.
1954 Mort de leur fille, Estelle, des suites d'une crise d'acétonémie.
1974 Mort de Marcel Pagnol à Paris le 18 avril.

Appréciation critique

L'accent ne constitue pas, chez Pagnol, un accessoire pittoresque, une note de couleur locale, il est consubstantiel au texte et, par là, aux personnages. Ses héros le possèdent comme d’autres ont la peau noire. L'accent est la matière même de leur langage, son réalisme. Aussi, le cinéma de Pagnol est tout le contraire de théâtral, il s'insère par l'intermédiaire du verbe dans la spécificité réaliste du cinéma.... Pagnol n’est pas un auteur dramatique converti au cinéma, mais l'un des plus grands auteurs de films parlants.
— André Bazin, Qu'est-ce que le cinéma ? en 4 volumes, T. II, Le Cinéma et les autres arts, 1959, Éditions du Cerf
Distinctions et récompenses
1939 : Meilleur film étranger pour Regain - New-York Critic's Circle Awards
1949 : Meilleur film étranger pour La femme du boulanger - New-York Critic's Circle Awards
1950 : Meilleur film étranger pour Jofroi - New-York Critic's Circle Awards
1981 : César d'honneur
Grand officier de la Légion d'honneur
Commandeur des Palmes académiques
Commandeur des Arts et des Lettres
Marcel Pagnol fut consul honoraire du Portugal à Monaco.

Œuvres Romans, nouvelles et essais

1921 : La Petite Fille aux yeux sombres, roman, Marseille, Éditions de Fortunio
1921 : Le Mariage de Peluque, roman, Marseille, Éditions de Fortunio ; réédité en 1932 sous le titre Pirouettes
1922 : L'Infâme Truc, nouvelle, extrait de Jazz
1932 : Pirouettes, réédition retitrée de Le Mariage de Peluque, roman, Paris, Fasquelle
1933-1934 : Cinématurgie de Paris, Les Cahiers du film ; réédition remaniée dans Œuvres complètes, tome III, Éditions de Provence, 1967
1947 : Notes sur le Rire, essai, Paris, Nagel
1949 : Critique des Critiques, essai, Paris, Nagel
1957 : La Gloire de mon père Souvenirs d'enfance I, roman autobiographique, Monte-Carlo, Pastorelly
1958 : Le Château de ma mère Souvenirs d'enfance II, roman autobiographique, Monte-Carlo, Pastorelly
1960 : Le Temps des secrets Souvenirs d'enfance III, roman, Monte-Carlo, Pastorelly
1961 : Ambrogiani l'homme et le peintre, Marcel Pagnol & George Waldemar, Paris, Presses artistiques
1963 : L'Eau des collines, roman en deux parties : Jean de Florette, Manon des sources, Paris, Éditions de Provence
1965 : Le Masque de fer, éditions de Provence remanié sous le titre Le Secret du Masque de fer en 1973, essai historique, Monte-Carlo, Pastorelly
1968 : Les Sermons de Marcel Pagnol, recueil rassemblés par le RP Norbert Calmels, Robert Morel éditeur

parutions posthumes

1977 : Le Temps des amours Souvenirs d'enfance inachevé IV, roman autobiographique, Julliard
1977 : Les Secrets de Dieu, nouvelle éditée en recueil Œuvres complètes. 12. 3-427 ; première édition séparée, Marseille, La Chrysalide, 1983
1981 : Confidences, essai et préfaces sur le théâtre et le cinéma, Julliard
1984 : L'Infâme Truc et autres nouvelles, recueil d'œuvres posthumes, Julliard
1986 : Les Inédits de Marcel Pagnol, Vertiges du Nord-Carrère, 1987 ; textes divers écrits entre 1940 et 1960, rassemblés par son fils Frédéric.

Théâtre

1922 : Catulle, drame en 4 actes, en vers, Marseille, Éditions de Fortunio, inédit à la scène
1922 : Ulysse chez les Phéaciens en collaboration avec Arno-Charles Brun, tragédie en vers, inédite à la scène
1923 : Tonton ou Joseph veut rester pur en collaboration avec Paul Nivoix, vaudeville sous le pseudonyme de Castro, Marseille, théâtre des Variétés, 30 août 1923
1925 : Les Marchands de gloire en collaboration avec Paul Nivoix, comédie satirique en cinq actes, Paris, théâtre de la Madeleine, 15 avril 1925 ; Paris, La Petite

Illustration, 1926

1926 : Un direct au cœur en collaboration avec Paul Nivoix), comédie, Lille, théâtre de l'Alhambra, mars 1926
1926 : Jazz premier titre Phaéton, comédie satirique en quatre actes, Monte Carlo, Grand Théâtre, 9 décembre 1926, Paris, théâtre des Arts, 21 décembre 1926 ; Paris, La Petite Illustration, avril 1927
1928 : Topaze, comédie satirique en quatre actes, Paris, théâtre des Variétés, 9 octobre 1928 ; Paris, Fasquelle, 1930
1929 : Marius, comédie en trois actes et six tableaux, Paris, Théâtre de Paris, 9 mars 1929 ; Paris, Fasquelle, 1931
1931 : Fanny, comédie en trois actes et quatre tableaux, Paris, Théâtre de Paris, 5 décembre 1931 ; Paris, Fasquelle, 1932
1946 : César, comédie en trois actes adaptée du film, Paris, Théâtre des Variétés ; Paris, Réalités, 1947
1955 : Judas, tragédie en cinq actes, Paris, Théâtre de Paris, 6 octobre 1955 ; Paris, Théâtre de Paris, 6 octobre 1955
1956 : Fabien, comédie en quatre actes, Paris, théâtre des Bouffes Parisiens, 28 septembre 1956 ; Paris, Paris-théâtre no 115, 1956

adaptation posthume

1985 : La Femme du boulanger, comédie en quatre actes adaptée du film

Traductions

1944 : Le Songe d'une nuit d'été, pièce de William Shakespeare, traduit de l'anglais, 1947, au Grand Théâtre de Monaco ; Paris, Œuvres complètes, Club de l'Honnête Homme, 1971
1947 : Hamlet, pièce de William Shakespeare, traduit de l'anglais, Paris, Nagel
1958 : Bucoliques, recueil de Virgile, traduit du latin, Paris, Grasset

Cinéma Filmographie

Hommage naïf à Marcel Pagnol
Marcel Pagnol est le réalisateur des films suivants :
1933 : Le Gendre de Monsieur Poirier, d'après la pièce d'Émile Augier ;
1933 : Jofroi ;
1934 : Angèle ;
1934 : L'Article 330, court métrage d'après la pièce de Georges Courteline ;
1934 : Le Premier Amour, scénario de Marcel Pagnol, plusieurs fois mis en chantier mais jamais réalisé ;
1935 : Merlusse ;
1935 : Cigalon ;
1936 : Topaze ;
1936 : César ;
1937 : Regain ;
1938 : Le Schpountz ;
1938 : La Femme du boulanger ;
1940 : La Fille du puisatier ;
1941 : La Prière aux étoiles inachevé ;
1945 : Naïs ;
1948 : La Belle Meunière ;
1951 : Topaze ;
1952 : Manon des sources ;
1952 : Ugolin ;
1954 : Les Lettres de mon moulin ;
1967 : Le Curé de Cucugnan téléfilm.
Marcel Pagnol est l'auteur des scénarios et dialogues des films suivants :
1931 : Marius d'Alexander Korda ;
1932 : Fanny de Marc Allégret ;
1932 : Direct au cœur de Roger Lion, avec la participation d'Arnaudy, d'après la pièce de Marcel Pagnol et Paul Nivoix ;
1933 : Topaze de Louis Gasnier ;
1933 : L'Agonie des aigles de Roger Richebé, d'après le roman de Georges d'Esparbès, Les Demi-Solde ;
1934 : Tartarin de Tarascon de Raymond Bernard, d'après Alphonse Daudet ;
1939 : Monsieur Brotonneau d'Alexandre Esway, d'après Flers et Caillavet ;
1950 : Le Rosier de Madame Husson de Jean Boyer, d'après Guy de Maupassant ;
1953 : Carnaval d'Henri Verneuil, d'après Émile Mazaud ;
1962 : La Dame aux camélias téléfilm, d'après Alexandre Dumas fils.

Adaptations d'œuvres de Pagnol et reprises

1931 : adaptations traduites de Marius : Zum goldenen Anker en allemand, Längtan till havet en suédois ;
1934 : remake allemand de Fanny : Der schwarze Walfisch de Fritz Wendhausen ;
1938 : Port of Seven Seas, remake américain de James Whale : scénario couvrant l'ensemble de la trilogie ;
1942 : 海猫の港 Umineko no minato Le port aux mouettes, de Yasuki Chiba 93 minutes, 35 mm, Noir & Blanc. Remake japonais de Marius. Sur le port de Karatsu en 1897, alors que le Japon commence à développer son empire d'outre-mer, une famille tient le bar « La taverne de l'ancre ». Le fils a une chance unique de s'embarquer, contre l'avis de son père, d'où le dilemme entre les intérêts de l'empire et la famille ;
1949 : 春の戯れ Haru no tawamure Flirt de printemps, de Kajiro Yamamoto 109 min, Noir et Blanc, avec Hideko Takamine Fanny et Jukichi Uno Marius. Après 風の子 Kaze no ko L'enfant du vent, c'est le second film de ce réalisateur sur le thème de l'appel de la mer opposé à celui de l'amour ;
1954 : ouverture à Broadway de la comédie musicale Fanny, adaptant l'ensemble de la trilogie ;
1961 : Fanny, adaptation cinématographique, d'après la comédie musicale mais sans numéros musical, par Joshua Logan, avec Leslie Caron et Maurice Chevalier ;
1965 : Merlusse de Georges Folgoas avec Georges Wilson ;
1967 : 愛の賛歌 Ai no sanka Hymne à l'amour, de Yoji Yamada 94 min. Ce troisième remake japonais, couvrant le scénario des films Marius et Fanny, transpose le drame dans une petite île de la mer intérieure de Seto où les amoureux sont séparés par l'immigration vers le Brésil ;
vers 1970 : Version discographique de la bande sonore de la trilogie, avec des commentaires de Marcel Pagnol ;
1986 : Jean de Florette de Claude Berri avec Yves Montand, Daniel Auteuil et Gérard Depardieu ;
1986 : Manon des sources de Claude Berri avec Yves Montand, Daniel Auteuil et Emmanuelle Béart ;
1990 : La Gloire de mon père d'Yves Robert ;
1990 : Le Château de ma mère d'Yves Robert ;
1999 : Le Schpountz de Gérard Oury ;
2000 : nouvelle version de la trilogie, remake français réalisé par Nicolas Ribowski pour la télévision : Marius, Fanny et César ;
2006 : Le Temps des secrets téléfilm de Thierry Chabert ;
2006 : Le Temps des amours téléfilm de Thierry Chabert ;
septembre 2007 : Opéra Marius et Fanny, inspiré des deux premiers romans de la trilogie marseillaise, sur une musique de Vladimir Cosma et dans une mise en scène de Jean-Louis Grinda ; avec Roberto Alagna et Angela Gheorghiu. Spectacle musical commandé par l'Opéra de Marseille avec l'accord de Jacqueline Pagnol ;
2011 : La Fille du puisatier, réalisé par Daniel Auteuil avec lui-même, Kad Merad, Sabine Azéma et Jean-Pierre Darroussin ;
2013 : Marius et Fanny sorties simultanées, les deux premiers des trois films réalisés par Daniel Auteuil reprenant la trilogie marseillaise.


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Posté le : 26/02/2016 19:34

Edité par Loriane sur 27-02-2016 15:38:56
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Défi du 27 février 2016
Modérateur
Inscrit:
21/03/2013 20:08
De Belgique
Messages: 3218
Niveau : 44; EXP : 15
HP : 215 / 1078
MP : 1072 / 35550
Hors Ligne
Chers amis,

Pour le défi de cette semaine, je vous invite à vous pencher sur la culture asiatique qui nous enseigne une théorie qui nous est plutôt inconnue, celle de la réincarnation. En résumé, cela signifie que notre existence ne se résume pas en une seule naissance avec un terme mais en plusieurs arrivées et départs sur notre planète Terre, à des époques et dans des lieux différents. Tout cela est régi par la nécessité d’apprendre de nos erreurs, d’assouvir certains désirs, de profiter d’une expérience acquise dans une autre vie.
Bref, je vous invite à ce voyage. Par un moyen que vous choisirez (hypnose, voyance, machine à remonter le temps ou autre), vous retrouvez la trace d’une (voire même plusieurs) de vos vies antérieures. Cette découverte pourra faire écho à ce que vous ressentiez ou être une surprise (bonne ou mauvaise).

Je vous laisse cogiter….


Au plaisir de vous lire.

Bon week-end

Couscous

Posté le : 26/02/2016 18:55
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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